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13/04/2021 | FRANCE | N°19LY02171

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 13 avril 2021, 19LY02171


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 août 2016 par lequel le maire de la commune de Pressins a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire.

Par un jugement n° 1605974 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 21 août 2016 et a enjoint au maire de Pressins de statuer sur la demande de permis de construire déposée par Mme A... dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour

Par une re

quête et des mémoires complémentaires enregistrés les 10 juin et 2 décembre 2019 ainsi que le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 21 août 2016 par lequel le maire de la commune de Pressins a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire.

Par un jugement n° 1605974 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 21 août 2016 et a enjoint au maire de Pressins de statuer sur la demande de permis de construire déposée par Mme A... dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 10 juin et 2 décembre 2019 ainsi que le 20 janvier 2020, la commune de Pressins, représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 avril 2019 et de rejeter la demande de Mme A... ;

2°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'exception de non-lieu à statuer n'est pas fondée dès lors qu'en délivrant un permis de construire à Mme A... le 3 juin 2019, le maire de la commune n'a fait que se conformer au jugement du tribunal administratif de Grenoble lui enjoignant de statuer à nouveau sur sa demande de permis de construire ; ce permis pourra être retiré le cas échéant ;

- la délibération donnant délégation au maire pour agir en justice est conforme à l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales et permettait au maire de faire appel et de représenter la commune devant la juridiction ;

- la signature apposée sur l'arrêté du 21 août 2016 est celle du maire de Pressins, lequel est parfaitement identifiable bien que ses nom et prénom ne soient pas mentionnés ;

- l'arrêté attaqué est suffisamment motivé dès lors qu'il fait référence à la délibération du 27 avril 2015 du conseil municipal qui prescrit la révision du plan d'occupation des sols et l'élaboration du plan local d'urbanisme ;

- à la date du sursis à statuer en litige, la procédure d'élaboration du PLU de Pressins était déjà bien avancée et se fondait largement sur les documents, notamment le plan de zonage, élaborés lors d'une précédente procédure d'élaboration du plan débutée en 2009 et qui n'avait pas abouti après enquête publique ; l'intimée avait donc connaissance du classement en zone agricole envisagé ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que le projet de Mme A... ne compromettrait pas l'exécution du futur PLU dès lors que la parcelle d'implantation du projet s'insère au sein d'un vaste espace agricole et forestier et est bordée par une route communale qui en facilite l'accès et l'exploitation agricole.

Par trois mémoires en défense enregistrés le 25 octobre 2019 et les 17 janvier et 18 août 2020, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme A..., représentée par la Selarl Gossement Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la commune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête dès lors que le maire de Pressins lui a délivré un permis de construire par arrêté du 3 juin 2019 ; contrairement à ce que soutient la commune, la délivrance de ce permis de construire n'intervient pas en application du jugement, le tribunal administratif ayant seulement enjoint de statuer à nouveau sur sa demande de permis de construire ; le permis de construire délivré le 3 juin 2019, devenu définitif, ne pourra pas être retiré quand bien même le jugement serait annulé ;

- à titre subsidiaire, la requête est irrecevable, la commune se bornant à reprendre les moyens développés en première instance sans critique du jugement et le maire ne disposant pas de la qualité pour représenter la commune faute pour la délibération donnant délégation au maire de le représenter pour les actions en justice de définir précisément les cas où cette délégation s'exercerait en méconnaissance de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ;

- à titre encore plus subsidiaire, aucun des moyens soulevés n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 30 septembre 2020 par une ordonnance du même jour en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... D..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me C..., substituant Me F..., pour la commune de Pressins ;

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Pressins relève appel du jugement du 11 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 21 août 2016 par lequel le maire de Pressins a sursis à statuer sur la demande de permis de construire de Mme A... pour une durée de deux ans et lui a enjoint de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire de Mme A... dans le délai de deux mois.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme dans sa version alors en vigueur : " (...) A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. ". Aux termes de l'article L. 424-1 du même code : " (...) Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus aux articles L. 153-11 (...). / Le sursis à statuer doit être motivé et ne peut excéder deux ans. (...) A l'expiration du délai de validité du sursis à statuer, une décision doit, sur simple confirmation par l'intéressé de sa demande, être prise par l'autorité compétente chargée de la délivrance de l'autorisation, dans le délai de deux mois suivant cette confirmation. Cette confirmation peut intervenir au plus tard deux mois après l'expiration du délai de validité du sursis à statuer. Une décision définitive doit alors être prise par l'autorité compétente pour la délivrance de l'autorisation, dans un délai de deux mois suivant cette confirmation. A défaut de notification de la décision dans ce dernier délai, l'autorisation est considérée comme accordée dans les termes où elle avait été demandée. ".

3. Lorsque l'autorité administrative, en exécution d'un jugement d'annulation, prend une nouvelle décision qui n'est motivée que par le souci de se conformer à ce jugement d'annulation, cette délivrance ne prive pas d'objet l'appel dirigé contre ce jugement. La décision du juge d'appel statuant au fond a pour effet, si elle annule le jugement d'annulation, de rétablir la décision initiale dans l'ordonnancement juridique et entraîne, ce faisant, la sortie de vigueur de la décision qui n'avait été prise que pour l'exécution du jugement annulé. Si, en revanche, la juridiction d'appel rejette les conclusions dirigées contre le jugement d'annulation, celui-ci redevient exécutoire et la décision prise pour son exécution, produit à nouveau ses effets.

4. Il ressort des pièces du dossier que, saisi d'une demande de permis de construire déposée par Mme A... en juillet 2016, le maire de Pressins a, par arrêté du 21 août 2016, sursis à statuer sur cette demande pendant une durée de deux ans au motif que le projet était susceptible de compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme en cours d'élaboration. Le PLU de la commune de Pressins a été adopté par délibération du 2 novembre 2017 du conseil communautaire de la Communauté de communes des Vals du Dauphiné, devenue compétente en matière d'élaboration et de suivi du plan local d'urbanisme. Il ressort des termes de l'arrêté du 3 juin 2019, que le permis délivré à Mme A... l'a été en exécution de l'injonction de réexamen de la demande de l'intéressée mentionnée au dispositif du jugement attaqué, la commune ayant, concomitamment, fait appel de ce jugement. La circonstance que le maire ait délivré un permis de construire, alors que l'annulation de la décision de sursis attaquée n'est pas définitive et alors que les premiers juges n'ont prononcé qu'une injonction de statuer à nouveau sur la demande de Mme A..., ne prive pas d'objet la requête de la commune. Dans ces conditions, l'exception de non-lieu à statuer opposée par Mme A... en appel et résultant de la délivrance du permis de construire par arrêté du 3 juin 2019 n'est pas fondée et doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 août 2016 :

5. Pour surseoir à statuer, par son arrêté en date du 21 août 2016, sur la demande de permis de construire une maison d'habitation sur la partie constructible d'un terrain, d'une superficie totale de 6 750 m², situé route de Reculfort au lieudit Le Pantalon et classé en zone UD et NC présentée par Mme A..., le maire de Pressins, après avoir visé le POS en vigueur et la délibération du 27 avril 2015 prescrivant l'élaboration du PLU, s'est fondé sur la circonstance que le projet est situé en zone UD du règlement en vigueur et qu'il " est de nature à compromettre l'exécution du futur PLU ". Alors même que la procédure de révision du POS initiée par la délibération du 27 avril 2015 succédait à une précédente procédure d'élaboration du PLU initiée en 2009, abandonnée après enquête publique et ayant fait l'objet d'une large information auprès des habitants de la commune, en se bornant à évoquer la seule circonstance que le projet de Mme A... était de nature à compromettre l'exécution du futur PLU sans en détailler les motifs, le maire n'a pas mis l'intéressée à même de connaître les motifs de droit et de fait fondant le sursis à statuer en litige et n'a ainsi pas suffisamment motivé sa décision en méconnaissance de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme dont les dispositions sont rappelées au point 2.

6. Par ailleurs, la commune fait valoir que la construction projetée compromettrait l'accès à la vaste zone agricole dans laquelle elle s'insère. Si la parcelle d'assiette de plus de 6 000 m² s'ouvre sur une vaste zone agricole exploitée comme en témoignent les photos versées aux débats, toutefois, la construction projetée ne porte que sur la partie du tènement située en bordure de la voie publique et prévoit l'édification d'une maison individuelle dans la continuité de celles édifiées de part et d'autre de cette voie. Dans ces conditions, le projet n'est pas de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense par Mme A... que la commune de Pressins n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 21 août 2016 et a enjoint au maire de la commune de statuer dans le délai de deux mois sur la demande Mme A....

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la commune de Pressins au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas partie perdante en appel. Il y a en revanche lieu de faire application de ces mêmes dispositions à l'encontre de la commune de Pressins et de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros à verser à Mme A....

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Pressins est rejetée.

Article 2 : La commune de Pressins versera à Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pressins et à Mme B... A....

Délibéré après l'audience du 23 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme E... D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.

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N° 19LY02171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02171
Date de la décision : 13/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL GOSSEMENT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-13;19ly02171 ?
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