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01/04/2021 | FRANCE | N°20LY02534

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 01 avril 2021, 20LY02534


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... épouse D... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 novembre 2019 du préfet de la Savoie lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.

Par une ordonnance n° 2004206 du 31 juillet 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Gre

noble a rejeté sa demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour

Par une req...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... épouse D... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 novembre 2019 du préfet de la Savoie lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.

Par une ordonnance n° 2004206 du 31 juillet 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 31 août 2020, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2019 du préfet de la Savoie ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de première instance était recevable pour avoir été formée dans le délai de trente jours à compter de la réception de la décision intervenue sur sa demande d'aide juridictionnelle, elle-même formée dans les trente jours de la notification de l'arrêté attaqué ;

- l'acte attaqué est entaché d'incompétence ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'erreur de droit au regard des articles L. 711-2 et L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard aux risques de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine ;

- la décision attaquée méconnaît les articles 8 et 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et au droit à la protection de l'unité familiale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2021, le préfet de la Savoie conclut au non-lieu à statuer.

Il soutient que Mme D... a obtenu la délivrance d'une carte de séjour temporaire valable du 27 août 2020 au 26 mars 2021, dont elle a sollicité le renouvellement le 29 janvier 2021, et avait au préalable obtenu la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour le 18 novembre 2019, antérieurement à l'enregistrement de sa requête devant le tribunal administratif de Grenoble, cette délivrance ayant entraîné l'abrogation de la mesure d'éloignement du 4 novembre 2019.

La demande d'aide juridictionnelle de Mme D... a été rejetée par une décision du 18 novembre 2020. Son recours contre cette décision a été rejeté par une ordonnance du 8 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C..., première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante de Géorgie née le 16 janvier 1976, a déclaré être entrée en France le 1er décembre 2018. Elle a formé une demande de protection internationale qui a été rejetée le 12 juillet 2019 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, statuant en procédure accélérée en vertu du 1° du I de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 4 novembre 2019, le préfet de la Savoie lui a alors fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme D... demande à la cour d'annuler l'ordonnance du 31 juillet 2020 par laquelle la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. La circonstance que la décision attaquée ait été abrogée avant même l'enregistrement de la demande de première instance ou d'appel n'est susceptible d'avoir une incidence que sur la recevabilité de cette demande mais n'emporte pas non-lieu à statuer, lequel ne peut résulter que d'évènements survenus postérieurement à la saisine de la juridiction. Par suite, l'exception de non-lieu à statuer soulevée en défense par le préfet de la Savoie doit être rejetée, dès lors qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué du 4 novembre 2019 a été implicitement abrogé par la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour le 18 novembre 2019, antérieure à la saisine du tribunal administratif de Grenoble.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Aux termes, d'une part, de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Selon l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : / (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 (...) ".

4. Aux termes, d'autre part, du I bis de l'article L. 512-1 du même code : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du même code, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 du même code, fait courir un délai de quinze jours pour contester cette obligation (...) ". Selon le II de l'article R. 776-5 du même code : " (...) les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation ".

5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'étranger, informé par la notification de la décision prononçant une obligation de quitter le territoire français de la possibilité de la contester dans un délai de quinze jours devant le tribunal administratif, peut, dès la saisine de ce tribunal, demander à son président que lui soit désigné d'office un avocat. Ce délai de quinze jours n'est susceptible d'aucune prorogation.

6. Dès lors, l'introduction d'une demande d'aide juridictionnelle, alors que l'étranger dispose de la faculté de demander au président du tribunal la désignation d'office d'un avocat, ne saurait avoir pour effet de proroger le délai de quinze jours mentionné au I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à l'article R. 776-2 du code de justice administrative pour contester les décisions d'obligation de quitter le territoire français.

7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme D..., après le rejet en procédure accélérée de sa demande d'asile, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français nécessairement fondée sur le 6° précité du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prise le 4 novembre 2019, notifiée le 8 novembre 2019 et qui mentionnait les voies et délais de recours. Il s'ensuit que le délai de recours de quinze jours était expiré lorsqu'elle a saisi le président du tribunal administratif d'une requête tendant à son annulation, le 28 juillet 2020, et qu'il l'était au demeurant déjà lorsqu'elle a saisi le bureau d'aide juridictionnelle le 6 décembre 2019.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme E... épouse D... ou à son conseil la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... épouse D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... épouse D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2021, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2021.

2

N° 20LY02534

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02534
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MORLAT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-01;20ly02534 ?
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