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01/04/2021 | FRANCE | N°20LY01318

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 01 avril 2021, 20LY01318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 4 novembre 2019 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de destination ;

Par jugement n° 1907941 lu le 17 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 16 avril 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement, ainsi que l'arrêté du 4 novembre 2019 ;

2°) d'enjoindre au p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 4 novembre 2019 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de destination ;

Par jugement n° 1907941 lu le 17 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 16 avril 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement, ainsi que l'arrêté du 4 novembre 2019 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation après remise sans délai d'une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est entaché de l'incompétence de son signataire ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen particulier ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour prend en considération un nombre erroné de contrats de travail ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît le principe du contradictoire et est insuffisamment motivée ;

- la désignation du pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le préfet n'a pas pris en compte les risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;

- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Haute-Savoie qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante kosovar née en 1982, entrée irrégulièrement en France fin 2012, a demandé l'asile qui lui a été refusé, en dernier lieu, par la Cour nationale du droit d'asile, le 25 juin 2014. Une carte de séjour temporaire lui a néanmoins été délivrée puis renouveler en raison de son état de santé jusqu'au 15 décembre 2016. Une nouvelle demande de renouvellement de ce titre a été rejetée et elle a fait l'objet à cette occasion d'une obligation de quitter le territoire français. Le 18 décembre 2018, elle a demandé un titre de séjour pour motif humanitaire, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 2019 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination.

Sur l'arrêté pris dans son ensemble :

2. En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par Mme Gouache, secrétaire générale de la préfecture de la Haute-Savoie, qui disposait d'une délégation de signature du préfet de la Haute-Savoie, par arrêté du 30 avril 2018, publié au recueil des actes administratifs le 9 mai 2018, à l'effet de signer toutes décisions, sauf celles relevant de certaines matières dont ne relève pas la police du séjour et de l'éloignement des étrangers, sans égard à la formulation de ladite délégation. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée (...) à l'étranger (...) dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".

4. Les contrats de travail produits par la requérante ne constituent pas un motif humanitaire au sens des dispositions précitées dès lors que la vie, la santé, la liberté et, plus généralement, les intérêts fondamentaux de l'intéressée ne dépendent pas de la poursuite de son séjour en France en qualité de salariée. Par suite en ne mentionnant que deux contrats de travail le préfet de la Haute-Savoie n'a pas entaché ses décisions de défaut d'examen particulier de la situation personnelle de la requérante et n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs du tribunal les moyens tirés du défaut de motivation, de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile invoqués contre l'ensemble des décisions de l'arrêté en litige, que Mme C... se borne à reproduire en appel.

Sur le refus de titre de séjour :

6. En premier lieu, Mme C... reprend en appel le moyen tiré de l'erreur sur le nombre de contrats de travail dont elle dispose, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs du tribunal.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Mme C... est entrée en France en 2012, six ans avant la décision en litige. Si elle soutient qu'elle est reconnue travailleur handicapé et bénéficie de plusieurs contrats de travail, alors qu'elle se trouve en situation irrégulière, ces circonstances ne sauraient traduire une intégration particulièrement forte au sein de la société française, de nature à lui conférer un droit au séjour. Par ailleurs, son époux qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, le 19 juillet 2017, ne dispose pas d'un droit au séjour en France à la date de la décision attaquée. Mme C... n'établit alors pas être dans l'impossibilité de se réinsérer au Kosovo, où elle a vécu la majeure partie de sa vie, où elle n'établit pas davantage être dépourvue d'attaches familiales et où il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle encourrait des risques qui ne lui permettraient pas d'y mener une vie privée et familiale normale. Enfin, les titres de séjour temporaires qu'elle a obtenus en raison de sa pathologie ne lui donnaient pas vocation à demeurer sur le territoire au-delà du temps nécessaire aux soins dont elle a bénéficié. Dès lors, le préfet de la Haute-Savoie, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a ni porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens des stipulations précitées, ni entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour dirigée contre l'obligation de quitter le territoire doit être écartée par les motifs des points 6 à 7.

9. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 transposées à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le jugement attaqué.

Sur la fixation du pays de renvoi :

10. En premier lieu, l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français doit été écartée par les motifs des points 6 à 9.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) ". Mme C... n'établit pas, ainsi que les dispositions précitées lui en attribuent la charge, la réalité des risques de vindicte familiale qu'elle allègue encourir en cas de retour au Kosovo. Par suite, en désignant ce pays comme pays de renvoi, le préfet de la Haute-Savoie n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 4 novembre 2019. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbaretaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2021.

2

N° 20LY01318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01318
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : MAINGOT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-01;20ly01318 ?
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