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30/03/2021 | FRANCE | N°20LY01405

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 30 mars 2021, 20LY01405


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, Mme C... D... et M. F... G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2017 par lequel le maire de Val d'Isère a délivré à la SARL Sanéo un permis de construire un parking.

Par un jugement n° 1802219 du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté, et mis à la charge de la commune de Val d'Isère et de la SARL Sanéo la somme de 1 000 euros chacune à verser aux intimés.



Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 avril 2020, et un mémoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, Mme C... D... et M. F... G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2017 par lequel le maire de Val d'Isère a délivré à la SARL Sanéo un permis de construire un parking.

Par un jugement n° 1802219 du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté, et mis à la charge de la commune de Val d'Isère et de la SARL Sanéo la somme de 1 000 euros chacune à verser aux intimés.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 avril 2020, et un mémoire en réplique enregistré le 15 décembre 2020, la SARL Sanéo, représentée par la SCP Coblence Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par les intimés devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge solidaire des intimés la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable, dès lors qu'il n'est pas justifié que M. G... et Mme D... étaient propriétaires d'un bien au sein de l'immeuble Le Portillo à la date d'affichage du permis de construire ; les intéressés ne justifient pas non plus que le projet est de nature à affecter directement leurs conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leurs biens ; les intimés ont adopté une attitude dilatoire en attaquant l'ensemble des projets s'implantant à proximité ;

- la demande de première instance était irrecevable en ce qu'elle émanait du syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, le syndic de copropriété ne justifiant pas d'une habilitation régulière de l'assemblée générale pour agir en justice ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le permis méconnaît l'article UC 7 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le vice tiré de la méconnaissance de l'article UC 7 du règlement du PLU n'était pas régularisable et refusé de faire usage de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, le respect des règles de distance ne nécessitant que des aménagements mineurs du projet ;

- c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge une somme à verser aux intimés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- aucun des autres moyens soulevés par les intimés n'est fondé.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2020, et un mémoire en réplique enregistré le 26 janvier 2021, qui n'a pas été communiqué, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, Mme C... D... et M. F... G..., représentés par la SELARL CDMF Avocats Affaires Publiques, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'assemblée générale des copropriétaires a régulièrement autorisé le syndic à agir par délibération du 28 décembre 2017 ; ce dernier a pu régulièrement introduire un recours gracieux ;

- Mme D... et M. G... sont propriétaires d'un bien au sein de la copropriété le Portillo ; ils ont une vue directe sur le parc de stationnement projeté, dont l'accès doit s'effectuer par la copropriété dans des conditions qui sont de nature à occasionner des nuisances pour les copropriétaires, ainsi qu'un danger pour leur sécurité ;

- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le permis méconnaît les dispositions de l'article UC 7 du règlement du PLU ;

- le dossier de permis de construire était incomplet, s'agissant de la détermination de la surface de plancher des constructions projetées ainsi que du bâtiment devant être démoli, de l'aménagement des accès au terrain et à la construction ;

- le dossier de permis de construire ne précisait pas suffisamment l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder, en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de permis de construire ne faisait pas apparaître l'accord de la commune pour l'implantation d'une partie du projet sur la parcelle cadastrée B n° 842 lui appartenant ;

- le permis méconnaît les dispositions de l'article UC 3 du règlement du PLU relatives aux accès ;

- le permis méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en raison de l'insuffisance et de la dangerosité de l'accès ;

- le permis méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, au regard du risque incendie ;

- ce projet et celui présenté par la société Belval, portant sur la création de logements, constituant un ensemble immobilier unique, les pétitionnaires auraient dû déposer une seule demande de permis de construire.

Par un mémoire enregistré le 15 décembre 2020, la commune de Val d'Isère, représentée par la SELAS Adamas Affaires Publiques, conclut à l'annulation du jugement du 3 mars 2020, au rejet des conclusions de la demande présentée par les intimés devant le tribunal à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de ces derniers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable, en ce qu'elle émanait de M. G..., qui ne justifie pas d'un intérêt à agir ; au demeurant, il n'est pas justifié que M. G... a régulièrement notifié son recours contentieux, comme l'imposent les dispositions de l'article R. 600-1 du code de justice administrative ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le permis méconnaît l'article UC 7 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le vice tiré de la méconnaissance de l'article UC 7 du règlement du PLU n'était pas régularisable et refusé de faire usage de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, le respect des règles de distance ne nécessitant que des aménagements mineurs du projet ;

- aucun des autres moyens soulevés par les intimés n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 janvier 2021, par une ordonnance du 18 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me E..., substituant Me J..., pour la SARL Sanéo, celles de Me A... pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, Mme D... et M. G..., ainsi que celles de Me K..., substituant Me B..., pour la commune de Val d'Isère ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour la société Sanéo, enregistrée le 15 mars 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 26 octobre 2017, le maire de Val d'Isère a délivré à la société Sanéo un permis de construire un parc de stationnement de cent soixante-cinq places. Par jugement du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté. La SARL Sanéo relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions de la commune de Val d'Isère :

2. La commune de Val d'Isère, qui n'a pas interjeté appel du jugement, a été appelée à l'instance par la cour en qualité d'observateur. Par suite, le mémoire qu'elle a produit ne constitue pas une intervention en demande, assortie de moyens propres, mais de simples observations. En sa qualité d'observateur, la commune n'est pas recevable à présenter des conclusions ni à soulever des fins de non-recevoir, lesquelles ne peuvent qu'être écartées.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire (...) que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente (...) ". L'article L. 600-1-3 du même code dispose : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire (...) s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. " Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. G... est propriétaire depuis le 22 avril 2005 d'un appartement au sein de la résidence le Portillo, située sur la parcelle contiguë au projet, sans qu'il ne ressorte des pièces du dossier que ce dernier, qui a participé à l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble du 28 décembre 2017 ayant autorisé le syndic à contester ce permis, ait perdu cette qualité avant l'affichage de la demande de permis de construire. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que l'appartement de M. G... dispose d'une vue directe sur le terrain d'assiette du projet. Dans ces conditions, en faisant valoir un préjudice de vue, ainsi que les troubles sonores dont le projet peut être à l'origine, M. G... justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire, sans qu'ait d'incidence à cet égard le fait qu'il ait présenté d'autres recours contentieux. De même, il ressort des pièces du dossier que Mme D... est propriétaire d'un appartement dans la même résidence. En faisant état d'une vue partielle sur le projet et de troubles sonores, non sérieusement contestés, elle justifie de son intérêt à demander l'annulation du permis de construire en litige.

5. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, situé ainsi qu'il a été dit sur un terrain contigu au projet, justifie de son intérêt à agir en faisant état de l'importance du projet, des troubles de jouissance que ce projet est susceptible d'occasionner pour les copropriétaires et ce que la voie interne d'accès au parc de stationnement empiète sur sa propriété. Par ailleurs, le syndic a été régulièrement autorisé à introduire la demande devant le tribunal administratif par une résolution de l'assemblée générale des copropriétaires adoptée le 28 décembre 2017. Par suite, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo était recevable à demander l'annulation du permis de construire en litige.

Sur la légalité de l'arrêté du 26 octobre 2017 :

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

6. Aux termes de l'article Uc7 du règlement du plan local d'urbanisme : " 1 -La distance comptée horizontalement entre tout point d'un bâtiment et le point le plus proche de la limite séparative doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à 3 mètres./ 2 - Les constructions peuvent être édifiées en limite séparative : - si elles sont réalisées en sous-sol, la cote de référence étant prise au terrain naturel ; - sur le mur en surélévation d'une construction existante, édifiée sur la parcelle du pétitionnaire, en limite de propriété ; - contre le mur d'une construction existante édifiée en limite de propriété, sur la propriété voisine (...) 4 - Les parties entièrement enterrées des constructions ne sont pas soumises aux règles de recul prévues par le règlement, sauf dispositions particulières. "

7. Il ressort des pièces du dossier que la façade est du projet est encastrée dans la paroi rocheuse qui surplombe le rocher et, étant ainsi enterrée et sous le terrain naturel, entre dans le champ des exceptions à la règle de distance minimale aux limites séparatives fixées au 1 de l'article cité au point précédent. Il en est de même de la façade ouest du projet, qui s'accole au mur existant du garage couvert de la résidence Val d'Illaz, situé en limite parcellaire. Il ressort en revanche des pièces du dossier que les murs des façades nord et sud du projet, qui ne sont que partiellement enterrés sur ces parties, dépassent le sol naturel et ne s'accolent à aucune construction. Par suite, et ainsi que l'a jugé le tribunal, ces deux façades ne respectent pas les règles fixées à l'article Uc7 du règlement du plan local d'urbanisme.

8. Le vice affectant le permis de construire, relevé au point précédent, s'il nécessite une modification importante du projet, est susceptible d'être régularisé sans en changer la nature même. Une telle régularisation n'est toutefois envisageable que si aucun des autres moyens soulevés par les intimés, en première instance ou en appel, qu'il y a lieu d'examiner au titre de l'effet dévolutif, n'y fait obstacle.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par les intimés :

S'agissant de la composition du dossier de demande :

9. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire précise : (...) f) La surface de plancher des constructions projetées (...) ". Aux termes de l'article R. 431-6 du même code : " Lorsque le terrain d'assiette comporte des constructions, la demande précise leur destination (...), leur surface de plancher et indique si ces constructions sont destinées à être maintenues (...) ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le formulaire Cerfa fait mention de la superficie du projet. Par ailleurs, il précise que le projet prévoit la démolition du mur existant, protégeant le transformateur électrique, dont les caractéristiques et l'emplacement sont précisés sur les plans produits au dossier, de sorte que l'appréciation du service instructeur sur ce point n'a pu être faussée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 431-5 et R. 431-6 du code de l'urbanisme doit être écarté.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architecturel comprend une notice précisant : (...) f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. "

13. Il ressort des pièces du dossier que la notice du projet architectural précise que l'accès au parc de stationnement se ferait par la servitude consentie par la résidence de l'Illaz, laquelle apparaît sur les différents plans de la demande de permis de construire. Par ailleurs, les caractéristiques de cette voie d'accès sont mentionnées dans la notice de sécurité jointe au dossier de demande. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande, s'agissant des indications sur les accès au terrain et aux constructions doit être écarté.

14. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder ".

15. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire porte sur un ensemble de parcelles, cadastrées AC 66, 67, 68, 69 et B 842, qui sont bordées par une voie ouverte à la circulation publique et ne sont donc pas enclavées. Le plan de masse fait au demeurant apparaître la voie de desserte envisagée, correspondant à la voie existante servant de servitude de passage à plusieurs propriétés, dont les caractéristiques sont par ailleurs définies par la notice de sécurité jointe au dossier. Par suite, et sans que les intimés puissent utilement faire valoir, pour contester la composition du dossier de demande de permis de construire, que la voie interne empièterait sur la parcelle AC n° 274 appartenant à la copropriété le Portillo, le dossier, qui informe suffisamment le service instructeur sur les conditions d'accès au parc de stationnement, ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme cité au point précédent.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) ". Aux termes de l'article R. 431-35 du même code : " (...) La déclaration comporte également l'attestation du ou des déclarants qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une déclaration préalable. (...) ".

17. Il résulte de ces dispositions que, sous réserve de la fraude, le demandeur qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 4315 du code de l'urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées à l'article R. 4231 du même code pour déposer une demande de permis de construire doit être regardé comme ayant qualité pour présenter cette demande. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle déclaration ou d'une demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 4231 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de s'opposer à la déclaration ou de refuser la demande de permis pour ce motif.

18. Il ressort des pièces du dossier notamment de la demande de permis de construire que le pétitionnaire a attesté remplir les conditions prévues à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. Si une partie du projet empiète sur la parcelle cadastrée B n° 842, qui appartient au domaine privé de la commune, ainsi que le font valoir les intimés, le conseil municipal de Val d'Isère avait donné son accord, par délibération du 9 octobre 2017 au dépôt de la demande et à la vente future du terrain, de sorte que la demande de permis de construire ne présentait pas de caractère frauduleux. Par suite, le moyen doit être écarté.

S'agissant des autres moyens dirigés contre le permis de construire :

19. En premier lieu, par arrêt du 19 novembre 2019, devenu définitif, la cour administrative d'appel a annulé le jugement du 6 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble avait annulé la délibération du 19 décembre 2016 du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de ce plan et de ce que le permis de construire méconnaîtrait les règles du plan d'occupation des sols remis en vigueur doit être écarté.

20. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. / Les accès directs à la route départementale devront être conçus de manière à ne pas porter atteinte à la sécurité publique ou détériorer les conditions de circulation. " Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. "

21. Il ressort des pièces du dossier que pour accéder au parc de stationnement depuis l'avenue Olympique, voie publique bordant le terrain d'assiette du projet, les véhicules doivent emprunter un accès d'une largeur inférieure à quatre mètres puis une voie interne existante, laquelle empiète au demeurant en partie sur la parcelle voisine, propriété de la résidence le Portillo, sans qu'une servitude de passage ait été consentie. Cette voie interne longe le bâtiment du Val d'Illaz sur une cinquantaine de mètres et, étant étroite, d'une largeur parfois inférieure à quatre mètres, selon les plans produits, ne permet pas le croisement sécurisé des véhicules. Dans ces conditions, compte tenu de la configuration de l'accès, le projet implique nécessairement qu'un ou plusieurs véhicules souhaitant emprunter la voie interne d'accès au parc de stationnement manoeuvrent sur le trottoir ou la voie publique, très fréquentée, ou y demeurent le temps que des véhicules empruntant la voie en sens inverse puissent sortir du parc de stationnement. Dès lors, et ainsi que le font valoir les intimés, l'accès au terrain d'assiette du projet n'est pas adapté à l'opération compte tenu de l'importance du trafic automobile lié à la construction d'un parc de stationnement de cent soixante-cinq places, Par ailleurs, le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes empruntant les trottoirs ou la voie publique, ainsi que celle des personnes souhaitant pénétrer dans le parc de stationnement. Par suite, le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme, et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

22. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction du parc de stationnement, situé à plusieurs mètres de la copropriété Le Portillo , dont il est séparé par une paroi rocheuse, pourrait entraîner un risque d'incendie pour cet immeuble de grande hauteur, ni, alors que cette copropriété dispose d'un accès propre à la voie publique, qu'elle entraînerait une difficulté d'accès pour les véhicules d'incendie et de secours susceptibles d'intervenir en cas d'incendie dans cette propriété. Par suite, la délivrance du permis de construire ne procède pas d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ce risque.

23. Enfin, si une construction constituée de plusieurs éléments formant, en raison des liens physiques ou fonctionnels entre eux, un ensemble immobilier unique, doit en principe faire l'objet d'un seul permis de construire, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que, lorsque l'ampleur et la complexité du projet le justifient, notamment en cas d'intervention de plusieurs maîtres d'ouvrage, les éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome puissent faire l'objet de permis distincts, sous réserve que l'autorité administrative ait vérifié, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l'ensemble des permis délivrés. Il s'ensuit, d'autre part, que lorsque deux constructions sont distinctes, la seule circonstance que l'une ne pourrait fonctionner ou être exploitée sans l'autre, au regard de considérations d'ordre technique ou économique et non au regard des règles d'urbanisme, ne suffit pas à caractériser un ensemble immobilier unique.

24. Les intimés font valoir que le projet prévoit que le parc de stationnement abrite des espaces de stationnement pour le projet de chalets qui a fait l'objet d'une demande de permis de construire postérieure par la société Belval, et qu'un cheminement permette d'accéder à ces chalets. Toutefois, de tels éléments ne sauraient caractériser entre les deux projets, situés sur des terrains d'assiette distincts, des liens fonctionnels tels qu'ils caractériseraient un ensemble immobilier unique devant en principe faire l'objet d'un seul permis de construire.

Sur l'application de l'article L. 600-5-1 du code de justice administrative :

25. Aux termes de l'article L. 60051 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. "

26. Les vices affectant le permis de construire, relevés aux points 7 et 21 du présent arrêt, apparaissent susceptibles d'être régularisés, sans que la nature même du projet ne soit modifiée. Il y a lieu, en conséquence, de faire application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, il y a lieu de surseoir à statuer et de fixer à quatre mois à compter de la notification du présent arrêt le délai imparti à la requérante pour justifier de l'intervention d'une mesure de régularisation du projet en litige.

DÉCIDE :

Article 1er : En application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, il est sursis à statuer sur la requête jusqu'à l'expiration du délai de quatre mois fixé au point 26.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties dans cette instance sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sanéo, et au syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Portillo, pour les intimés.

Copie en sera adressée à la commune de Val d'Isère.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, président de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme I... H..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2021.

2

N° 20LY01405


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01405
Date de la décision : 30/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CDMF-AVOCATS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-30;20ly01405 ?
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