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18/03/2021 | FRANCE | N°20LY01493

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 18 mars 2021, 20LY01493


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2018 par lequel le préfet de la Loire a rejeté sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse et d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer l'autorisation sollicitée ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa demande.

Par un jugement n° 1901474 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour
>Par une requête enregistrée le 21 mai 2020, M. A..., représenté par Me Royon, avocat, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2018 par lequel le préfet de la Loire a rejeté sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse et d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer l'autorisation sollicitée ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa demande.

Par un jugement n° 1901474 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 mai 2020, M. A..., représenté par Me Royon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 janvier 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire du 12 novembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer l'autorisation sollicitée, ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision en litige n'est pas suffisamment motivée ;

- elle procède d'une erreur de droit, le préfet de la Loire s'étant estimé tenu de rejeter sa demande dès lors que la condition tenant au niveau des ressources n'était pas remplie ;

- elle est entachée d'une erreur de fait, quant au montant des ressources dont il disposait ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, dès lors qu'ayant été bénéficiaire de l'allocation adulte handicapé, il n'était pas soumis à la condition tenant à la justification d'un montant minimum de ressources ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 juin 2020, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une décision du 17 juin 2020, la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A... a été rejetée.

Par une ordonnance du 14 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C... D..., première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant tunisien né le 13 juillet 1954, relève appel du jugement du 28 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire du 12 novembre 2018 refusant de lui accorder le bénéfice du regroupement familial en faveur de son épouse.

2. En premier lieu, le préfet de la Loire, qui n'était pas tenu de mentionner précisément les raisons pour lesquelles il a estimé ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, a énoncé les considérations de droit et de fait justifiant le rejet de la demande dont il était saisi et constituant le fondement de sa décision. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse n'est pas suffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, il ressort de la décision litigieuse ainsi motivée, qui mentionne notamment que la demande ne présente pas un caractère exceptionnel justifiant qu'il soit dérogé aux conditions réglementaires et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, que le préfet de la Loire ne s'est pas estimé tenu de rejeter la demande présentée par M. A... au seul motif que la condition tenant à ses ressources n'était pas satisfaite. Par suite le moyen, tiré de l'erreur de droit dont procèderait ainsi la décision en litige manque en fait et doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint (...) ". L'article L. 411-5 du même code prévoit que : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 ou L. 821-2 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ou lorsqu'une personne âgée de plus de soixante-cinq ans et résidant régulièrement en France depuis au moins vingt-cinq ans demande le regroupement familial pour son conjoint et justifie d'une durée de mariage d'au moins dix ans (...) ". Selon l'article R. 411-4 de ce code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes (...) ". L'article R. 421-4 précise que : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les copies intégrales des pièces énumérées au 1° et joint les copies des pièces énumérées aux 2° à 4° des pièces suivantes : (...) 3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tels que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'allocation de solidarité aux personnes âgées, prévue par l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale, n'est pas prise en compte pour apprécier le niveau de ressources dont peut se prévaloir l'étranger qui sollicite le bénéfice du regroupement familial. Par suite, M. A... ne peut utilement invoquer la régularisation, intervenue en 2020, de ses droits à percevoir cette allocation à compter du 1er juillet 2017. Le moyen tiré de l'erreur de fait quant au montant des ressources retenu par le préfet de la Loire pour statuer sur la demande de M. A... doit dès lors être écarté.

6. En quatrième lieu, les dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont pour effet de soustraire à la condition de ressources qu'elles fixent les seuls demandeurs bénéficiaires de l'allocation adulte handicapée, et non l'ensemble des demandeurs qui en ont antérieurement bénéficié. M. A..., qui ne peut utilement se prévaloir de délibérations de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, dépourvues de force contraignante, et qui avait cessé de percevoir l'allocation adulte handicapé depuis le 1er août 2014, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Loire lui aurait à tort opposé l'insuffisance de ses ressources.

7. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a présenté une demande de regroupement familial en faveur de son épouse, à la suite de leur mariage célébré le 29 juin 2017 en Tunisie. Leur mariage était ainsi récent, à la date de la décision en litige. M. A..., qui résidait en France depuis plus de quarante ans, reconnaît, en outre, ne pas s'être régulièrement rendu auprès de son épouse, en raison de son état de santé. Ainsi, il n'établit nullement la réalité et l'intensité de leur relation conjugale. Enfin, les pièces médicales qu'il produit, dont une seulement, au demeurant peu précise, est antérieure à la décision en litige et dont une autre fait état de l'instauration de soins infirmiers à domicile, ne permettent pas d'établir la nécessité de la présence de son épouse à ses côtés. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

10. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles de son conseil tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2021, à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme C... D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2021.

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N° 20LY01493


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01493
Date de la décision : 18/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ROYON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-18;20ly01493 ?
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