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18/03/2021 | FRANCE | N°20LY00991

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 18 mars 2021, 20LY00991


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure

M. et Mme B... ont saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant à l'annulation partielle de la délibération du 4 avril 2019 par laquelle la commune de Louhans-Châteaurenaud a approuvé son plan local d'urbanisme, et, à titre subsidiaire, à l'indemnisation de la perte de valeur de leurs biens.

Par un jugement n°1901675 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mars 2020, M. et Mme

B..., représentés par Me Supplisson, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure

M. et Mme B... ont saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant à l'annulation partielle de la délibération du 4 avril 2019 par laquelle la commune de Louhans-Châteaurenaud a approuvé son plan local d'urbanisme, et, à titre subsidiaire, à l'indemnisation de la perte de valeur de leurs biens.

Par un jugement n°1901675 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mars 2020, M. et Mme B..., représentés par Me Supplisson, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération du 4 avril 2019 par laquelle le conseil municipal de la commune de Louhans-Châteaurenaud a approuvé son plan local d'urbanisme, en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée section G n° 392 en zone agricole et les parcelles cadastrées section B n° 204 et 205 en zone naturelle supportant un espace boisé classé ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Louhans-Châteaurenaud la somme de 3 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont considéré, à tort, que le classement en zone A de la parcelle cadastrée section G n° 392 n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les premiers juges ont considéré, à tort, que le classement en zone N des parcelles cadastrées section B n° 204 et 205 n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement de la parcelle cadastrée section G n° 392 en zone A est contraire aux objectifs du plan d'aménagement et de développement durables.

Par un mémoire enregistré le 15 juillet 2020, la commune de Louhans-Châteaurenaud, représentée par Me Thiry, avocat, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. et Mme B... une somme de 3 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le classement de la parcelle cadastrée section G n° 392 en zone agricole du plan local d'urbanisme de la commune est parfaitement justifié et adapté aux objectifs poursuivis par la commune et à son parti pris urbanistique en ce qu'elle présente un intérêt agricole ;

- le classement des parcelles cadastrées section B n° 204 et 205 en zone naturelle et espace boisé classé du plan local d'urbanisme de la commune est parfaitement justifié et adapté aux objectifs poursuivis par la commune et à son parti pris urbanistique en ce qu'elles présentent un intérêt paysager notable ;

- le moyen tiré de l'incohérence entre le plan d'aménagement et de développement durables et le règlement du plan local d'urbanisme n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme H..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de Me G..., représentant la commune de Louhans-Châteaureneaud ;

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 4 avril 2019, le conseil municipal de la commune de Louhans-Châteaurenaud a approuvé son plan local d'urbanisme. Le 12 juin 2019, M. F... B... et Mme D... A... épouse B... ont saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant, à titre principal, à l'annulation partielle de la délibération en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section G n° 392 et section B n° 204 et 205 et, à titre subsidiaire, à l'indemnisation de la perte de valeur de leurs biens. M. et Mme B... demandent à la cour d'annuler le jugement du 31 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes d'annulation, et d'annuler la délibération en litige.

Sur la légalité de la délibération :

En ce qui concerne le classement des parcelles :

2. Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Aux termes de l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ". Aux termes de l'article L. 113-1 du même code : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. (...) ".

3. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Il résulte des dispositions précitées que le classement en zone agricole peut concerner des zones à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles, alors même qu'elles seraient desservies ou destinées à être desservies par des équipements publics et seraient situées à proximité immédiate de zones construites et que les auteurs du plan peuvent classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 151-24, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la parcelle non bâtie cadastrée section G n° 392, d'une superficie de plus de 9 000 m², a été acquise en 2011 à l'état de pré et vierge de constructions, l'acte de vente précisant qu'elle était située en zone naturelle NB du plan d'occupation des sols et avait fait l'objet d'un certificat d'urbanisme opérationnel négatif. Si cette parcelle est incluse au sein d'une zone urbaine de faible densité, elle forme néanmoins un ensemble cohérent, d'une surface importante, avec la parcelle contiguë non bâtie également classée en zone agricole, sans qu'y fasse obstacle la présence d'une haie séparative, et n'est séparée que par une ou deux parcelles de vastes zones agricoles situées à l'est, au sud et à l'ouest. Elle se situe en outre dans un hameau secondaire de la commune de Louhans-Châteaurenaud, dans une zone à dominante rurale et de caractère agricole, que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu préserver, en limitant l'urbanisation diffuse et le mitage ainsi qu'en maintenant et développant une dynamique agricole durable. Il n'est par ailleurs pas contesté que la commune est notamment concernée par plusieurs appellations d'origine contrôlée ou protégée nécessitant en particulier l'alimentation des bovins en herbe ou fourrage, sans qu'il soit démontré ou même allégué que la parcelle litigieuse ne pourrait conserver à cette fin sa nature initiale de pré. Les époux B..., qui ne disposent d'aucun droit au maintien de règles de constructibilité antérieures éventuellement plus favorables, ne peuvent par ailleurs utilement se prévaloir des conditions de desserte de la parcelle par les réseaux ou du bornage auquel ils auraient procédé en vue d'un projet de futur lotissement. Par suite, les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en classant la parcelle litigieuse en zone agricole.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que les deux parcelles non bâties cadastrées section B n° 204 et 205, d'une superficie totale de 11 754 m², sont situées dans une zone à dominante naturelle et agricole en entrée du hameau secondaire de Seugny que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu préserver de l'urbanisation. Compte tenu de leur importante superficie et de leur localisation, elles ne peuvent être considérées comme formant une dent creuse, quand bien même elles jouxteraient des parcelles bâties classées en zone urbaine de faible densité. En admettant même que ces parcelles densément arborées aient été intégralement défrichées par les appelants, il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme que la légalité d'un classement en espace boisé classé n'est pas subordonné à l'existence préalable d'un boisement, alors qu'il n'est par ailleurs ni démontré, ni même allégué, que les parcelles litigieuses seraient insusceptibles d'être reboisées le cas échéant. Il suit de là, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les parcelles litigieuses soient bordées par la route départementale, que leur classement en zone naturelle supportant un espace boisé classé n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables :

6. Selon l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

7. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

8. Si M. et Mme B... font valoir que le classement de la parcelle cadastrée section G n° 392 serait contraire aux objectifs exprimés dans le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) visant à " mobiliser le potentiel de renouvellement urbain estimé à partir des dents creuses mobilisables " et " à développer une production suffisante de logements pour assurer les besoins du territoire ", ils n'allèguent toutefois pas que les zones ouvertes à l'urbanisation par le règlement approuvé et le zonage qui l'accompagne seraient insuffisantes à remplir cet objectif. Par ailleurs, compte tenu de sa superficie et de sa localisation, la parcelle G 392 ne peut être qualifiée de dent creuse. Enfin, il ressort également du PADD que l'urbanisation devra se faire " dans la mesure du nécessaire, en préservant le plus possible les espaces naturels et agricoles ", qu'il convient de " protéger et valoriser les espaces de nature et les continuités écologiques ", de " conserver la ceinture agricole, siège d'une agriculture dynamique ", de " conserver la vocation agricole des hameaux en limitant le développement d'autres usages " et de " limiter le mitage et la fragmentation des terres agricoles ". Dans ces conditions, dans le cadre de l'analyse globale à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme à laquelle il doit être procédé, le classement en zone A de la parcelle litigieuse, située dans un hameau secondaire, ne peut être regardé comme présentant une incohérence au regard des objectifs du plan d'aménagement et de développement durables.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation partielle de la délibération du 4 avril 2019 par laquelle le conseil municipal de la commune de Louhans-Châteaurenaud a approuvé son plan local d'urbanisme.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Louhans-Châteaurenaud, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement aux époux B... de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à leur charge le versement à la commune de Louhans-Châteaurenaud d'une somme de 2 000 euros à ce titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : M. F... B... et Mme D... A... épouse B... verseront à la commune de Louhans-Châteaurenaud une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... ainsi qu'à la commune de Louhans-Châteaurenaud.

Délibéré après l'audience du 25 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme C..., présidente assesseure,

Mme H..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2021.

N° 20LY00991 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP BLT DROIT PUBLIC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 18/03/2021
Date de l'import : 30/03/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20LY00991
Numéro NOR : CETATEXT000043279180 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-18;20ly00991 ?
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