Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 13 août 2019 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le Nigéria, État dont elle a la nationalité, comme le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre sous astreinte à cette autorité de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation.
Par jugement n° 1906887 lu le 20 janvier 2020, le magistrat délégué par le président du tribunal a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 19 février 2020, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon, ainsi que l'arrêté du 13 août 2019 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ", subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence d'accès effectif aux soins dans son pays d'origine, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant ; il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de séjour qui la fonde ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant ;
- la fixation du pays de destination est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 11 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre1950 ;
- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller ;
- et les observations de Me B..., pour Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
Sur le refus de séjour :
1. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".
2. Si dans son avis émis le 23 mars 2018, le collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que la pathologie psychiatrique dont souffre Mme A..., nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il a relevé que les caractéristiques du système de santé du Nigeria lui permet d'y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Si l'intéressée se prévaut d'un rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés du 22 janvier 2014 qui souligne l'insuffisante couverture sanitaire de cet Etat dans la spécialité médicale de psychiatrie, ce même rapport fait notamment état de l'existence de huit hôpitaux et de six cliniques spécialisés et ne relève pas d'indisponibilité des traitements médicamenteux permettant de traiter ces pathologies. Enfin, le seul certificat du docteur Moussa du 13 septembre 2019 précisant que Mme A... " présente un état de stress post traumatique chronique compliqué d'une dépression sévère " nécessitant un " traitement médicamenteux " ainsi que l'affirmation des laboratoires commercialisant ces traitements quant à l'absence de leur disponibilité au Nigeria ne démontrent pas que Mme A... ne disposerait pas d'un accès effectif à un traitement, dont le caractère non substituable n'est pas allégué, dès lors que les pièces produites par le préfet en première instance démontrent la disponibilité de traitement en matière de stress post-traumatique et de syndrome dépressif au Nigeria. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le refus de séjour méconnaît les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée irrégulièrement un peu plus de trois ans avant la décision en litige, à l'âge de trente-deux ans avec deux de ses enfants mineurs nés en 2011 et 2013, et qu'un troisième enfant est né sur le territoire français en juillet 2016. Si l'intéressée soutient qu'elle ne dispose d'aucune information quant à la situation de son mari et père de ses enfants, elle n'apporte aucune explication quant à la séparation ainsi alléguée. Par ailleurs, Mme A... ne fait état d'aucune attache privée et familiale sur le territoire français alors que compte tenu de son âge et de sa date d'entrée sur le territoire français, elle ne peut être considérée comme étant dépourvue d'attache privée et familiale dans son pays d'origine. Enfin, les enfants de l'intéressée ont vocation à suivre leur mère dans le pays dont ils ont la nationalité. Par suite, les moyens tirés de ce que le refus de séjour en litige méconnaîtrait les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant doivent être écartés. En l'absence d'autres éléments, Mme A... n'est pas davantage fondée à soutenir que la décision en litige serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
5. En premier lieu et en l'absence d'illégalité du refus de séjour en litige, Mme A... n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français prise sur son fondement.
6. En second lieu, les moyens tirés de ce que la mesure d'éloignement méconnaîtrait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant doivent être écartés, en l'absence d'autres éléments, pour les mêmes motifs que précédemment indiqué.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. En l'absence d'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français en litige, Mme A... n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de ces décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de séjour, de la mesure d'éloignement et de la décision fixant le pays de renvoi qui lui ont été opposées. Dès lors, les conclusions de sa requête, présentées aux mêmes fins, doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'État n'étant pas partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 25 février 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2021.
N° 20LY00687 2