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04/03/2021 | FRANCE | N°20LY00490

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 04 mars 2021, 20LY00490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 4 juillet 2019 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1902280 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 4 juillet 2019 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1902280 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 février 2020 et deux mémoires enregistrés le 20 juillet 2020 et le 21 septembre 2020, Mme B... épouse C..., représentée par Me Bouflija, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 décembre 2019 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 4 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne sont pas suffisamment motivées ;

- elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 juillet 2020, le préfet de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 30 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... E..., première conseillère,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Bouflija, avocat, pour Mme B... épouse C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... épouse C..., ressortissante marocaine née le 13 octobre 1998, relève appel du jugement du 11 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Côte-d'Or du 4 juillet 2019 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Sur le bienfondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants marocains en vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, le 6 juillet 2017, Mme B..., ressortissante marocaine née en 1998, a épousé au Maroc M. C..., de nationalité française. Ce mariage avait été précédé de plusieurs séjours de M. C... au Maroc, dont la réalité, nonobstant l'incertitude quant à la durée exacte de l'un d'eux, est établie par le passeport de l'intéressé et les photographies produites. Mme B... épouse C... a rejoint son époux sur le territoire français le 29 novembre 2017, sous couvert d'un visa d'une durée d'un an valable jusqu'au 9 novembre 2018. Il ressort des différentes pièces produites, telles que des factures, des documents fiscaux, ses fiches de paie et ses contrats de travail, qu'elle a toujours déclaré résider auprès de son époux à leur domicile situé à Montmagny. Si le préfet de la Côte-d'Or conteste la réalité de cette vie commune, en se prévalant d'un rapport de la gendarmerie de Beaune daté du 14 mars 2019, il ressort de ce rapport qu'une visite au domicile déclaré par les époux a permis de constater la présence de certaines affaires appartenant à M. C.... Si ce rapport relève l'absence de toute décoration ou la présence d'un seul oreiller, des justifications probantes ont été apportées par les intéressés, tant par leur projet de déménagement, corroboré par l'acte d'achat d'une propriété par M. C..., que par la présence d'un lit aménagé. De même, la circonstance que Mme C... n'ait pas été en mesure de joindre son époux, absent lors de la visite domiciliaire, a été vraisemblablement expliquée par les intéressés, par les travaux réalisés par M. C... dans leur futur domicile, eux-mêmes justifiés par des factures de matériaux de construction établies à son nom et datées du jour de la visite. De même, les circonstances que Mme C... ait, le lendemain, été aperçue accompagnée d'un jeune homme, que seul M. C... est acquéreur du bien présenté comme leur futur logement et que le maire ait indiqué que les époux ne paraissaient pas en public ne permettent pas de contester utilement l'existence d'une communauté de vie, laquelle a, au demeurant, été confirmée par différents témoignages de proches et de connaissances du couple. Dès lors, Mme C... est fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour au motif que cette vie commune n'était pas établie, le préfet de la Côte-d'Or a méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Le refus de titre de séjour opposé à Mme C... étant ainsi entaché d'illégalité, l'obligation de quitter le territoire français dont il est assorti et la décision fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement doivent, par voie de conséquence, également être annulées.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés, que Mme B... Épouse C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ".

7. Dès lors qu'aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait ne résulte de l'instruction, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique que le préfet territorialement compétent délivre à Mme B... épouse C... un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 décembre 2019 est annulé.

Article 2 : Les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 4 juillet 2019 refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B... épouse C..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de destination de cette mesure d'éloignement sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Côte-d'Or de délivrer à Mme B... épouse C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme B... épouse C... une somme de 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme B... épouse C... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... épouse C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme A... E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2021.

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N° 20LY00490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00490
Date de la décision : 04/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BOUFLIJA BASMA

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-04;20ly00490 ?
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