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04/03/2021 | FRANCE | N°19LY00022

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 04 mars 2021, 19LY00022


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 janvier 2019 et un mémoire enregistré le 23 septembre 2020, la SAS Parc Eolien Nordex LXVI, représentée par Me Harada (Eversheds Sutherland LLP), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 6 juillet 2018 portant autorisation unique d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, en ce qu'il refuse d'autoriser l'éolienne E4, ensemble la décision de rejet implicitement née du silence conservé sur son recours gracieux ;

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°) de lui délivrer l'autorisation sollicitée à l'égard de l'éolienne E4 ;

3°) de mett...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 janvier 2019 et un mémoire enregistré le 23 septembre 2020, la SAS Parc Eolien Nordex LXVI, représentée par Me Harada (Eversheds Sutherland LLP), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 6 juillet 2018 portant autorisation unique d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, en ce qu'il refuse d'autoriser l'éolienne E4, ensemble la décision de rejet implicitement née du silence conservé sur son recours gracieux ;

2°) de lui délivrer l'autorisation sollicitée à l'égard de l'éolienne E4 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le préfet de la Côte-d'Or a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en estimant que l'éolienne E4 crée un rapport d'échelle disproportionné et un effet de surplomb et d'écrasement sur le hameau de Juilly.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 juillet 2020, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il expose que le moyen soulevé n'est pas fondé.

Par ordonnance du 30 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 22 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... B..., première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Coussi, avocat, représentant la SAS Parc Eolien Nordex LXVI ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 6 juillet 2018, le préfet de la Côte-d'Or a délivré à la SAS Parc Eolien Nordex LXVI une autorisation unique pour l'installation et l'exploitation de cinq des six éoliennes que comporte son projet, ainsi que de deux postes de livraison, sur les territoires des communes d'Allerey et d'Arconcey. La SAS Parc Eolien Nordex LXVI demande l'annulation de cet arrêté, en tant qu'il refuse la délivrance d'une telle autorisation à l'égard de l'éolienne E4 de son projet, ensemble celle de la décision de rejet implicitement née du silence conservé sur son recours gracieux notifié le 7 septembre 2018.

Sur les conclusions à fin d'annulation et de délivrance :

En ce qui concerne l'office du juge :

2. D'une part, aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, alors en vigueur : " I - A titre expérimental et pour une durée de trois ans, sont soumis aux dispositions du présent titre les projets d'installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation en environnementale : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : 1° Les autorisations délivrées (...) au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 (...) avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; 2° Les demandes d'autorisation au titre (...) de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " Les décisions prises sur le fondement de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 181-9 et les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ".

3. En application de ces dispositions, l'autorisation délivrée à la SAS Parc Eolien Nordex LXVI est soumise, lors de sa contestation, au chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017. Son recours relève ainsi d'un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécient au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

En ce qui concerne le moyen soulevé par la SAS Parc Eolien Nordex LXVI :

4. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ". Selon l'article L. 511-1 de ce code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, (...) soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, (...) soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ".

5. Pour refuser d'autoriser une des six éoliennes que comportait le projet de la SAS Parc Eolien Nordex LXVI, le préfet de la Côte-d'Or a estimé que l'éolienne E4 crée un rapport d'échelle disproportionné et un effet de surplomb et d'écrasement sur le hameau de Juilly. Si, comme le fait valoir la requérante, ce hameau ne présente pas d'intérêt patrimonial particulier, il s'inscrit toutefois dans un environnement rural préservé et est légèrement dominé à l'ouest par la Montagne d'Huilly, caractérisée par un paysage de bocage et des boisements peu denses. Il résulte de l'instruction que l'éolienne E4 devait, dans le dernier état du projet, atteindre une hauteur de 150 mètres et être implantée à flanc de la Montagne d'Huilly à une altitude de 515 mètres, à 646 mètres de l'entrée la plus proche du hameau et à 834 mètres de son centre. La différence d'altitudes entre le hameau et le site d'implantation de l'éolienne, combinée à la hauteur de celle-ci, outrepassant en majeure partie la végétation, la faisait apparaître en surplomb du hameau à plus de 250 mètres de hauteur. En outre, située dans l'axe de la rue principale traversant le hameau, cette éolienne devait ainsi être visible de son entrée est à son centre, ainsi qu'il ressort des photomontages PM1 et PM3 figurant dans le complément d'étude paysagère réalisé en février 2018. Eu égard aux dimensions de la majorité des constructions du hameau, à la faible distance qui l'en sépare, ainsi qu'à la hauteur modérée de la Montagne d'Huilly, ce surplomb entraînait un effet d'écrasement tant sur le hameau, que sur le paysage rural avoisinant. La plantation d'arbres à " des emplacements stratégiques ", telle que proposée par le pétitionnaire, ne masquant l'éolienne que selon des axes bien précis, cette mesure ne permet pas de limiter notablement sa visibilité depuis le hameau, ainsi que le corrobore le graphique " zone d'influence visuelle avec plantation d'arbres " reproduit par la requérante dans son mémoire en réplique, lequel, outre qu'il ne permet pas d'apprécier précisément l'impact des modifications apportées à l'éolienne E4 en incluant également l'impact des modifications apportées à l'éolienne E6, laisse en tout état de cause apparaître qu'au moins une éolienne est toujours visible en de nombreux points de la rue principale, à l'entrée est du hameau et aux abords immédiats de nombreuses constructions. Cette mesure ne saurait donc suffire à réduire à de justes proportions les effets de surplomb et d'écrasement précédemment constatés. Enfin, la SAS Parc Eolien Nordex LXVI ne saurait utilement se prévaloir de l'autorisation qui lui a finalement été accordée à l'égard de l'éolienne E6, laquelle était plus éloignée du hameau et hors de l'axe de sa rue principale. Dans ces circonstances, la SAS Parc Eolien Nordex LXVI n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Côte-d'Or a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en estimant que ces effets de surplomb et d'écrasement portaient atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement et faisaient obstacle à ce que l'éolienne E4 du projet soit autorisée.

6. Il résulte de ce qui précède que la SAS Parc Eolien Nordex LXVI n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 6 juillet 2018 portant autorisation unique d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, en ce qu'il refuse d'autoriser l'éolienne E4, et celle de la décision de rejet implicitement née du silence conservé sur son recours gracieux. Sa demande tendant à ce que cette autorisation lui soit délivrée doit également être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la SAS Parc Eolien Nordex LXVI.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Parc Eolien Nordex LXVI est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Parc Eolien Nordex LXVI et au ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme A... B..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 4 mars 2021.

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N° 19LY00022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00022
Date de la décision : 04/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Energie.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : Eversheds Sutherland

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-04;19ly00022 ?
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