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25/02/2021 | FRANCE | N°20LY00706

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 25 février 2021, 20LY00706


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de

sa demande et, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire ;

Par un jugement n° 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2019 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande et, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire ;

Par un jugement n° 1902548 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B... A....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2020, M. B... A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 décembre 2019 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire, le tout dans un délai de 15 jours et sous astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros qui sera versée à Me D... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est irrégulier car rendu en dehors des délais prescrits par l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français sont illégales pour violation de la loi, erreur manifeste d'appréciation au regard du 11° de l'article L. 313-11-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 mars 2020, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête. S'en remettant à ses écritures de première instance, il soutient que les moyens ne sont pas fondés, y compris le moyen nouveau en appel ;

M. B... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., né le 23 décembre 1978, de nationalité congolaise, expose être entré irrégulièrement en France le 3 mars 2014 et y séjourner depuis lors. Par un arrêté en date du 18 janvier 2019, le préfet de la Loire a rejeté la demande de titre de séjour qu'il avait présentée le 18 juin 2017 en qualité d'étranger malade et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. B... A... relève appel du jugement rendu le 3 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose à son article L. 313-11 que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) " ; à son article L. 511-4, que : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) " ; à son article R. 313-22 que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " et à son article R. 313-23 que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Le demandeur dispose d'un délai d'un mois à compter de l'enregistrement de sa demande en préfecture pour transmettre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration le certificat médical mentionné au premier alinéa. Lorsque la demande est fondée sur l'article L. 311-6, le certificat médical est transmis dans le délai mentionné à ce même article. (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate. "

3. En premier lieu, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a rendu l'avis concernant M. B... A... le 8 septembre 2018, soit près de quatorze mois après l'enregistrement de sa demande de titre de séjour. Cette circonstance ne permet toutefois pas d'établir que cet avis a été rendu dans un délai excédant les trois mois suivant la transmission du certificat médical prévu par les dispositions précitées de l'article R. 313-23 dès lors que M. B... A... ne précise pas à quelle date il a transmis ce certificat médical. En tout état de cause, ce dernier n'indique pas en quoi le non-respect de ce délai de trois mois a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision de refus de titre de séjour ou l'a privé d'une garantie. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du collège des médecins de l'OFII en raison de sa tardiveté doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il résulte des dispositions susmentionnées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays dont l'étranger est originaire et que si ce dernier y a effectivement accès. Toutefois, la partie qui justifie de l'avis d'un collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié et effectivement accessible dans le pays de renvoi.

5. Par son avis rendu le 8 septembre 2018, le collège des médecins de l'OFII a considéré que si l'état de santé de M. B... A... nécessite une prise en charge dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Pour contester le sens de cet avis, sur lequel s'est, notamment, fondé le préfet pour rejeter la demande de titre de séjour de M. B... A..., ce dernier a produit un unique certificat médical se bornant à constater que son état de santé " justifie la prise de médicaments quotidiennement en raison d'une pathologie chronique et cela pour une durée indéterminée ". Ce seul élément n'est pas de nature à établir qu'il n'aura pas effectivement accès aux soins requis par son état de santé dans son pays d'origine. Il en résulte que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 et L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par le préfet de la Loire doivent être écartés.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. A supposer même que M. B... A... réside depuis 2014 sur le territoire français, ce qui n'est pas établi, les quelques pièces versées au débat par l'intéressé ne permettent d'établir ni une intégration sociale, amicale ou professionnelle particulière, ni une vie familiale alors que, par ailleurs il a vécu l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine et qu'il ne conteste pas les indications du préfet de la Loire selon lesquelles il y est marié et père de trois enfants qui y sont restés. Dans ces circonstances, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les conclusions à fin d'annulation de M. B... A... devant être rejetées, il s'ensuit que doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ces dispositions faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 9 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. F... C..., présidente de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.

No 20LY007062


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00706
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Autorisation de séjour - Demande de titre de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : PRUDHON

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-25;20ly00706 ?
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