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11/02/2021 | FRANCE | N°20LY01801

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 11 février 2021, 20LY01801


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 30 juillet 2019 du préfet du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de renvoi en cas d'éloignement d'office.

Par un jugement n° 1906703 du 25 février 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2020, M. D..., représenté par Me A..., demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône, s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 30 juillet 2019 du préfet du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de renvoi en cas d'éloignement d'office.

Par un jugement n° 1906703 du 25 février 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2020, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 100 euros passé le délai d'un mois à compte de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les vices de procédure affectant le refus de titre de séjour pris sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'ont privé d'une garantie et ont exercé une influence sur la décision ;

- le préfet du Rhône a méconnu ces dispositions et celles du 7° de l'article L. 313-11 et du 11° de l'article L. 511-4 du même code, ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il a entaché le refus de titre de séjour d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa situation ne répondait pas à des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des refus de titre de séjour et de délai de départ volontaire supérieur à trente jours sur sa situation personnelle ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ volontaire et du pays de renvoi sont illégales en conséquence des illégalités successives.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

Par une décision du 2 septembre 2020, M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme B... ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant géorgien entré irrégulièrement en France le 18 novembre 2012, relève appel du jugement du 25 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 30 juillet 2019 du préfet du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de renvoi en cas d'éloignement d'office.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version issue du 3° de l'article 13 de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, en vigueur à compter du 1er janvier 2017 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 67 de la même loi : " (...) V. - L'article 5, le 3° de l'article 13, l'article 14, le 2° du I et le VIII de l'article 20 et le troisième alinéa du 6° du II de l'article 61 entrent en vigueur le 1er janvier 2017. VI.- la présente loi s'applique aux demandes pour lesquelles aucune décision n'est intervenue à sa date d'entrée en vigueur. Le 3° de l'article 13, l'article 14, le 2° du I de l'article 20 et le troisième alinéa du 6° du II de l'article 61 s'appliquent aux demandes présentées après son entrée en vigueur ".

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version immédiatement antérieure : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale (...). ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 2017 : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que M. D... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de son état de santé le 24 novembre 2016. Dès lors, l'instruction de sa demande impliquait de recueillir l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et non, comme l'a fait le préfet du Rhône, d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). La circonstance que le préfet du Rhône a ainsi suivi, à tort, la procédure applicable aux demandes présentées après le 1er janvier 2017 constitue un vice affectant le déroulement de la procédure de demande de titre de séjour.

5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.

6. La circonstance que l'avis médical sur la demande de M. D... a été émis par un collège de trois médecins de l'OFII régulièrement désignés par une décision du 8 juin 2018 du directeur général de l'établissement du 17 janvier 2017 portant désignation du collège de médecins à compétence nationale de l'OFII, sur le rapport d'un quatrième médecin du service médical de l'Office, plutôt que par le seul médecin de l'agence régionale de santé sur le rapport d'un médecin agréé ou praticien hospitalier, n'est pas de nature à l'avoir privé d'une garantie et n'a pas davantage exercé d'influence sur le sens de la décision prise par le préfet du Rhône.

7. Selon l'avis du collège des médecins de l'OFII du 13 décembre 2018, si l'état de santé de l'appelant nécessite une prise en charge médicale et si le défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.

8. M. D... souffre notamment des séquelles d'une hépatite C chronique active et présente de graves troubles de la personnalité en raison de sa dépendance aux opiacés pour laquelle lui est prescrit la seule buprénorphine. En se bornant à soutenir que cette substance active serait utilisée en association à la naloxone en Géorgie, qu'il ne pourrait bénéficier dans ce pays d'une prise en charge pluridisciplinaire de ses troubles psychiatriques et d'un accompagnement social et qu'il présente des signes évocateurs d'une apnée du sommeil, ce qu'il n'a pas, au demeurant, porté à la connaissance du préfet du Rhône en temps utile, il ne contredit pas sérieusement l'avis du collège des médecins de l'OFII. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du 10° de l'article L. 511-4 du même code, qui interdisent d'éloigner un étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé présente les caractéristiques énoncées par le 11° de l'article L. 313-11.

9. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'intéressé aurait présenté une demande de carte de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni des mentions de la décision de refus de titre de séjour contestée que le préfet se serait prononcé à ces titres. Par suite, il ne peut utilement invoquer ces dispositions.

10. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. (...) ".

11. M. D... n'établit pas ni même n'allègue avoir sollicité du préfet du Rhône l'octroi d'un délai supérieur à trente jours en cas d'obligation de quitter le territoire français. En tout état de cause, en se bornant à faire état de ce qu'il ne dispose pas assez de temps pour se rendre à des rendez-vous médicaux, il ne justifie pas de circonstances particulières nécessitant l'octroi d'un délai supérieur à trente jours. Par suite, la décision fixant le délai de départ volontaire n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

12. L'appelant invoque pour le surplus des moyens identiques à ceux développés en première instance, sans les assortir d'aucune critique utile ou pertinente des motifs du jugement. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption de ces motifs retenus à juste titre par le tribunal administratif de Lyon selon lesquels le préfet du Rhône n'a pas méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché le refus de titre de séjour d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ce refus sur sa situation personnelle.

13. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ et du pays de renvoi ne sont pas illégales en conséquence des illégalités successives alléguées.

14. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme B..., président rapporteur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

2

N° 20LY01801


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01801
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-11;20ly01801 ?
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