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11/02/2021 | FRANCE | N°20LY00006

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 11 février 2021, 20LY00006


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2019 par lequel la préfète du Puy-de-Dôme l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution forcée, et d'enjoindre à cette même autorité de réexaminer, sous astreinte, sa situation.

Par un jugement n° 1901547 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. >
Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2020, M. E..., repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2019 par lequel la préfète du Puy-de-Dôme l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution forcée, et d'enjoindre à cette même autorité de réexaminer, sous astreinte, sa situation.

Par un jugement n° 1901547 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2020, M. E..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 17 octobre 2019 et la décision du préfet du Puy-de-Dôme l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution ;

2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui sera versée à Me B... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile lui a été faite en français et non dans une langue dont on peut considérer raisonnablement qu'il la comprend ;

- la décision est fondée sur des faits inexacts qui démontrent en outre l'absence d'examen de sa situation individuelle ;

- elle méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle n'est pas motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2020, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... E..., de nationalité guinéenne, né le 8 avril 1979, qui a indiqué aux autorités administratives françaises être entré irrégulièrement en France le 10 juillet 2016, a présenté une demande d'asile le 17 mai 2018. Celle-ci n'a été admise ni par l'office français de protection des réfugiés et apatrides ni par la Cour nationale du droit d'asile qui se sont prononcés respectivement les 19 novembre et 5 juillet 2019. Par un arrêté du 12 juillet 2019, le préfet du Puy-de-Dôme l'a obligé à quitter le territoire français dans les trente jours à destination du pays dont il a la nationalité ou tout autre pays où il serait légalement admissible. M. E... relève appel du jugement rendu le 17 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, l'arrêté du 12 juillet 2019 comporte l'indication suffisamment précise des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il n'est pas stéréotypé. Il est ainsi suffisamment motivé au sens des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

3. En deuxième lieu, M. E... ne conteste pas les mentions qui figurent dans le compte rendu de l'entretien individuel le concernant qui s'est déroulé à la préfecture du Puy-de-Dôme le 18 juillet 2016 indiquant qu'il comprend le français. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure dès lors que la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile lui a été faite en français et non dans une langue dont on peut considérer raisonnablement qu'il la comprend, en méconnaissance de l'article L. 743-1, R. 213-6 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

4. En troisième lieu, il ressort de la décision litigieuse que le préfet du Puy-de-Dôme a procédé à un examen de la situation personnelle de M. E.... Si ce dernier soutient par ailleurs que cette décision est entachée d'erreurs de fait, il n'a précisé ni en première instance, ni en appel la nature de ces erreurs. Le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle révélé par des erreurs de fait ne peut dès lors qu'être écarté.

5. En quatrième lieu, lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ce droit implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger intéressé à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité de son séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité de son séjour ou la perspective de son éloignement. Une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir.

6. Si M. E... se prévaut d'une méconnaissance de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, il ressort des pièces du dossier qu'il a pu présenter toutes les observations qu'il a souhaité sur sa situation personnelle au cours des entretiens et auditions qui se sont déroulés dans le cadre de l'instruction et de l'examen de sa demande d'asile. Il ne fait état d'aucun élément supplémentaire sur sa situation qui aurait dû être porté à la connaissance des autorités administratives avant que le préfet du Puy-de-Dôme ne décide de l'obliger à quitter le territoire français. Le moyen doit dès lors être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

7. En premier lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 2, cette décision est suffisamment motivée.

8. En second lieu, M. E..., dont la situation a d'ailleurs, comme il a été dit, déjà été examinée par l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ne fait état d'aucun élément propre à sa situation personnelle en Guinée de nature établir qu'il y serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants tels que proscrits par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations et des dispositions l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit ainsi être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et sur les frais d'instance :

10. Les conclusions à fin d'annulation de M. E... devant être rejetées, doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ces dispositions faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme C... A..., présidente de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.

No 20LY000062


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00006
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DUHAYON

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-11;20ly00006 ?
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