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11/02/2021 | FRANCE | N°19LY01569

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 11 février 2021, 19LY01569


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la décision du 11 juillet 2016, notifiée le 17 août 2016, par laquelle le maire de Messery a modifié son affectation au sein de la commune de Messery, la décision du 20 septembre 2016 par laquelle le maire a mis fin à sa concession de logement et la délibération du 24 octobre 2016 par laquelle le conseil municipal de Messery a fixé son loyer à 750 euros mensuels, d'autre part, de condamner la commune de Messery à lui verse

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la décision du 11 juillet 2016, notifiée le 17 août 2016, par laquelle le maire de Messery a modifié son affectation au sein de la commune de Messery, la décision du 20 septembre 2016 par laquelle le maire a mis fin à sa concession de logement et la délibération du 24 octobre 2016 par laquelle le conseil municipal de Messery a fixé son loyer à 750 euros mensuels, d'autre part, de condamner la commune de Messery à lui verser la somme de 80 000 euros, outre intérêts au taux légal capitalisés, en réparation du préjudice ayant résulté du harcèlement moral dont il soutient avoir été victime et de l'illégalité des décisions et délibérations attaquées.

Par jugement n° 1606578 lu le 19 février 2019, le tribunal a condamné la commune de Messery à lui verser la somme de 3 000 euros tous intérêts compris, et a rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 avril 2019 et le 20 mai 2020, la commune de Messery représentée par Me C... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il la condamne à verser à M. B... une somme de 3 000 euros en indemnisation du harcèlement moral et de rejeter la demande présentée de ce chef devant le tribunal ;

2°) de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 2 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les pièces 46 à 49 ne lui ont pas été communiquées ;

- aucun des faits allégués par M D... B... ne peut être qualifié de harcèlement moral.

Par mémoire enregistré le 31 décembre 2019, M. D... B..., représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté le surplus de ses demandes, de porter la condamnation de la commune de Messery de 3 000 euros à 10 000 euros, d'annuler les décisions des 11 juillet et 20 septembre 2016 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Messery une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le harcèlement moral et l'illégalité des décisions en litige doivent donner lieu à une indemnité supérieure à 3 000 euros ;

- la décision du 11 juillet 2016 présente un caractère décisoire, son changement d'affectation lui fait grief, elle ne mentionnait pas les voies et délais de recours ; elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation de la commission administrative paritaire ; il s'agit d'une sanction déguisée ;

- la décision du 20 septembre 2016 est illégale ; elle est entachée d'exception d'illégalité de la délibération du 12 mai 2016 ; cette délibération est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 2124-65 du code général de la propriété des personnes publiques, elle est entachée d'un détournement de pouvoir qui prive ainsi la décision du 20 septembre de base légale ;

- ces illégalités fautives lui ont causé un préjudice moral évalué à 5 000 euros.

En application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que l'arrêt est susceptible d'être fondé sur l'irrecevabilité des conclusions reconventionnelles à fin d'annulation des décisions des 11 juillet et 20 septembre 2016 et d'indemnisation des conséquences des illégalités fautives dont ces décisions sont entachées, relevant d'un litige distinct de l'appel principal et présentées postérieurement à l'expiration du délai d'appel.

Par ordonnance du 27 mai 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me A..., substituant Me C..., pour la commune de Messery, ainsi que celles de Me E..., pour M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté par la commune de Messery en 2003 en qualité de gardien de police municipale. Par arrêté n° 54/2004 du 10 novembre 2004, un logement lui a été concédé par utilité de service à compter du 1er novembre 2004. La commune de Messery relève appel du jugement lu le 19 février 2019 la condamnant à verser la somme de 3 000 euros à M. B... en indemnisation du harcèlement moral que celui-ci affirme avoir subi. M. B... demande à la cour, de porter la somme mise à la charge de la commune de Messery à 10 000 euros au titre du harcèlement moral qu'il a subi, et il relève appel du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des décisions des 11 juillet et 20 septembre 2016 et les conclusions indemnitaires sur le fondement des illégalités fautives de ces décisions.

Sur l'appel de la commune de Messery et l'appel incident de M. B... :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties (...) Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. Si certaines pièces que M. B... a produites ont été enregistrées au greffe postérieurement à la clôture de l'instruction, le tribunal s'est abstenu de les opposer aux parties dans son jugement. Il suit de là qu'en admettant même que ces documents aient contenu des éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 précité, ils n'avaient pas à être communiqués à peine de méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure.

En ce qui concerne le fond du litige :

4. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ". Pour être qualifiés de harcèlement moral, les agissements répétés prévus par les dispositions précitées doivent excéder sur une longue durée les limites du cadre normal du pouvoir hiérarchique. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime de tels agissements de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement, tandis qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. Ainsi que le tribunal l'a relevé, il résulte de l'instruction que les propos diffusés à plusieurs reprises dans la presse municipale visaient, sans nommer M. B... mais de telle sorte qu'il puisse être identifié, à porter atteinte à sa probité et à le discréditer auprès de la population, alors que l'autorité judiciaire soit ne s'était pas prononcée sur les accusations portées contre lui, soit l'en avait disculpé. Ces agissements, qui ont excédé le cadre normal de l'exercice du pouvoir hiérarchique, ont nécessairement eu pour effet de dégrader les conditions de travail de M. B... dont l'autorité de policier a été ruinée par les insinuations publiques de son employeur. Par suite, la commune de Messery n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a engagé sa responsabilité sur le fondement des dispositions précitées de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983.

6. En revanche, en se bornant à réitérer en appel les griefs invoqués à l'appui de la démonstration du harcèlement qu'il dénonce, M. B... n'établit par aucun élément objectif que le tribunal aurait fait une insuffisante évaluation de son préjudice moral en l'indemnisant à hauteur de 3 000 euros. Il suit de là que l'appel de la commune de Messery et l'appel incident de M. B... doivent être rejetés.

Sur le surplus des conclusions de M. B... :

7. Les conclusions de M. B... tendant à l'annulation des décisions du 11 juillet 2016 et du 20 septembre 2016 et de la délibération du 24 octobre 2016, ainsi qu'à l'indemnisation des conséquences de ces décisions se rattachent à un litige distinct de l'appel principal. Présentées après le délai d'appel de deux mois décompté depuis le 1er mars 2019, date de notification du jugement, elles sont irrecevables et doivent, dès lors, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. M. B... n'étant pas la partie perdante, les conclusions de la commune de Messery tendant à mettre à sa charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. B... en application de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Messery est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. B... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Messery et à M. D... B....

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.

N° 19LY01569 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01569
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-01 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Affectation et mutation.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CARNOT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-11;19ly01569 ?
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