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11/02/2021 | FRANCE | N°19LY01525

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 11 février 2021, 19LY01525


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société TD-Thevenin et Ducrot Distribution, exerçant sous l'enseigne AVIA, a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a mise en demeure de supprimer, sous 15 jours, un dispositif d'affichage installé sur l'unité foncière où s'exerce son activité de station-service AVIA à Davezieux.

Par un jugement n° 1708096 du 15 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la courr>
Par une requête, enregistrée le 18 avril 2019, le ministre de la transition écologique et sol...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société TD-Thevenin et Ducrot Distribution, exerçant sous l'enseigne AVIA, a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a mise en demeure de supprimer, sous 15 jours, un dispositif d'affichage installé sur l'unité foncière où s'exerce son activité de station-service AVIA à Davezieux.

Par un jugement n° 1708096 du 15 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 18 avril 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour d'annuler le jugement susmentionné n° 1708096 du 15 janvier 2019 du tribunal administratif de Lyon et de rejeter la demande de la société TD-Thevenin et Ducrot Distribution.

Il soutient que :

- la requête est recevable dès lors qu'en l'absence de notification du jugement, les délais d'appel ne courent pas à l'encontre de l'Etat ;

- il n'est pas établi que les prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, prévoyant la signature de la minute du jugement par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, ont été respectées ;

- le jugement contesté est entaché d'une erreur de qualification juridique des faits et d'une erreur de droit dès lors que le dispositif litigieux, installé sur le terrain d'assiette de l'immeuble où s'exerce l'activité de station-service, est constitutif d'une enseigne au sens des dispositions du 2° de l'article L. 581-3 du code de l'environnement et du troisième alinéa de l'article R. 581-64 du code de l'environnement, et ne saurait être qualifié de pré-enseigne.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 juin 2019, la société TD-Thevenin et Ducrot Distribution représentées par Me C..., demande à la cour de confirmer le jugement n° 1708096 du 15 janvier 2019 du tribunal administratif de Lyon et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- il appartient à la cour d'apprécier la régularité de la notification du jugement effectuée par le tribunal administratif de Lyon et, le cas échéant, de déclarer la requête d'appel irrecevable en raison de sa tardiveté ;

- l'arrêté du 17 octobre 2017 est entaché d'incompétence dès lors qu'il n'est pas apporté la preuve d'une subdélégation de signature donnant au signataire de cet arrêté compétence pour le signer ;

- il est entachée d'une erreur dans la qualification juridique des faits dès lors qu'un totem n'est pas une enseigne au sens de l'article L. 581-3 du code de l'environnement ; en tout état de cause, la partie du dispositif relatif à l'affichage des prix des carburants constitue une obligation règlementaire à but informatif pour le consommateur et ne peut constituer, compte tenu de sa nature et de sa finalité, une enseigne au sens de l'article précité ;

- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que compte tenu de sa finalité, qui se situe hors du champ commercial et à sa non soumission au paiement de la taxe locale sur les publicités extérieures, le dispositif d'affichage du prix des carburants ne peut être qualifié de publicité, d'enseigne ou de pré-enseigne au sens du droit de l'environnement ; s'il avait un tel caractère, il devrait être déposé, ce qui aurait pour conséquence, l'impossibilité pour la station Avia de Davezieux de se conformer aux obligations de l'article 2 de l'arrêté du 8 juillet 1988 ; la réglementation relative aux publicités, enseignes et pré-enseignes n'est pas applicable aux dispositifs d'affichage du prix des carburants.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

- l'arrêté du 8 juillet 1988 relatif à la publicité des prix de vente des carburants ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... ;

- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La Société TD-Thevenin et Ducrot Distribution exploite une station-service sous l'enseigne " Avia ", implantée Route de Lyon, sur le territoire de la commune de Davezieux, dans le département de l'Ardèche. Par un arrêté du 17 octobre 2017, le préfet de l'Ardèche l'a mise en demeure de supprimer, sous quinze jours, le dispositif d'affichage installé sur l'unité foncière où elle exerce cette activité. Ce dispositif est constitué d'un totem d'une surface de 12 m² portant dans sa partie supérieure la marque commerciale des carburants distribués, Avia, et dans sa partie inférieure les prix de ces carburants. Par un jugement n° 1708096 du 15 janvier 2019, dont le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à la demande d'annulation de cet arrêté dont l'avait saisi la société TD-Thevenin et Ducrot Distribution.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Il ressort du dossier de première instance que, conformément à ces dispositions, la minute du jugement contesté a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article L. 581-3 du code de l'environnement, inséré dans le titre VIII " protection du cadre de vie " : " Au sens du présent chapitre : 1° Constitue une publicité, à l'exclusion des enseignes et des pré-enseignes, toute inscription, forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention, les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images étant assimilées à des publicités ; 2° Constitue une enseigne toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à une activité qui s'y exerce ; 3° Constitue une pré-enseigne toute inscription, forme ou image indiquant la proximité d'un immeuble où s'exerce une activité déterminée. ". Aux termes de l'article R. 581-64 du même code : " Les enseignes de plus de un mètre carré, scellées au sol ou installées directement sur le sol, ne peuvent être placées à moins de dix mètres d'une baie d'un immeuble situé sur un fonds voisin lorsqu'elles se trouvent en avant du plan du mur contenant cette baie. Ces enseignes ne doivent pas être implantées à une distance inférieure à la moitié de leur hauteur au-dessus du niveau du sol d'une limite séparative de propriété. Elles peuvent cependant être accolées dos à dos si elles signalent des activités s'exerçant sur deux fonds voisins et si elles sont de mêmes dimensions. Les enseignes de plus de 1 mètre carré scellées au sol ou installées directement sur le sol sont limitées en nombre à un dispositif placé le long de chacune des voies ouvertes à la circulation publique bordant l'immeuble où est exercée l'activité signalée. ".

5. En vertu de l'article L. 581-3 du code de l'environnement et du troisième alinéa de l'article R. 581-64 du même code, toute inscription, forme ou image installée sur un terrain ou un bâtiment où s'exerce l'activité signalée doit être qualifiée d'enseigne. Lorsqu'une telle inscription figure sur un dispositif scellé au sol ou installé sur le sol, la distance de ce dernier par rapport à l'entrée du local où s'exerce l'activité est sans incidence sur la qualification d'enseigne, dès lors que ce dispositif est situé sur le terrain même où s'exerce cette activité et concerne cette dernière. Par suite, des dispositifs signalant l'activité d'une société et implantés sur le terrain du local commercial où s'exerce cette activité doivent être qualifiés d'enseignes, alors même qu'ils ne sont pas installés à proximité immédiate de l'entrée de ce local mais en périphérie de ce terrain.

6. L'arrêté du 17 octobre 2017 du préfet de l'Ardèche est intervenu aux motifs que l'enseigne portant la marque Avia pour signaler l'activité de la société, qui développe une surface de 12 mètres m², est en infraction avec l'article R. 581-65 du code de l'environnement selon lequel " la surface unitaire maximale des enseignes mentionnées à l'article R. 581-64 est de 6 mètres carrés ". Il ressort des pièces du dossier que le dispositif décrit au point 1, qui a le caractère d'une inscription portée sur un panneau implanté en bordure immédiate de la plateforme (piste) où s'exerce l'activité signalée de vente de carburants, est relatif à cette dernière. Ainsi, le préfet de l'Ardèche n'a pas commis d'erreur de qualification juridique en considérant ce dispositif comme une enseigne au sens des dispositions précitées du code de l'environnement, dont la finalité est notamment la protection du cadre de vie, alors même que ce panneau permet également l'affichage, lisible depuis la voie publique, du prix des carburants, conformément aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 8 juillet 1988 susvisé. Le ministre est ainsi fondé à soutenir que le motif retenu par les premiers juges, qui ont considéré pour annuler son arrêté du 17 octobre 2017 que le dispositif en litige ne pouvait être qualifié d'enseigne, est erroné.

7. Toutefois il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Société TD-Thevenin et Ducrot Distribution devant le tribunal administratif de Lyon.

8. Aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 susvisé : " Le préfet de département peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire : 2° Pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département ; 3° Pour l'exercice des missions qui leur sont confiées dans les conditions fixées à l' article 7 du décret n° 2009-1484 du 3 décembre 2009 relatif aux directions départementales interministérielles, aux directeurs des directions départementales interministérielles dont l'action s'étend au-delà du département et présente, en tout ou partie, un caractère interdépartemental, pour la part de son activité qui s'exerce dans les limites du département ". Aux termes de l'article 44 du même décret : " " I. - Les chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département, ainsi que l'adjoint auprès du directeur départemental des finances publiques mentionné au 15° de l'article 43, peuvent donner délégation pour signer les actes relatifs aux affaires pour lesquelles ils ont eux-mêmes reçu délégation aux agents placés sous leur autorité. Le préfet de département peut, par arrêté, mettre fin à tout ou partie de cette délégation. Il peut également fixer, par arrêté, la liste des compétences qu'il souhaite exclure de la délégation que peuvent consentir les chefs de service et l'adjoint auprès du directeur départemental des finances publiques aux agents placés sous leur autorité. (...) ".

9. L'arrêté du 17 octobre 2017 a été signé pour le préfet par M. F... A..., chef de la délégation territoriale Nord Ardèche de la direction départementale des territoires de l'Ardèche. Par un arrêté du 4 septembre 2017, notamment son article 3, le préfet de l'Ardèche a délégué sa signature à M. B... D..., directeur départemental des territoires, à l'effet de signer tous actes et décisions précitées dans l'annexe n° 1 jointe à cet arrêté, laquelle mentionne au code E 501 les arrêtés de mise en demeure ordonnant soit la suppression, soit la mise en conformité des publicités, enseigne ou pré-enseignes ainsi que le échant, la remise en état des lieux, en visant l'article L. 581-27 du code de l'environnement. Toutefois, il n'apparait pas que M. D... ait subdélégué sa signature à M. A... pour ces arrêtés. Si le préfet de l'Ardèche se prévalait devant les premiers juges de l'article 5 de l'arrêté du 4 septembre 2017, celui-ci concerne la délégation accordée en vertu de l'article 4 du même arrêté, qui est relative aux actes relevant de la compétence du pouvoir adjudicateur pour les marchés publics de l'Etat et tous les actes relatifs à l'ordonnancement et à l'exécution des recettes et dépenses de l'Etat imputés sur certains programmes. Si le préfet se prévalait également de l'article 1er de l'arrêté préfectoral du 12 septembre 2017 portant subdélégation de signature, celui-ci concerne l'application de l'article 5 de l'arrêté du 4 septembre 2017 précité et donc la délégation de signature accordée par l'article 4 de ce dernier arrêté. La ministre de la transition écologique a d'ailleurs, suite à une mesure d'instruction tendant à la production de l'acte autorisant M. A... à signer l'arrêté contesté du 17 octobre 2017, produit en appel les seuls arrêtés préfectoraux précités des 4 et 12 septembre 2017. La société TD-Thevenin et Ducrot Distribution est ainsi fondée à soutenir que l'arrêté en litige, qui n'a pas été signé par une autorité compétente, est illégal pour ce motif.

10. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 17 octobre 2017 du préfet de l'Ardèche, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en appel par la société TD-Thevenin et Ducrot Distribution.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat au profit de la société TD-Thevenin et Ducrot Distribution la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de la transition écologique et solidaire est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la Société TD-Thevenin et Ducrot Distribution au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et à la Société TD-Thevenin et Ducrot Distribution. Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

2

N° 19LY01525


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01525
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

02-01-01 Affichage et publicité. Affichage. Pouvoirs des autorités compétentes.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : QUADRATUR

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-11;19ly01525 ?
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