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09/02/2021 | FRANCE | N°20LY01660

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 09 février 2021, 20LY01660


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 mai 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois.

Par un jugement n° 2003273 du 25 mai 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.>
Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 23 juin 2020, M. C..., représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 mai 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois.

Par un jugement n° 2003273 du 25 mai 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 23 juin 2020, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 mai 2020 ainsi que les décisions du préfet du Rhône du 19 mai 2020 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 Juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en fondant sa décision lui faisant obligation de quitter le territoire sur les dispositions de l'article L. 511-1 I 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , le préfet du Rhône a commis une erreur d'appréciation; il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ; il bénéficie de la présomption d'innocence jusqu'à l'intervention du jugement du tribunal correctionnel de Lyon devant statuer sur les faits pour lesquels il a fait l'objet de poursuite et d'une garde à vue le 18 mai 2020 ;

- pour les mêmes motifs, c'est à tort que le préfet ne lui a pas accordé un délai de départ volontaire ;

- faisant l'objet d'une interdiction de retour pour une durée de dix-huit mois, il ne peut plus circuler dans l'espace Schengen pour cette durée, notamment préparer sa défense en sa qualité de prévenu devant être jugé par le tribunal correctionnel de Lyon et rendre visite à son frère lequel réside en Italie ; cette décision est disproportionnée et méconnait les articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet du Rhône, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 2 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F..., première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C... relève appel du jugement du 25 mai 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mai 2020 par lequel le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois.

Sur la légalité de l'arrêté du 19 mai 2020 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 7° Si le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée.(...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., ressortissant albanais né le 23 mars 1990, est entré en France en mars 2020. Il a été interpellé à Caluire-et-Cuire puis placé en garde à vue le 18 mai 2020 pour des faits de tentative de vol avec effraction en réunion après avoir été surpris par le propriétaire d'une maison en pleine tentative d'effraction et faisait l'objet d'une convocation devant le tribunal correctionnel de Lyon pour une audience prévue le 3 décembre 2020 pour ces faits. Dans ces conditions, nonobstant l'absence de condamnations antérieures à son casier judiciaire en France et compte tenu du délai rapproché entre son interpellation et la date de son entrée en France, le préfet du Rhône a pu, sans entacher sa décision d'erreur d'appréciation, décider son éloignement sur le fondement des dispositions précitées au point 2.

4. En deuxième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut (...) décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 ;(...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré en France muni d'un passeport en cours de validité depuis moins de trois mois et ne dispose ni d'un hébergement stable, ni de moyens d'existence suffisants au sens des dispositions susvisées. Au surplus, son comportement représente une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, le préfet du Rhône a pu, en se basant sur l'ensemble de ces motifs et sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, décider de ne pas lui octroyer de délai de départ volontaire.

6. En troisième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, (...) alinéa du présent III [est] décidée par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

7. M. C... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français qui n'était assortie d'aucun délai de départ volontaire et entrait ainsi dans le champ des dispositions précitées où le préfet assortit la mesure d'éloignement d'une interdiction de retour sur le territoire français sauf circonstances humanitaires s'y opposant. Pour contester cette décision, le requérant se prévaut de la portée de l'interdiction d'accès à l'espace Schengen qui l'empêcherait de rendre visite à son frère résidant en Italie. Alors que la durée d'interdiction de retour est limitée à dix-huit mois, M. C... n'est pas fondé à soutenir que cette décision violerait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. M. C... se prévaut en dernier lieu de la violation de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la décision lui interdisant le retour sur le territoire l'empêcherait d'assurer personnellement sa défense devant le tribunal correctionnel de Lyon, devant lequel il a été convoqué le 3 décembre 2020. Alors même que la mesure de police en litige fera effectivement obstacle à la délivrance d'un visa temporaire qu'il pourrait obtenir pour pouvoir se rendre à la convocation des autorités judiciaires, le requérant dispose toutefois de la possibilité de se faire représenter par son conseil pour l'ensemble de cette procédure. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois a méconnu les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions présentées par M. C... sur le fondement des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., présidente ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme G... F..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2021.

2

N° 20LY01660


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01660
Date de la décision : 09/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : GREPINET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-09;20ly01660 ?
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