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04/02/2021 | FRANCE | N°19LY00855

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 04 février 2021, 19LY00855


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

MM. Lipa et Serge Goldstein, architectes, ont demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- de condamner la commune de Vienne à leur payer, au titre des intérêts moratoires échus sur leur note d'honoraires n° 13 :

. à titre principal, la somme de 14 558,39 euros outre intérêts complémentaires à parfaire à hauteur de 4 367,51 euros ;

. à titre subsidiaire, celle de 4 910,06 euros outre intérêts complémentaires à parfaire à hauteur de 950,40 euros ;

- de condamner la co

mmune de Vienne à leur payer au titre de la note d'honoraires n° 14 :

. à titre principal, la somme HT ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

MM. Lipa et Serge Goldstein, architectes, ont demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- de condamner la commune de Vienne à leur payer, au titre des intérêts moratoires échus sur leur note d'honoraires n° 13 :

. à titre principal, la somme de 14 558,39 euros outre intérêts complémentaires à parfaire à hauteur de 4 367,51 euros ;

. à titre subsidiaire, celle de 4 910,06 euros outre intérêts complémentaires à parfaire à hauteur de 950,40 euros ;

- de condamner la commune de Vienne à leur payer au titre de la note d'honoraires n° 14 :

. à titre principal, la somme HT de 31 320,35 euros, outre TVA et intérêts moratoires ;

. à titre subsidiaire, la somme HT de 9 000 euros, outre TVA et intérêts moratoires ;

- de condamner la commune de Vienne à leur payer la somme HT de 148 028,05 euros au titre de la prolongation du marché de maîtrise d'oeuvre ;

- d'ordonner la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1606383 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la commune de Vienne à payer à MM. Lipa et Serge Goldstein :

- la somme de 4 910,06 euros outre intérêts au taux de 4,71 % à compter du 19 septembre 2014 et capitalisation des intérêts échus à la date du 19 septembre 2015 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

- la somme de 37 327,59 euros outre intérêts au taux de 2,04 % à compter du 10 juillet 2013 et capitalisation des intérêts échus à la date du 10 juillet 2014 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

- la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2019, et un mémoire enregistré le 17 avril 2020, la commune de Vienne, représentée par Me Petit, avocat, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement susmentionné n° 1606383 du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement susmentionné n° 1606383 du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Grenoble seulement en tant qu'il l'a condamné à verser à la MM. Lipa et Serge Goldstein les sommes de :

- 37 327,59 euros outre intérêts au taux de 2,04 % à compter du 10 juillet 2013 ainsi que leur capitalisation, au titre de la note d'honoraires n° 14 ;

- 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de rejeter la demande de MM. Lipa et Serge Goldstein ;

4°) de mettre à leur charge la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, c'est à tort que le tribunal a écarté sa fin de non-recevoir tirée du non-respect des stipulations de l'article 40.1 du CCAG-PI dès lors que la lettre du 27 mars 2014 ne saurait être qualifiée de mémoire en réclamation ;

- à titre subsidiaire, la note d'honoraires n° 14 au titre de la mission AOR ne devait pas être payée dès lors qu'à la date du 23 mai 2013, le délai de la garantie de parfait achèvement n'était pas expiré et les réserves de certains lots non encore levées par une décision expresse du maître de l'ouvrage, que les réserves n'ont pu être levées par l'effet d'une réfaction des prix des lots sur le fondement de l'article 41.7 du CCAG-Travaux qui n'a pas été acceptée par les titulaires des lots.

- les réserves du lot 3 n'ont pas été levées et elle a fait un retour sur les propositions de décomptes établies par la maîtrise d'oeuvre sur ce lot et les lots 6 et 8 ;

- elle était d'autant plus justifiée à ne pas payer la note d'honoraires n° 14 correspondant au solde de son marché au groupement de maîtrise d'oeuvre que cela l'aurait empêché d'engager sa responsabilité contractuelle en raison des désordres qui affectent le bâtiment ;

- elle sollicite bien l'annulation du jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement des intérêts moratoires puisqu'elle demande à titre principal l'annulation de la totalité de ce jugement ;

- elle ne pourra qu'obtenir le remboursement de la somme de 2 000 euros à laquelle elle a été condamnée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors que l'annulation du jugement contesté aura pour conséquence d'inverser la détermination de la partie perdante à l'instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2020, MM. Lipa et Serge Goldstein, représentée par la SELARL Deniau Avocats Grenoble, concluent, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident, à la condamnation de la commune de Vienne à leur payer la somme de 9 000 euros HT outre TVA et intérêts au taux de 2,04 % à compter du 10 juillet 2013 et leur capitalisation et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Vienne la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- si la requérante sollicite l'annulation de l'ensemble du jugement, elle n'entend pas demander l'annulation de la condamnation au titre des intérêts moratoires relatifs au paiement de la note d'honoraires n°13;

- leur courrier du 27 mars 2014 constitue bien un mémoire en réclamation ;

- comme l'a retenu le tribunal, la commune de Vienne pouvait évaluer le montant de sa créance à l'encontre du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

- ils ont parfaitement réalisé leur mission AOR lot par lot, en mettant tout en oeuvre pour la levée des réserves, alors qu'ils ne sont tenus qu'à une obligation de moyens et que le maître de l'ouvrage a été défaillant dans l'exécution de ses obligations, en ne retournant pas les procès-verbaux de levée des réserves, les formulaires EXE 8 signés, notamment pour les lots 3, 6, 8, 9, et en ne notifiant pas aux entreprises les décomptes généraux ;

- ils ont proposé des réfactions aux quatre entreprises qui n'ont pas levé les réserves en application de l'article 41.7 du CCAG ;

- le procès-verbal de levée des réserves a été signé par la commune le 25 septembre 2012 pour les lots 1 et 2 et le 19 avril 2012 pour les lots 10 et 15 et elle a accepté la levée des réserves du lot 11 en proposant de faire signer ce formulaire directement dans ses locaux et la réserve du lot 14 a été levée comme en témoigne le tableau de suivi des réserves établi par la commune ;

- la commune de Vienne ne conteste pas la levée des réserves des lots 4, 5, 7, 12 malgré l'absence de signature d'un procès-verbal de levée des réserves ;

- si la cour considérait que la mission AOR n'a pas été réalisée, elle ne pourra que constater que l'achèvement de la mission complémentaire relative au choix du mobilier et de la signalétique du bâtiment, confiée par avenant n° 4 du 25 juillet 2011 pour un montant de 9 000 euros HT et intégrée dans la note d'honoraires n° 14, n'est pas contesté par la requérante ;

- la condamnation au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de la commune de Vienne était justifiée dès lors qu'elle a été condamnée non seulement à payer la note d'honoraires n° 14 mais également les intérêts moratoires et complémentaires afférents à la note d'honoraires n° 13, condamnations non contestée en cause d'appel.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;

- l'arrêté du 21 décembre 1993 précisant les modalités techniques d'exécution des éléments de mission de maîtrise d'oeuvre confiés par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... ;

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

- les observations de Me B..., pour la commune de Vienne, et de Me A..., pour MM. Goldstein ;

Considérant ce qui suit :

1. Pour la construction d'un pôle culturel composé d'une médiathèque, d'une école de musique et d'une école de danse, la commune de Vienne a, par acte d'engagement du 15 mars 2007, confié une mission complète de maîtrise d'oeuvre à un groupement solidaire composé notamment de MM. Lipa et Serge Goldstein, architectes, mandataires. Les travaux ont fait l'objet de 15 lots. Après le dernier avenant conclu le 20 juillet 2011, portant sur la mission relative à la signalétique complète du bâtiment, le prix total du marché de maîtrise d'oeuvre a été porté à la somme HT de 1 067 626,17 euros, soit 1 276 880,90 euros TTC. Par courrier du 2 février 2012, MM. Goldstein ont vainement demandé à la commune de Vienne la conclusion d'un 5ème avenant pour tenir compte des délais d'exécution du chantier, passés de 18 à 27 mois et augmenter le prix du marché de 148 028,05 euros HT. La note d'honoraires n° 13 datée du 24 avril 2012, d'un montant TTC de 96 967,41 euros a été adressée à la commune de Vienne par courrier du 17 septembre 2012. Après plusieurs rappels, intervenus pour le premier le 5 mars 2013 et pour le dernier le 14 mars 2014, ils ont été réglés le 18 septembre 2014. La note d'honoraires n° 14 datée du 23 mai 2013, d'un montant TTC de 37 327,59 euros, est restée impayée malgré plusieurs rappels intervenus les 12 septembre, 13 décembre 2013 et 14 mars 2014. Le 29 juillet 2015, MM. Goldstein ont saisi le comité consultatif interrégional de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics de Lyon, qui a rendu son avis le 27 mai 2016. Par un jugement n° 1606383 du 31 décembre 2018, dont la commune de Vienne relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la commune de Vienne à payer à MM. Goldstein la somme de 4 910,06 euros outre intérêts au taux de 4,71 % à compter du 19 septembre 2014 et leur capitalisation annuelle à compter du 19 septembre 2015, la somme de 37 327,59 euros outre intérêts au taux de 2,04 % à compter du 10 juillet 2013 et leur capitalisation annuelle à compter du 10 juillet 2014 et la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur l'étendue du litige :

2. Si la commune de Vienne sollicite l'annulation de l'ensemble du jugement susmentionné n° 1606383 du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Grenoble, il ressort de ses propres écritures que son appel ne porte en réalité que sur le paiement de la note d'honoraires n° 14 de MM. Goldstein. D'ailleurs, si elle soutient qu'elle sollicite l'annulation du jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement des intérêts moratoires, elle ne soulève aucun moyen quant aux modalités de calcul des intérêts retenues par les premiers juges.

Sur le bien-fondé du jugement :

- Concernant, à titre principal, le bien-fondé du jugement en tant qu'il a écarté la fin de non-recevoir tirée du non-respect des stipulations de l'article 40.1 du CCAG-PI :

3. Aux termes de l'article 40.1 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de prestations intellectuelles (CCAG-PI), approuvé par le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978, auquel le CCAP du marché se référait : " Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'un mémoire de réclamation qui doit être remis à la personne responsable du marché. / La personne publique dispose d'un délai de deux mois compté à partir de la réception du mémoire de réclamation pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation ".

4. Un mémoire du titulaire d'un marché ne peut être regardé comme une réclamation au sens de l'article 40.1 du CCAG-PI que s'il comporte l'énoncé d'un différend et expose de façon précise et détaillée les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées.

5. En l'espèce, par le courrier du 27 mars 2014, MM. Lipa et Serge Goldstein, qui contestent les termes de celui du 19 mars 2014 du maire de la commune de Vienne pour qui le paiement du solde du marché est prématuré, demandent le paiement de leurs notes d'honoraires 13 et 14. Ils joignent le décompte général définitif de leurs honoraires, un tableau répartissant les honoraires dus par cotraitant et par note d'honoraires, et un récapitulatif des sommes dues par co-traitants. Ils indiquent que les missions " mobilier et signalétique " sont achevées, facturées mais demeurent impayées depuis 26 mois, et que la mission AOR, achevée et facturée demeure impayée depuis mai 2013. En exprimant pour toutes ces raisons leur incompréhension quant à la raison réelle de la rétention d'une part importante de leurs honoraires, ils ont par ce courrier du 27 mars 2014 adressé au maître d'ouvrage une réclamation que les premiers juges ont pu à juste titre qualifier de telle.

- Concernant, à titre subsidiaire, le bien-fondé de l'article 2 du jugement, portant condamnation au titre de la note d'honoraires n°14 :

6. Aux termes de l'article 7 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée : " La mission de maîtrise d'oeuvre que le maître de l'ouvrage peut confier à une personne de droit privé ou à un groupement de personnes de droit privé doit permettre d'apporter une réponse architecturale, technique et économique au programme mentionné à l'article 2. Pour la réalisation d'un ouvrage, la mission de maîtrise d'oeuvre est distincte de celle d'entrepreneur. Le maître de l'ouvrage peut confier au maître d'oeuvre tout ou partie des éléments de conception et d'assistance suivants : (...) 8° L'assistance portée au maître de l'ouvrage lors de opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement (...) ". Aux termes de l'article 11 du décret du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé : " L'assistance portée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement a pour objet : a) d'organiser les opérations préalables à la réception des travaux ; b) d'assurer le suivi des réserves formulées lors de la réception des travaux jusqu'à leur levée ; c) de procéder à l'examen des désordres signalés par le maître de l'ouvrage (...) ". Aux termes du point 8 de l'annexe I de l'arrêté du 21 décembre 1993 susvisé : " L'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception ainsi que pendant la période de garantie de parfait achèvement a pour objet : d'organiser les opérations préalables à la réception des travaux ; d'assurer le suivi des réserves formulées lors de la réception des travaux jusqu' à leur levée ; de procéder à l'examen des désordres signalés par le maître de l'ouvrage ; de constituer le dossier des ouvrages exécutés nécessaires à l'exploitation de l'ouvrage, à partir des plans conformes à l'exécution remis par l'entrepreneur, des plans de récolement ainsi que des notices de fonctionnement et des prescriptions de maintenance des fournisseurs d'éléments d'équipement mis en oeuvre .".

7. Aux termes de l'article 6.2.5 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché public de maîtrise d'oeuvre concernant la construction d'un pôle culturel, médiathèque et école de musique relatif à l'exécution des prestations de contrôle d'exécution (DET, OPC et AOR), inclus dans l'article 6.2 relatif aux acomptes : " c) Elément AOR (Assistance lors des opérations de réception et pendant la garantie de parfait achèvement). Les prestations incluses dans l'élément AOR sont réglées comme suit : 1. A l'issue des opérations préalablement à la réception : à la date d'accusé de réception par le maître d'ouvrage du procès-verbal des opérations préalables à la réception : 20,00 % ; 2. A la remise du dossier des ouvrages exécutés : 40,00 % ; 3. A l'achèvement des levées de réserves: 20,00 % ; 4. A la fin du délai de garantie de parfait achèvement des ouvrages prévu à l'article 44.1 du CCAG applicable aux marchés de travaux ou à l'issue de sa prolongation décidée par le maître d'ouvrage en application du 44.2 dudit CCAG : 20 % ". Aux termes de l'article 6.3 du même cahier : " Après constatation de l'achèvement de sa mission dans les conditions prévues à l'article 26, le maître d'oeuvre adresse au maître de l'ouvrage une demande de paiement du solde sous forme d'un projet de décompte final. ". Aux termes de l'article 26 du même cahier relatif à l'achèvement de la mission : " La mission du maître d'oeuvres s'achève à la fin du délai de " Garantie de parfait achèvement" (prévue à l'article 44.1.2° alinéa du CCAG applicable aux marchés de travaux) ou après prolongation de ce délai si les réserves signalées lors de la réception ne sont pas toutes levées à la fin de cette période. Dans cette hypothèse, l'achèvement de la mission intervient lors de la levée de la dernière réserve. L'achèvement de la mission fera l'objet d'une décision établie sur demande du maître d'oeuvre, par le maître de l'ouvrage, dans les conditions de l'article 33 du C.CA.G.-PI. et constatant que le titulaire a rempli toutes ses obligations. ".

8. Il ressort de l'article 44.1 du CCAG travaux alors applicable, auquel il n'est pas allégué que les contrats des marchés de travaux de l'opération en cause dérogeraient, que le délai de garantie de parfait achèvement était d'un an à compter de la date d'effet de la réception. Si, à l'expiration de ce délai, l'entrepreneur n'a pas procédé à l'exécution des travaux exigibles dans ce cadre, ce délai peut être prolongé par décision de la personne responsable du marché jusqu'à l'exécution complète desdits travaux.

9. Il résulte de l'instruction que le maître d'ouvrage n'a pas pris la décision relative à l'achèvement de la mission de maîtrise d'oeuvre prévue par les stipulations précitées de l'article 26 du CCAP. La commune de Vienne soutient sans être contredite que les lots 3, 4, 5, 7, 8, 9 et 12 ont été réceptionnés le 8 juin 2012 et qu'ainsi, le délai de garantie de parfait achèvement expirait le 8 juin 2013. Elle soutient également qu'à la date du 23 mai 2013, les réserves de certains lots n'étaient pas levées. A cet égard, MM. Goldstein ne contestent pas que quatre entreprises n'ont pas levé les réserves mais indiquent qu'ils ont proposé des réfactions sur les marchés en application de l'article 41.7 du CCAG marchés publics de travaux. S'il ressort effectivement d'un courriel d'un agent du service " commande publique " de la commune de Vienne, en date du 23 janvier 2015, soit antérieur à la requête introduite devant les premiers juges, que concernant les lots 3, 6 et 8, non encore soldés, qu'une telle réfaction a été proposée par la maîtrise d'oeuvre et que la commune a demandé à cette dernière de mentionner sur les procès-verbaux de levée des réserves, celles non levées correspondant à cette réfaction, il ne résulte toutefois pas de l'instruction que pour l'ensemble des lots pour lesquels les réserves demeuraient, et notamment les trois lots précités, le maître de l'ouvrage ait renoncé à ordonner la réfection des ouvrages estimés défectueux et proposé aux titulaires une réfaction sur les prix que ces derniers auraient acceptée et qu'il aurait ainsi décidé de prononcer la réception sans réserve, comme le permettent les stipulations de l'article 41.7 du CCAG-Travaux.

10. Ainsi, en l'absence de levée des réserves pour certains lots, émises lors de la réception des travaux le délai de garantie de parfait achèvement des ouvrages n'étant pas expiré, la mission du groupement de maîtrise d'oeuvre ne pouvait être regardée comme achevée. MM. Goldstein ne pouvaient dès lors prétendre au paiement du solde de leur mission AOR. C'est donc à tort que les premiers juges ont, à l'article 2 du jugement contesté, condamné la commune de Vienne au paiement de l'intégralité de ce solde.

11. Toutefois, MM. Goldstein font valoir, sans être contredits, que la mission complémentaire relative au choix du mobilier et de la signalétique du bâtiment, qui leur a été confiée par avenant n° 4 du 25 juillet 2011 pour un montant de 9 000 euros HT, soit 10 764 euros TTC, et qui est intégrée dans la note d'honoraires n° 14, n'a pas été contestée par la commune de Vienne. Il y a donc lieu seulement pour la cour de reformer l'article 2 du jugement attaqué en tant qu'il a condamné la commune de Vienne au paiement de la totalité du solde de 37 327,59 euros TTC du marché de maîtrise d'oeuvre et de réduire par suite le montant de la condamnation prononcée à la somme de 10 764 euros TTC.

- Concernant le bien-fondé du jugement en tant qu'il a condamné la commune de Vienne à verser à MM. Goldstein la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. En considérant que la commune de Vienne, notamment condamnée dans l'article 1er du jugement à verser les intérêts échus et capitalisés au titre de certaines sommes dues aux demandeurs et qui était à bon droit constituée débitrice d'au moins une partie du solde de la note d'honoraires 14, était la partie perdante pour l'application de l'article L761-1 du code de justice administrative, les premiers juges n'ont pas méconnu ces dispositions.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vienne est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Grenoble a mis à sa charge dans son article 2 le paiement à MM. Lipa et Serge Goldstein d'une somme d'un montant excédant celui de 10 764 euros TTC.

Sur les frais liés au litige d'appel :

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par la commune de Vienne. Les conclusions présentées à ce titre par MM. Goldstein, partie perdante, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le montant de la condamnation prononcée par l'article 2 du jugement n° 1606383 du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Grenoble est ramené à la somme de 10 764 euros TTC.

Article 2 : Le jugement est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Vienne et à MM. Lipa et Serge Goldstein.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2021.

2

N° 19LY00855


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00855
Date de la décision : 04/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CABINET PHILIPPE PETIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-04;19ly00855 ?
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