Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 8 juin 2017 par laquelle le préfet de l'Isère lui a ordonné de se dessaisir de son arme de catégorie C, dans le délai de trente jours.
Par un jugement n° 1703698 du 1er octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 5 novembre 2019, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 1er octobre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 8 juin 2017 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision en litige n'est pas motivée en ce que le préfet n'explique pas en quoi son acquisition d'une arme est de nature à troubler l'ordre public ou à la sécurité des personnes ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le sous-préfet était en situation de compétence liée ;
- la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire se fait dans le cadre de l'article L. 234-2 du code de la sécurité intérieure et ne peut être effectuée que par des agents individuellement désignés et spécialement habilités de la police et de la gendarmerie nationales ; le préfet n'établit pas que tel a été le cas ;
- la décision méconnaît l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure ; le préfet n'établit pas que sa détention d'une arme porte atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... ;
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D... a acquis une arme de catégorie C et en a fait la déclaration à la préfecture de l'Isère. Les vérifications réalisées suite à cette déclaration ont révélé l'inscription d'une condamnation pénale au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé. Par un courrier du 22 mai 2017, M. D... a été informé de l'intention du préfet de mettre en oeuvre la procédure de dessaisissement prévue à l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure. L'intéressé n'ayant fait connaître aucune observation dans le délai de quinze jours qui lui était imparti, le préfet de l'Isère lui a ordonné, par décision du 8 juin 2017, de se dessaisir de son arme dans un délai de trente jours. Par un jugement du 1er octobre 2019, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision préfectorale.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 1, que M. D... a été informé, antérieurement à l'intervention de la décision contestée, de l'intention du préfet de l'Isère de mettre en oeuvre la procédure de dessaisissement prévue à l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure. Le courrier du 22 mai 2017, dont il a accusé réception, précise que cette décision se fonde sur la circonstance que le bulletin n° 2 de son casier judiciaire porte la mention de la condamnation dont il a fait l'objet le 10 mai 2015 par le tribunal correctionnel de Paris pour des faits de violence avec usage ou menace d'une arme. Dans ces circonstances, la motivation de la décision contestée du 8 juin 2017 est suffisante au regard des prescriptions de l'article L. 211-2 précitées.
4. En deuxième lieu, M. D... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 234-2 du code de la sécurité intérieure qui s'appliquent à la consultation des traitements automatisés de données personnelles aux fins d'enquête administrative dès lors que la décision en litige se fonde, non sur les mentions figurant sur le traitement des antécédents judiciaires mais sur l'une des mentions portée sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé que le préfet pouvait se faire communiquer ainsi que prévu par le 9° de l'article R. 79 du code de procédure pénale.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure : " Sont interdites d'acquisition et de détention d'armes des catégories B et C et d'armes de catégorie D soumises à enregistrement : / 1° Les personnes dont le bulletin n° 2 du casier judiciaire comporte une mention de condamnation pour l'une des infractions suivantes : (...) -violences volontaires prévues aux articles 222-7 et suivants dudit code (...) ". En vertu de l'article R. 312-67 de ce code, lorsque le déclarant a été condamné pour l'une des infractions mentionnées au 1° de l'article L. 312-2, le préfet ordonne soit la remise de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues par l'article L. 312-7, soit leur dessaisissement dans les conditions prévues par l'article L. 312-11.
6. Aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme des catégories B, C et D de s'en dessaisir. / Le dessaisissement consiste soit à vendre l'arme à une personne qui fabrique ou fait commerce des armes, mentionnée à l'article L. 2332-1 du code de la défense, ou à un tiers remplissant les conditions légales d'acquisition et de détention, soit à la neutraliser, soit à la remettre à l'Etat. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités du dessaisissement. / Sauf urgence, la procédure est contradictoire. Le représentant de l'Etat dans le département fixe le délai au terme duquel le détenteur doit s'être dessaisi de son arme. ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a été condamné à une peine d'emprisonnement de six mois pour des faits commis le 10 mai 2015 constitutifs de violence avec usage ou menace d'une arme sans incapacité. La mention de cette condamnation, visée à l'article 222-13 du code de procédure pénale, a été portée au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé. En application de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure, ce dernier ne pouvait donc ni acquérir, ni détenir une arme de catégorie C. Il en résulte qu'en application des dispositions précitées du 2° de l'article R. 312-67 précitées, le préfet de l'Isère pouvait légalement lui ordonner de se dessaisir de son arme sur le fondement de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure.
8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée y compris ses conclusions présentées au titre des frais du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2021.
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N° 19LY04031