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04/12/2020 | FRANCE | N°19LY04181

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 04 décembre 2020, 19LY04181


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du préfet de l'Yonne du 24 juin 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter la France dans un délai de trente jours et fixant le Maroc comme pays de destination.

Par un jugement n° 1902108 du 26 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2019, M. B..., représenté par Me E..., de

mande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 26 août 2019 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du préfet de l'Yonne du 24 juin 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter la France dans un délai de trente jours et fixant le Maroc comme pays de destination.

Par un jugement n° 1902108 du 26 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2019, M. B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 26 août 2019 et les décisions contenues dans l'arrêté du 24 juin 2019 du préfet de l'Yonne ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, ou subsidiairement de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros qui sera versée à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît le droit d'être entendu de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles L. 313-11 4° et 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet de l'Yonne n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur l'appréciation des conséquences de l'éloignement sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en tant que membre de la famille d'un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne au sens des dispositions du 5° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il entre dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision lui accordant un délai de départ de trente jours :

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- en cas de retour dans son pays, il sera séparé de sa femme qui est malade.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2020, le préfet de l'Yonne représenté par Me D... conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... sont inopérants ou infondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller, au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain, né le 5 juin 1980, qui expose être entré en France en 2012, a sollicité, le 29 mars 2018, un titre de séjour en qualité de conjoint de français après son mariage avec Mme A..., le 24 mars de la même année. Il relève appel du jugement rendu le 26 août 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation dirigée contre l'arrêté par lequel le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du Maroc.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des moyens de la requête :

2. M. B... expose qu'il est entré en France dans le courant de l'année 2012 pour rejoindre une tante et un cousin qui l'ont hébergé avant qu'il ne s'installe chez Mme A... dans le courant de l'année 2013 avec qui il s'est marié en mars 2018, un peu plus d'un an avant l'arrêté en litige du 24 juin 2019. Si M. B... ne produit pas de pièces permettant d'établir avec certitude la date de son arrivée en France et la date du début de sa vie de couple avec Mme A..., sinon seulement à partir de 2015, il produit plus d'une dizaine d'attestations, dont l'authenticité n'est pas contestée, qui émanent de ses proches ou de ceux de Mme A..., notamment son père, et de voisins, dont les auteurs indiquent dans des termes circonstanciés et précis avoir été témoins de la vie de couple de M. B... et de Mme A... depuis 2013. Il ressort également des pièces médicales du dossier, ainsi que de nouvelles attestations produites pour la première fois en appel, que Mme A... souffre de problèmes de santé, notamment de vertiges qui l'empêchent de se déplacer seule et qui impliquent la présence d'un tiers pour l'assister quotidiennement, ce que fait M. B..., qui assume, aux termes de ces attestations, l'intégralité des tâches ménagères du couple. Dans ces circonstances, compte tenu tant de la durée de présence en France de M. B..., que de celle de sa vie de couple avec Mme A... à la date de la décision litigieuse, et de l'assistance qu'il porte à son épouse en raison de ses problèmes de santé, ce dernier est fondé à soutenir que la décision par laquelle le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle doit, pour ce motif, être annulée.

3. En raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont, en l'espèce, intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale. Il en résulte que M. B... est également fondé à demander l'annulation des autres décisions contenues dans l'arrêté en litige.

4. Ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des moyens de la requête, M. B... est fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de l'Yonne du 24 juin 2019 est illégal et, par suite que c'est à tort que, par son jugement attaqué du 26 août 2019, le tribunal administratif de Dijon, a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".

6. L'annulation de la décision litigieuse implique nécessairement que le préfet de l'Yonne délivre à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu pour la cour de prescrire l'exécution de cette mesure dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

7. M. B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, son avocate, Me E... peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui seront versés à Me E....

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1902108 du tribunal administratif de Dijon du 26 août 2019 et la décision du 24 juin 2019 du préfet de l'Yonne sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à Me E..., avocate de M. B....

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B..., au ministre de l'intérieur et à Me E....

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme C... G..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 décembre 2020.

No 19LY041812


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04181
Date de la décision : 04/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : NOURANI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-04;19ly04181 ?
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