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04/12/2020 | FRANCE | N°18LY03556

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 04 décembre 2020, 18LY03556


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur général des Hospices civils de Lyon (HCL) sur sa demande, reçue le 11 avril 2016, d'attribution de l'indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants à compter du 1er janvier 2016 ;

2°) d'enjoindre au directeur général des HCL de lui attribuer l'indemnité demandée à compter du 1er janvier 2016.

Par un jugement n° 16

05865 du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision implicite du dir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur général des Hospices civils de Lyon (HCL) sur sa demande, reçue le 11 avril 2016, d'attribution de l'indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants à compter du 1er janvier 2016 ;

2°) d'enjoindre au directeur général des HCL de lui attribuer l'indemnité demandée à compter du 1er janvier 2016.

Par un jugement n° 1605865 du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision implicite du directeur des Hospices civils de Lyon et a enjoint au directeur général des Hospices civils de Lyon de verser à Mme C... l'indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants de 1ère catégorie avec effet rétroactif au 1er janvier 2016.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 septembre 2018, les Hospices civils de Lyon, représentés par la SELARL F... et Walgenwitz, agissant par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 juillet 2018 ;

2°) de rejeter les conclusions à fin d'annulation de Mme C... ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont fait une inexacte application des dispositions de l'article 1er du décret n° 67-624 du 23 juillet 1967 et de l'article 8 de l'arrêté du 18 mars 1981 ;

o c'est à tort que le tribunal a considéré que le CSAPA devait être regardé comme un service accueillant des malades agités ou difficiles ; c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a considéré que la prime peut être accordée pour des patients seulement susceptibles d'être agités ou menaçants ; c'est à tort que les juges de première instance ont considéré que la prime devait être accordée sans égard à la fréquence de réalisation du risque ;

o c'est à tort que le tribunal a considéré que les agents du CSAPA étaient exposés à un risque d'accidents corporels ou de lésions organiques en raison de la prise en charge de malades agités ou difficiles ; les mesures prises par les CSAPA permettent d'éliminer ces risques.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2019, Mme C... représentée par la SELARL LLC et associés bureau de Paris, agissant par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge des Hospices civils de Lyon la somme de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Elle soutient que les moyens soulevés par les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 16 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 20 mars 2020.

Des pièces produites après clôture par les Hospices civils de Lyon ont été enregistrées le 2 octobre 2020 et n'ont pas été communiquées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'arrêté du 18 mars 1981 relatif aux primes et indemnités du personnel relevant du livre IX du code de la santé publique dont les taux et les montants sont déterminés par des textes applicables aux agents de l'Etat ;

- le décret n° 67-624 du 23 juillet 1967 fixant les modalités d'attribution et les taux des indemnités pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants ;

- la loi no 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant les Hospices civils de Lyon, et de Me H... représentant Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., infirmière, agent des Hospices civils de Lyon, est affectée au Centre de soins d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) du groupement hospitalier nord. Elle a demandé aux Hospices civils de Lyon de lui verser l'indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants de première catégorie (travaux présentant des risques d'accident corporel ou de lésion organique) prévue par l'article 1er du décret du 23 juillet 1967. Le silence gardé par les Hospices civils de Lyon sur sa demande du 8 avril, reçue le 11 avril 2016, a fait naître une décision implicite de rejet. Ces derniers relèvent appel du jugement rendu le 20 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 23 juillet 1967 susvisé : " Des indemnités spécifiques peuvent être allouées à certains personnels chargés d'effectuer des travaux pour l'exécution desquels des risques ou des incommodités subsistent malgré les précautions prises et les mesures de protection adoptées. Ces indemnités spécifiques sont classées en trois catégories : 1re catégorie : indemnités spécifiques pour des travaux présentant des risques d'accidents corporels ou de lésions organiques. (...) ". L'article 8 de l'arrêté du 18 mars 1981 susvisé dispose : " Indemnité pour travaux dangereux, incommodes, insalubres ou salissants. / Des indemnités spécifiques sont allouées aux agents chargés d'effectuer des travaux pour l'exécution desquels des risques ou des incommodités subsistent malgré les précautions prises et les mesures de protection adoptées. / Les travaux ouvrant droit aux indemnités spécifiques sont rangés dans les trois catégories ci-après : / 1re catégorie : travaux présentant des risques d'accidents corporels ou de lésions organiques ; ". Le tableau figurant à l'annexe II de cet arrêté relatif à la " Classification des travaux ouvrant droit aux indemnités spécifiques pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants " mentionne notamment " Affectation dans les services de malades agités et difficiles ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la seule affectation effective d'un agent dans un service de malades agités et difficiles lui ouvre droit au bénéfice de l'indemnité pour travaux dangereux, incommodes, insalubres ou salissants dès lors que les risques ou incommodités subsistent malgré les précautions prises et les mesures de protection adoptées.

3. En deuxième lieu, l'article D. 3411-1 du code de la santé publique dispose que " Les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie assurent, pour les personnes ayant une consommation à risque, un usage nocif ou présentant une dépendance aux substances psychoactives ainsi que pour leur entourage : / 1° L'accueil, l'information, l'évaluation médicale, psychologique et sociale et l'orientation de la personne ou de son entourage ;/ Dans ce cadre, ils peuvent mettre en place des consultations de proximité en vue d'assurer le repérage précoce des usages nocifs. /2° La réduction des risques associés à la consommation de substances psychoactives ; / 3° La prise en charge médicale, psychologique, sociale et éducative. Elle comprend le diagnostic, les prestations de soins, l'accès aux droits sociaux et l'aide à l'insertion ou à la réinsertion. / Les centres assurent le sevrage et son accompagnement, la prescription et le suivi des traitements médicamenteux, dont les traitements de substitution aux opiacés. / Ils peuvent également prendre en charge des personnes présentant des addictions sans substances. ". Il résulte de ces dispositions que les agents travaillant, comme en l'espèce, Mme C..., dans un tel centre, sont amenés à apporter des soins à des personnes ayant une consommation à risque, un usage nocif ou présentant une dépendance aux substances psychoactives ainsi qu'à leur entourage.

4. Il n'est pas contesté que ces personnes, en raison de leur addiction peuvent se montrer agitées ou difficiles ainsi qu'en témoignent, au demeurant, les nombreux signalements d'incidents produits par Mme C... sur la période de 2006 à 2016. Contrairement à ce que soutiennent les Hospices civils de Lyon, il ne résulte pas des dispositions précitées, ni ne ressort des pièces du dossier, que la circonstance que le CSAPA ne soit pas une unité de prise en charge sur la durée, mais seulement d'accueil, ait une influence sur le caractère agité ou difficile des patients qu'il accueille. De même, la circonstance que seule une minorité des patients se montre réellement agitée ou difficile ne permet pas, au regard des affections traitées dans ce service, d'écarter le risque d'une difficulté à gérer un patient ou d'une agression du fait du caractère généralement imprévisible de celle-ci. Par suite, les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a considéré que le CSAPA dans lequel est affectée Mme C... constitue un service de malades agités et difficiles.

5. En troisième lieu, si les Hospices civils de Lyon font état de diverses mesures de précaution et prévention telle que la mise en place d'un système de surveillance vidéo, bouton d'urgence, pièces fermées à clé, et mobilisation d'agents de sécurité, ces mesures, qui permettent d'atténuer la gravité de l'exposition au risque, le laissent en partie subsister.

6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a fait droit aux conclusions à fin d'annulation et d'injonction de Mme C....

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions des Hospices civils de Lyon en ce sens doivent être rejetées.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge des HCL une somme de 1 000 euros qu'ils paieront à Mme C..., au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête des Hospices civils de Lyon est rejetée.

Article 2 : Les Hospices civils de Lyon verseront une somme de 1 000 euros à Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux Hospices civils de Lyon et à Mme G... C....

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme B... E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 décembre 2020.

No 18LY035562


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03556
Date de la décision : 04/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL JEAN-PIERRE et WALGENWITZ

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-04;18ly03556 ?
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