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17/11/2020 | FRANCE | N°18LY03020

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 17 novembre 2020, 18LY03020


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 29 juin 2017 par lequel le maire de la commune de Paray-le-Monial lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois mois, de faire retirer l'intégralité des mentions portées irrégulièrement sur son dossier personnel, et d'enjoindre à la commune de Paray-le-Monial de le réintégrer dans ses fonctions sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à int

ervenir.

Par un jugement n° 1701974 du 12 juin 2018, le tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 29 juin 2017 par lequel le maire de la commune de Paray-le-Monial lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois mois, de faire retirer l'intégralité des mentions portées irrégulièrement sur son dossier personnel, et d'enjoindre à la commune de Paray-le-Monial de le réintégrer dans ses fonctions sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1701974 du 12 juin 2018, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 29 juin 2017 sanctionnant M. B... G..., et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er août 2018, la commune de Paray-le-Monial, représentée par la SELARL Cabinet Philippe C... et associes, agissant par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 12 juin 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... G... devant le tribunal administratif de Dijon ;

3°) de mettre à la charge de M. B... G... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les faits reprochés à M. B... G... sont établis et fautifs ;

- la consultation de la commission consultative paritaire préalablement à sa sanction était impossible dès lors que cette commission n'était pas installée et que le décret prévoyant cette consultation n'était pas entré en vigueur ;

- la présence du directeur général des services à l'entretien disciplinaire est sans incidence sur la légalité de la décision ;

- la décision litigieuse n'est pas entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 octobre 2018, M. B... G..., représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune de Paray-le-Monial la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Paray-le-Monial ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 février 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 3 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2016-1858 du 23 décembre 2016 relatif aux commissions consultatives paritaires et aux conseils de discipline de recours des agents contractuels de la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me H... représentant la commune de Paray-le-Monial, et de Me E... représentant M. B... G... ;

Une note en délibéré présentée par M. B... G... a été enregistrée le 4 novembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Paray-le-Monial a recruté M. B... G... en 1998 en qualité de chargé de communication au sein du cabinet du maire, puis l'a maintenu en fonction par des contrats successifs. Par un courrier du 9 mars 2015, la commune lui a signifié son licenciement pour perte de confiance et suppression de son emploi pour raisons budgétaires. Cette décision a toutefois été annulée par le tribunal administratif de Dijon par un jugement n° 1501903 du 23 juin 2016. Postérieurement à ce jugement, par une décision du 29 juin 2017, la commune de Paray-le-Monial a infligé à M. B... G... la sanction de trois mois d'exclusion temporaire de fonctions. La collectivité relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 12 juin 2018 qui a annulé cette sanction.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa régularité :

2. La commune de Paray-le-Monial fait grief à M. B... G..., en premier lieu de s'être procuré frauduleusement et d'avoir fait usage de la fiche de congés au titre de l'année 2017 de madame G***, et de la liste nominative des primes et indemnités versées par la commune à ses agents au titre du mois de janvier 2017, documents confidentiels appartenant à la commune et comportant des éléments protégés par le secret de la vie privée. Ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, les attestations produites par la commune qui émanent de personnels du service ressources humaines, et qui certifient que M. B... G... ne pouvait avoir accès aux documents litigieux et qu'eux-mêmes ne les lui avaient pas remises, ne sont pas de nature à contredire les affirmations de ce dernier selon lesquelles les documents ont été remis anonymement à son avocat. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Dijon a considéré que le grief tiré de ce que M. B... G... s'est procuré frauduleusement les documents litigieux n'était pas établi. La commune n'est pas davantage fondée à soutenir, en appel, que ces faits doivent être qualifiés de recel.

3. La commune de Paray-le-Monial a fait, en deuxième lieu, grief à M. B... G... d'avoir fait usage de ces documents. Il ressort des pièces du dossier que M. B... G... s'est borné à produire ces documents dans le cadre d'une action contentieuse l'impliquant, ainsi que la commune, devant le tribunal administratif de Dijon. La liste nominative des primes et indemnités versées par la commune à ses agents au titre du mois de janvier 2017 a été communiquée au tribunal administratif de Dijon en ne laissant apparaître que le nom de Mme G***. Contrairement aux affirmations de la commune de Paray-le-Monial, ces documents se limitent, pour le premier, à mentionner les jours de congés de Mme G*** et, pour le second, à indiquer des montants globalisés. Ils ne révèlent aucune information relative à la façon de servir et n'ont pas été diffusés autrement que dans le cadre de l'instance contentieuse susmentionnée. La commune de Paray-le-Monial n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu que ce second grief était fondé sur des faits non fautifs.

4. La commune a également fait grief à M. B... G..., " de s'être placé et maintenu en situation d'absence injustifiée du 26 septembre 2016, date à laquelle il était réintégré dans les services municipaux, au 4 avril 2017, veille de sa reprise de fonctions, étant précisé que la circonstance que M. K... B... G... occupait pendant cette période un emploi public dans une autre administration territoriale dans le cadre d'un recrutement prononcé à une date à laquelle il avait perdu la qualité d'agent municipal, (...) ". Ainsi qu'il a été mentionné au point 1 du présent arrêt, le licenciement de M. B... G... pour perte de confiance ayant été annulé, ce dernier devait ainsi être réintégré dans les effectifs de la collectivité. Cette dernière lui a demandé de se présenter en mairie le 26 septembre 2016 pour reprendre ses fonctions. Par suite, M. B... G..., sauf à ce qu'il ait obtenu le bénéfice de l'une des possibilités ouvertes par le décret du 15 février 1988 d'être en congés ou qu'il ait été expressément autorisé à s'absenter, était tenu de reprendre ses fonctions. M. B... G..., s'est effectivement présenté en mairie le 26 septembre 2016 mais a refusé de reprendre ses fonctions en invoquant son inaptitude à son poste.

5. Aux termes de l'article 7 du décret du 15 février 1988 susvisé, " L'agent contractuel en activité bénéficie, sur présentation d'un certificat médical, de congés de maladie (...) ". Il résulte nécessairement de ces dispositions que si le congé de maladie est de droit dès lors qu'il est justifié par un certificat médical, il doit, pour être accordé, être demandé et accompagné d'un arrêt de travail permettant à l'administration de connaître les modalités et, notamment, la durée de l'arrêt sollicité. Au soutien de ses affirmations selon lesquelles il n'a pas repris ces fonctions pour des raisons médicales, M. B... G... produit un certificat médical daté 28 septembre 2016 du Dr Esposito faisant état de ce que " en l'état actuel " M. B... G... " présente une inaptitude temporaire au poste de chargé de la communication aux affaires sportives et cadre de vie de la ville de Paray-le-Monial. Doit bénéficier d'une visite auprès du médecin du travail. " Toutefois, l'envoi de ce certificat n'était pas accompagné d'un arrêt de travail, établi par le médecin ayant rédigé ce certificat à l'intention de la commune de Paray-le-Monial. Si dans un avis du 18 octobre 2016, le service de médecine préventive a indiqué qu'" un avis spécialisé, ainsi qu'une étude de poste et une étude des conditions de travail sont nécessaires ", il est constant que pendant toute la période de son absence litigieuse M. B... G... n'a obtenu aucun congé de maladie et n'indique pas même en avoir demandé. Il ne remplissait pas, dans ces circonstances, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les conditions de l'article 7 du décret du 15 février 1988.

6. Il s'ensuit que la commune de Paray-le-Monial est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'absence de M. B... G... ne pouvait être regardée comme injustifiée par la commune.

7. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les parties tant devant le tribunal administratif de Dijon que devant la cour.

Sur la légalité de la décision litigieuse de sanction :

En ce qui concerne les vices de procédures invoqués :

8. En premier lieu, l'article 36-1 du décret du 15 février 1988 susvisé dispose : " Toute décision individuelle relative aux sanctions disciplinaires autres que l'avertissement et le blâme est soumise à consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. La décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée. " Les dispositions relatives aux modalités d'élection et de désignation des membres de ces commissions consultatives paritaires, à l'organisation, aux compétences et à leurs règles de fonctionnement ont été fixées par le décret du 23 décembre 2016 susvisé. Son article 33 dispose que " Les premières élections des représentants du personnel aux commissions consultatives paritaires sont organisées à la date du prochain renouvellement général des instances représentatives du personnel de la fonction publique territoriale. ". Ce renouvellement ne s'étant tenu que le 6 décembre 2018, soit postérieurement à la date de la décision attaquée, la commune n'était pas en mesure de saisir la commission consultative paritaire compétente. M. B... G... ne peut ainsi pas utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 36-1 du décret du 15 février 1988.

9. En second lieu, la circonstance que le directeur général des services de la commune était présent à l'entretien qui s'est déroulé préalablement à la décision du 29 juin 2017 prise par le maire de la commune, n'a privé M. B... G... d'aucune garantie ni n'a fait obstacle aux droits de la défense, contrairement à ce qu'il soutient.

En ce qui concerne les autres moyens de légalité interne :

10. Si M. B... G... soutient que son absence pendant la période litigieuse était justifiée également par le différend qui l'opposait à la commune sur la nature de son contrat de recrutement, un tel motif qui ne le soumettait à un aucun ordre manifestement illégal et de nature à troubler l'ordre public, ne le dispensait pas de reprendre ses fonctions et n'était pas de nature à justifier son absence. Cette absence n'étant justifiée par aucun motif valable, elle a revêtu un caractère fautif de nature à justifier une sanction.

11. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu du poste occupé par M. B... G... et de la durée de son absence irrégulière, la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois mois, prise par la commune de Paray-le-Monial n'apparaît pas disproportionnée, pour autant, en tout état de cause, que M. B... G... ait entendu se prévaloir d'une telle disproportion.

12. Enfin, le détournement de pouvoir allégué par M. B... G... selon lequel la sanction en litige n'avait pour objet que de l'atteindre sur le plan financier et moral n'est établi par aucun élément du dossier.

13. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. B... G... à fin d'annulation de la décision litigieuse du 29 juin 2017 du maire de la commune de Paray-le-Monial doivent être rejetées, ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction, la présente décision n'appelant ainsi aucune mesure d'exécution.

Sur les conclusions relatives aux frais d'instance :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Paray-le-Monial qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de M. B... G..., en ce sens doivent être rejetées.

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. B... G... une somme de 800 euros qu'il paiera à la commune de Paray-le-Monial, au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a exposés.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1701974 du tribunal administratif de Dijon du 12 juin 2018 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... G... devant le tribunal administratif de Dijon, et ses conclusions d'appel relatives aux frais non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : M. B... G... versera à la commune de Paray-le-Monial une somme de 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Paray-le-Monial et à M. J... G....

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme F... A..., présidente de chambre,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme D... I..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 novembre 2020.

N° 18LY030202


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03020
Date de la décision : 17/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Motifs. Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET PHILIPPE PETIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-11-17;18ly03020 ?
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