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03/11/2020 | FRANCE | N°18LY03930

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 novembre 2020, 18LY03930


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée mise à sa charge au titre des périodes correspondant aux années 2012, 2013 et 2014 à hauteur respectivement de 5 415 euros, 5 690 euros et 5 698 euros.

Par un jugement n° 1702225 du 5 octobre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés les 30 octobre 2018, 9 avril 2019 et 3 août

2020, M. C..., représenté par Me Thévenet, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée mise à sa charge au titre des périodes correspondant aux années 2012, 2013 et 2014 à hauteur respectivement de 5 415 euros, 5 690 euros et 5 698 euros.

Par un jugement n° 1702225 du 5 octobre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés les 30 octobre 2018, 9 avril 2019 et 3 août 2020, M. C..., représenté par Me Thévenet, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 octobre 2018 ;

2°) de lui accorder la restitution des sommes demandées ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens, par application des dispositions de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen soulevé en défense tiré de la recevabilité de sa demande au titre de l'année 2012 ;

- le tribunal aurait dû mettre en demeure l'administration de répondre à son mémoire en réplique ;

- le tribunal aurait dû mettre en oeuvre son pouvoir d'instruction concernant les éléments de preuve qu'il apportait et qui ont été écartés de manière insuffisamment motivée ;

- les arguments de fond qu'il a développés sur l'application de la franchise TVA à ses locations de garage sont parfaitement pertinents ;

- il incombait à l'administration d'établir l'existence d'une activité passible de la TVA et d'établir les faits qui justifient cet assujettissement ;

- dès lors que son activité de loueur de garage produisait un chiffre d'affaires inférieur à la limite de chiffre d'affaires fixée par l'article 293 B du code général des impôts, il devait bénéficier de plein droit de la franchise en base ; pour que cette activité soit assujettie à la TVA, il aurait fallu qu'il formule une option expresse auprès du service des impôts compétents, comme l'indique le § 240 de l'instruction BOI-TVA-DECLA-40-10-20-20170705 ;

- en l'absence de toute facture et de toute mention explicite du montant et du taux de la taxe, sur les baux conclus avec les locataires, les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts ne lui étaient pas applicables ;

- l'administration qui est tenue à un devoir de loyauté aurait dû prononcer un dégrèvement d'office sur le fondement de l'article R. 211-1 du livre des procédures fiscales.

Par un mémoire enregistré le 21 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions relatives à l'année 2012 ne sont pas recevables ;

- il n'appartient pas à l'appelant de critiquer la manière dont le tribunal a instruit l'affaire ;

- le requérant a souscrit de manière continue des déclarations de chiffre d'affaires concernant son activité locative, a acquitté la TVA correspondante depuis le 1er avril 1991 et a bénéficié le 22 mars 1993 d'un remboursement du crédit de TVA. De plus, il n'établit pas que les recettes issues de la location des parkings étaient inférieures au montant maximum des recettes ouvrant droit au bénéfice de la franchise en base ;

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de ce que la mention de la TVA sur un bail ne suffirait pas à rendre l'intéressé redevable de la taxe en application du 3 de l'article 283 du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B..., présidente assesseure,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C... propriétaire de trente garages situés à Lyon, qu'il donne en location relève appel du jugement du 5 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée mise à sa charge au titre des périodes correspondant aux années 2012, 2013 et 2014 à hauteur respectivement de 5 415 euros, 5 690 euros et 5 698 euros.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, les premiers juges, qui rejetaient au fond la demande de M. C..., n'étaient pas tenus de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de ce que les conclusions à fin de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée au titre de l'année 2012 sont irrecevables dès lors qu'elles n'ont pas été précédées d'une réclamation préalable.

3. En deuxième lieu, le requérant soutient que les premiers juges se sont bornés à constater qu'il n'apportait pas la preuve que le montant annuel des loyers de ses garages était inférieur aux limites de la franchise de TVA prévue par l'article 293 B du code général des impôts alors qu'ils auraient dû mettre l'administration en demeure de répondre à son mémoire, afin, en cas de réponse de l'administration de pouvoir fournir de nouveaux éléments de preuve ou, en l'absence de réponse de pouvoir bénéficier d'un acquiescement aux faits. Toutefois, il ne résulte ni des dispositions de l'article R. 612-6 du code de justice administrative ni d'aucune autre disposition ou principe que le juge serait tenu, à peine d'irrégularité de sa décision, de mettre en demeure les parties qui ne l'ont pas fait de produire un mémoire et de mettre en oeuvre les dispositions de l'article R. 612-6 du code de justice administrative relatives à l'acquiescement aux faits.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 611-10 du code de justice administrative : " Sous l'autorité du président de la chambre à laquelle il appartient et avec le concours du greffier de cette chambre, le rapporteur fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé aux parties pour produire leurs mémoires. Il peut demander aux parties, pour être jointes à la procédure contradictoire, toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige. (...) ". La mise en oeuvre de ce pouvoir d'instruction constitue un pouvoir propre du juge. Lorsqu'il estime être suffisamment éclairé par les pièces versées au dossier pour statuer, le juge administratif n'a pas à faire usage de son pouvoir d'instruction pour permettre à une partie d'accéder à d'éventuels documents susceptibles de lui permettre d'établir le bien-fondé de ses allégations. Dans les circonstances de l'espèce, si, dans son mémoire en réplique enregistré le 10 novembre 2017, M. C... a produit des tableaux récapitulatifs mentionnant notamment le montant des recettes liées à la location de ses garages, le tribunal n'a pas méconnu son office en s'abstenant de procéder à une mesure d'instruction sur ce point dès lors qu'il s'estimait suffisamment éclairé par les pièces figurant au dossier. Par ailleurs, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué, que le tribunal a écarté ces pièces de manière suffisamment motivée.

5. Enfin, si M. C... soutient que les arguments de fond qu'il a développés sur l'application de la franchise TVA à ses locations de garage sont parfaitement pertinents, un tel moyen ne peut concerner que le bien-fondé du jugement et non sa régularité.

Sur le bien-fondé :

6. En premier lieu, aux termes de l'article R. 1941 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé.

7. Aux termes de l'article 261 D du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : " (...) / 2° Les locations de terrains non aménagés et de locaux nus, à l'exception des emplacements pour le stationnement des véhicules ; toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables lorsque les locations constituent pour le bailleur un moyen de poursuivre, sous une autre forme, l'exploitation d'un actif commercial ou d'accroître ses débouchés ou lorsque le bailleur participe aux résultats de l'entreprise locataire ; (...) ".

8. Aux termes de l'article 293 B du code général des impôts dans ses dispositions issues de la loi du 25 janvier 2011 : " I.-Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France (...) bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsqu'ils n'ont pas réalisé : (...) 2° (...) un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, supérieur à : a) 32 600 € l'année civile précédente ; b) Ou 34 600 € l'année civile précédente, lorsque la pénultième année il n'a pas excédé le montant mentionné au a. (...) VI.-Les seuils mentionnés aux I à V sont actualisés chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondis à la centaine d'euros la plus proche. ". Le montant du chiffre d'affaires mentionné au a) du 2° de cet article a ainsi été porté à 32 900 euros pour 2014.

9. Aux termes des dispositions de l'article 293 F du code général des impôts : " I. Les assujettis susceptibles de bénéficier de la franchise mentionnée à l'article 293 B peuvent opter pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. (...). " et aux termes de l'article 293 E du même code : " Les assujettis bénéficiant d'une franchise de taxe mentionnée à l'article 293 B ne peuvent opérer aucune déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, ni faire apparaître la taxe sur leurs factures, notes d'honoraires ou sur tout autre document en tenant lieu. /En cas de délivrance d'une facture, d'une note d'honoraires ou de tout autre document en tenant lieu par ces assujettis pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, la facture, la note d'honoraires ou le document doit comporter la mention : " TVA non applicable, article 293 B du CGI " ".

10. Enfin, aux termes de l'article 283 du même code : " (...) 3. Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation (...) ".

11. Il est constant que M. C..., a souscrit des déclarations relatives à la taxe sur la valeur ajoutée entre le 1er avril 1991 et le 31 décembre 2014 et qu'il a spontanément acquitté les droits correspondants. Par suite, et contrairement à ce qu'il soutient, il lui incombe d'établir qu'il était placé de plein droit sous le régime de franchise de taxe sur la valeur ajoutée, en application des dispositions précitées de l'article 293 B du code général des impôts et qu'il n'était pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée en litige.

12. Le requérant soutient qu'il pouvait bénéficier au titre de la période litigieuse, du régime de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée prévu par l'article 293 B du code général des impôts et que les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts ne faisaient pas obstacle à ce qu'il puisse bénéficier de ce régime de franchise, dès lors que les mentions relatives au prix des loyers figurant sur ses baux ne permettent pas d'établir qu'il a facturé de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, dès lors que le requérant indique lui-même que ses loyers ne comprenaient aucun montant de taxe sur la valeur ajoutée, il ne pouvait, ainsi qu'il l'a fait dans le tableau de synthèse qu'il a réalisé lui-même, calculer le montant des recettes perçues en déduisant de la taxe sur la valeur ajoutée. Ainsi, en se bornant à faire valoir qu'au cours de la période litigieuse ses recettes " hors taxe " s'élevaient à 30 729 euros en 2012, 31 092 euros en 2013 et 30 954 euros en 2014, M. C... n'établit pas qu'il relevait du régime de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée prévu par l'article 293 B du code général des impôts. Par suite, et en tout état de cause, le requérant ne peut se prévaloir de la circonstance qu'il n'aurait pas formulé expressément l'option prévue par l'article 293 F de ce même code ou que les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts ne lui seraient pas applicables.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

14. Le requérant, qui n'a fait l'objet d'aucun rehaussement d'imposition, n'est en tout état de cause pas fondé, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, à se prévaloir du paragraphe § 240 de l'instruction BOI-TVA-DECLA-40-10-20-20170705 à l'appui de ses conclusions.

15. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, le principe de loyauté n'impose pas à l'administration fiscale de prononcer le dégrèvement d'office d'une imposition et il n'appartient pas, en tout état de cause, au juge administratif d'apprécier l'usage fait par l'administration du pouvoir que celle-ci tient de l'article R. 211-1 du livre des procédures fiscales.

16. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme B..., présidente assesseure,

Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 3 novembre 2020.

2

N° 18LY03930


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03930
Date de la décision : 03/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : THEVENET

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-11-03;18ly03930 ?
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