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22/10/2020 | FRANCE | N°20LY01054

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 22 octobre 2020, 20LY01054


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 27 mai 2019 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1905263 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon de rej

eté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 27 mai 2019 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1905263 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon de rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2019 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 27 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois sous la même astreinte, à titre infiniment subsidiaire de lui délivrer une assignation à résidence en cas d'annulation de la seule décision fixant le pays de destination ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation, d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle et d'une erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 313-11, 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet du Rhône a entaché cette décision d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui opposant l'absence de production d'un visa de long séjour ;

- il a méconnu l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne la poursuite de ses études ;

- cette décision méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée en ce qu'elle est fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours méconnaît le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et/ou de celle lui refusant un titre de séjour ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle présente un caractère disproportionné et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né en 1986, relève appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 27 mai 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixant le pays de destination en cas d'éloignement forcé et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la fiche d'examen de demande de titre de séjour produite par le préfet du Rhône en première instance, que M. A... a sollicité, le 16 février 2018, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d' " étudiant ". Il ressort des énonciations de l'arrêté contesté que le préfet a entendu statuer sur cette seule demande de titre de séjour et ne s'est ainsi pas expressément prononcé sur la demande de l'intéressé, faite par l'intermédiaire de son conseil par courrier du 26 mars 2019, tendant à obtenir un titre de séjour, à titre principal, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que les moyens tirés ce que le préfet du Rhône aurait entaché sa décision de refus de titre de séjour d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen complet de sa situation au regard de ces dernières dispositions doivent être, ainsi que l'a jugé le tribunal, écarté. Par ailleurs, l'intéressé ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions en annulation de cette même décision, la méconnaissance desdites dispositions.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23, L. 313-24, L. 313-27 et L. 313-29 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. (...) ". Selon le 4° de l'article R. 311-2 du même code, l'étranger qui séjourne déjà en France sous couvert d'un titre de séjour doit présenter sa demande de renouvellement dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire. A défaut, il doit justifier à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour. Enfin, aux termes de l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 2° de l'article R. 313-1 : / 1° L'étranger qui suit en France un enseignement ou y fait des études, en cas de nécessité liée au déroulement des études. Sauf cas particulier, l'étranger doit justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Il est tenu compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté à l'appui de la demande de titre de séjour, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études ; (...) ".

4. D'une part, lorsque le préfet est saisi d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour après expiration du délai mentionné à l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette demande est instruite comme une demande de première délivrance d'un titre de séjour de même nature. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 14 septembre 2009, sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour portant la mention " étudiant ", dont il a obtenu le renouvellement jusqu'au 8 septembre 2013. Par une décision du 27 mars 2014, dont la légalité a été confirmée par un jugement devenu définitif du tribunal administratif de Lyon du 27 novembre 2014, le préfet du Rhône lui a refusé le renouvellement de ce titre de séjour qu'il a assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Par une décision du 3 juillet 2015, le préfet du Rhône a rejeté la demande de M. A... présenté sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en raison de son état de santé, a de nouveau obligé l'intéressé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois. Le 16 février 2018, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant ". Il appartenait donc au préfet d'instruire cette demande comme une première demande de titre de séjour portant cette mention.

5. D'autre part, M. A..., étudiant en France entre 2009 et 2013, ne justifie être titulaire d'aucun diplôme. Par ailleurs, la circonstance qu'il a obtenu une aide financière de la région pour suivre une formation pour la préparation du diplôme d'Etat d'aide-soignant dont il lui restait à valider un stage pratique à la date de la décision en litige, ne saurait constituer un " cas particulier " au sens du 1° de l'article R. 313-10 précité. Ainsi, le préfet du Rhône a pu, sans entacher sa décision d'une méconnaissance des dispositions de l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se fonder sur le défaut de production du visa de long séjour pour refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité en qualité d'étudiant.

6. En tout état de cause, ainsi qu'il vient d'être dit, M. A..., titulaire d'un diplôme d'études universitaires générales option maths-physiques et d'une licence de mathématiques délivrés en 2008 et 2009 par l'université de Conakry, n'a validé aucun diplôme de l'enseignement supérieur en France entre 2009 et 2013 sans que ses allégations tirées de ce que ses échecs successifs résulteraient de ses problèmes de santé, du décès de son père et de ses difficultés d'intégration au sein de l'université française ne soient établies. S'il a obtenu un diplôme universitaire " action humanitaire " en 2018, son inscription en préparation du diplôme d'Etat d'aide-soignant, de niveau CAP (certificat d'aptitude professionnelle) ou équivalent, constitue son quatrième changement d'orientation depuis son entrée en France et ne révèle aucune progression dans le cursus de M. A....

7. En troisième lieu, M. A... se prévaut de la durée de sa présence en France, de son insertion sociale et professionnelle ainsi que de son isolement dans son pays d'origine. Toutefois, si l'intéressé a vécu régulièrement en France entre 2009 et 2013, sous couvert de titres de séjour portant la mention " étudiant ", il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire national depuis cette date malgré deux mesures d'éloignement prises à son encontre en mars 2014 et juillet 2015. Par ailleurs, l'intéressé, célibataire et sans enfant, a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de vingt-trois ans, et reconnaît lui-même qu'il n'y est pas dépourvu d'attaches familiales. Par suite, malgré les efforts engagés depuis 2017 par l'intéressé pour s'insérer professionnellement, le préfet du Rhône n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

8. En quatrième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".

9. Si M. A... fait en particulier valoir la fin prochaine de sa formation et la promesse d'embauche qui lui a été faite, il résulte de ce qui a été dit au point 7 que cette circonstance n'est pas de nature à justifier que lui soit accordé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet du Rhône a méconnu les dispositions précitées doit être écarté.

10. En cinquième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) ".

11. Ainsi que l'a jugé le tribunal, la situation personnelle et familiale de M. A... telle que rappelée au point 7 du présent arrêt, ne caractérise pas l'existence de circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Le moyen tiré de la méconnaissance du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.

12. En dernier lieu, les moyens invoqués à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, celui tiré de l'annulation par voie de conséquence des décisions subséquentes doit l'être également.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2020.

2

N° 20LY01054


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01054
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : HASSID

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-22;20ly01054 ?
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