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01/10/2020 | FRANCE | N°19LY00983

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 01 octobre 2020, 19LY00983


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... D... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Dijon :

- d'annuler la décision implicite de refus de retrait du refus de protection fonctionnelle qui lui a été opposée le 22 mai 2017 ;

- d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, de prendre en charge ses frais médicaux à raison des faits subis et des frais et honoraires d'avocats exposés tant au pénal qu'au civil ;

- de condamner l'État à lui verser les som

mes de 7 366,80 euros et de 3 600 euros en indemnisation, d'une part, de ses préjudices matérie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... D... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Dijon :

- d'annuler la décision implicite de refus de retrait du refus de protection fonctionnelle qui lui a été opposée le 22 mai 2017 ;

- d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, de prendre en charge ses frais médicaux à raison des faits subis et des frais et honoraires d'avocats exposés tant au pénal qu'au civil ;

- de condamner l'État à lui verser les sommes de 7 366,80 euros et de 3 600 euros en indemnisation, d'une part, de ses préjudices matériels, de carrière, d'agrément et moral causés par les fautes de l'administration, d'autre part, du préjudice causé par le refus de la protection fonctionnelle ;

- d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'affecter sans délai par voie de mutation sur un poste disponible proche de son nouveau domicile familial (hors CRS) sans perte de traitement.

Par jugement n° 1702154, 1702173 lu le 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a condamné l'État à verser à Mme A... une somme de 4 000 euros en indemnisation de ses préjudices de toute nature et a rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 mars 2019 et 22 avril 2020, Mme B... D... épouse A..., représentée par Me C... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 31 décembre 2018 en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation, d'injonction et d'indemnisation du surplus de ses préjudices ;

2°) d'annuler le refus implicite de retrait du refus de protection fonctionnelle né le 22 mai 2017 ;

3°) de condamner l'État à lui verser la somme de 10 996,80 euros tous préjudices confondus ;

4°) d'enjoindre au ministère de l'intérieur :

- de l'affecter par voie de mutation dans un commissariat à moins de trente kilomètres de son domicile familial, à grade, échelon et rémunération qu'elle devrait détenir sans les faits dont elle soutient avoir été victime ne s'étaient pas produits ;

- de lui octroyer la protection fonctionnelle et, à ce titre, de lui rembourserr les frais et honoraires exposés dans les instances pénale et civile, outre les intérêts légaux, dans le délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de condamner l'État à lui verser la somme de 5 340 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus du retrait d'un précédent refus de protection fonctionnelle est illégal dès lors qu'existent des indices concordants laissant présumer l'existence du harcèlement moral ; le tribunal administratif a méconnu les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, lesquelles n'étaient pas applicables aux demandes présentées avant son entrée en vigueur ; le ministre était tenu d'abroger le refus de protection fonctionnelle en litige ;

- en ne la protégeant pas et en ne mettant en place aucune mesure visant à assurer sa sécurité, le ministère de l'intérieur a commis une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'État ; elle a subi un préjudice moral, de carrière et financier en lien direct avec cette faute et qui doivent être indemnisés à hauteur de 7 366,80 euros ; le refus de protection fonctionnelle a ajouté des souffrances aux violences subies en service qui doivent être indemnisées à hauteur de 3 600 euros ;

- les conditions d'octroi de la protection fonctionnelle étant réunies, il y a lieu d'enjoindre au ministère de l'intérieur de lui faire bénéficier de cette protection et de lui permettre d'exercer ses fonctions en dehors des compagnies républicaines de sécurité, de rembourser les frais de justice et honoraires d'avocat qu'elle a dû assumer à raison des faits dont elle a été victime et enfin de prononcer sa mutation dans un commissariat à moins de trente kilomètres de son domicile familial au même grade et même échelon et à la même rémunération que ceux qu'elle devrait détenir si les faits ne s'étaient pas produits.

Par des mémoires enregistrés les 6 et 9 mars 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de Mme A....

Il soutient que :

- la seconde décision implicite, née le 12 mars 2017, était confirmative du refus de la précédente demande de protection fonctionnelle ; la décision implicite du 22 mai 2017 de rejet de la demande de retrait de cette décision confirmative n'a pu rouvrir le délai de recours contentieux dès lors que le retrait sollicité par Mme A... ne pouvait intervenir que dans un délai de quatre mois à compter de l'édiction de la décision implicite de rejet du 19 mai 2015 ;

- les éléments allégués par Mme A... ne démontrent pas que les préjudices invoqués résulteraient directement de la faute commise par l'administration et ne sont pas de nature à faire regarder comme insuffisante la somme allouée par le tribunal.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-1 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- l'ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l'administration ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., substituant Me C..., pour Mme D... épouse A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... épouse A..., gardien de la paix, a été affectée le 2 novembre 2010 à la compagnie républicaine de sécurité n° 44 à Joigny en unité de maintien de l'ordre. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon lu le 31 décembre 2018 en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation du refus implicite opposé à sa demande de retrait d'une décision née le 22 mars 2017 refusant de lui accorder la protection fonctionnelle et en ce qu'il ne l'a pas indemnisée de la totalité de ses préjudices ni délivrer d'injonctions nécessaires à les réparer.

Sur les conclusions aux fins d'annulation du refus implicite de retrait du refus de protection fonctionnelle :

2. Mme A... a présenté une première demande de protection fonctionnelle le 22 décembre 2014, enregistrée le 15 mars 2015 par le ministre de l'intérieur. En l'absence de réponse, une décision implicite de rejet est née le 15 mai 2015. Mme A... a ensuite adressé une nouvelle demande de protection fonctionnelle, le 12 janvier 2017, qui a de nouveau été implicitement rejetée. Elle a alors sollicité le retrait du refus de protection fonctionnelle né le 22 mars 2017 et en l'absence de réponse, elle a demandé au tribunal administratif de Dijon l'annulation du refus implicite du ministre de l'intérieur, né le 22 mai 2017, de retirer le refus de protection fonctionnelle.

3. Aux termes de l'article 9 de l'ordonnance du 23 octobre 2015 susvisée : " /(...)/ II. - Les dispositions du titre IV du livre II annexées à la présente ordonnance sont applicables au retrait des actes administratifs unilatéraux intervenus à compter du 1er juin 2016 (...) ". En application de ces dispositions et dès lors que la demande de retrait du refus implicite de protection fonctionnelle présentée par Mme A... était postérieure au 1er juin 2016, les dispositions applicables à l'examen de cette demande relevaient de l'article L. 243-3 du code des relations entre le public et l'administration qui dispose : " L'administration ne peut retirer (...) un acte non réglementaire non créateur de droits que s'il est illégal et si le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant son édiction ". La décision statuant sur la demande de retrait étant postérieure de plus de quatre mois au refus de protection fonctionnelle, le ministre de l'intérieur était tenu, en vertu des dispositions précitées, de rejeter ladite demande. Mme A... ne peut utilement se prévaloir du rapport du défenseur des droits qui, se bornant à décrire une situation entièrement constituée à la date des refus de protection fonctionnelle, ne saurait être regardée comme une circonstance nouvelle susceptible de rouvrir le délai de retrait du second refus de protection fonctionnelle.

4. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite refusant de retirer le refus né le 22 mai 2017 à sa demande de protection fonctionnelle. Par suite, les conclusions de sa requête, présentées aux mêmes fins, doivent être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

5. Aucune des parties ne conteste, en appel, que Mme A... alors qu'elle était affectée à la CRS, a été victime, de novembre 2010 à septembre 2012, de faits de harcèlement et de discrimination de nature à engager la responsabilité de l'État, ni qu'en raison de ces faits, le refus de protection fonctionnelle constitue une illégalité fautive.

6. Toutefois et d'une part, les préjudices financier et de carrière allégués par Mme A... découlent de son placement en congé parental, droit statutaire ouvert à la demande de l'agent et répondant à une finalité familiale et éducative étrangère à la nécessité de se soustraire à ses conditions de service. Les conséquences de tous ordres qui découlent de cette interruption de carrière sont donc dépourvues de lien avec les agissements fautifs énoncés au point 5. D'autre part, Mme A... n'établit pas que le montant de 4 000 euros alloués en première instance procèderait d'une évaluation insuffisante de son préjudice moral. Eu égard à ces circonstances, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a limité le montant de son indemnité à la somme de 4 000 euros.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A... à l'encontre du refus de retrait du refus de protection fonctionnelle n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au ministère de l'intérieur de lui faire bénéficier de cette protection, de rembourser les frais de justice et honoraires d'avocat et de la muter dans une affectation correspondant à ses contraintes personnelles doit être rejetée.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administratif font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, la somme demandée à ce titre par Mme A....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... épouse A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.

N° 19LY00983


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00983
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection contre les attaques.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : VIGNOLA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-01;19ly00983 ?
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