Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 mars 2016 par lequel le maire de la commune d'Abondance a accordé un permis de construire à M. A..., ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.
Par un jugement n° 1604735 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 décembre 2018 et 6 mars 2020, ainsi qu'un mémoire, enregistré le 13 mai 2020, qui n'a pas été communiqué, M. et Mme B..., représentés par la SELARLU D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 mars 2016;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la commune d'Abondance au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils justifient de leur intérêt pour agir ;
- le dossier de demande de permis de construire est incomplet au regard des articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ;
- le projet méconnaît l'article UC 3 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) ; la parcelle 1539 est enclavée ; la servitude conventionnelle de passage dont bénéficie la parcelle 2031 ne lui permet pas d'accéder à la voie publique ; l'accès du projet présenté dans le dossier de permis présente une pente d'environ 22%, impropre à l'approche des véhicules de lutte contre l'incendie ou de ramassage des ordures ménagères ;
- l'indication d'une servitude dans le dossier de demande a eu manifestement pour but d'induire en erreur l'administration quant au respect par le projet des dispositions de l'article UC3 ; le permis de construire a ainsi été obtenu par fraude ce qui l'entache d'illégalité et justifie son retrait.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2019, la commune d'Abondance, représentée par la SCP Pianta et Associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés.
Par des mémoires, enregistrés les 19 juillet 2019 et 24 mars 2020, M. et Mme A..., représentés par Me E..., concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la demande était irrecevable faute d'être accompagnée d'une copie de la décision attaquée ;
- les consorts B... ne justifient pas de leur intérêt pour agir ;
- les moyens soulevés sont infondés.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 mai 2020 par une ordonnance du 28 avril 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme J... H..., premier conseiller ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
- les observations de Me D... pour M. et Mme B... ainsi que celles de Me G..., substituant Me E..., pour M. et Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune d'Abondance du 14 mars 2016 accordant à M. A... un permis de construire une maison d'habitation sur les parcelles cadastrées section B n° 1539 et 2031, classées en zone NAc du plan d'occupation des sols (POS), secteur auquel les prescriptions de la zone UC sont applicables.
Sur la légalité du permis de construire du 14 mars 2016 :
2. En premier lieu, le moyen selon lequel le dossier de permis de construire serait incomplet au regard des articles R. 431-8, R. 431-9, R. 431-10 du code de l'urbanisme doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC 3 du règlement du POS de la commune d'Abondance : " Accès : Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise une servitude de passage suffisante instituée par acte authentique ou par voie judiciaire / Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique, à l'approche permettant une lutte efficace contre l'incendie, aux ramassages des ordures ménagères ainsi qu'au déneigement. "
4. Le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, si le juge administratif doit, pour apprécier la légalité du permis au regard des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne lui appartient pas de vérifier ni la validité de cette servitude, ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique.
5. Les consorts B... font valoir que le projet, pour l'essentiel, autorise la réalisation d'une construction sur la parcelle cadastrée section B n° 1539, laquelle, ne bénéficiant d'aucun accès direct à la voie publique, est enclavée et, par suite, inconstructible. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de M. A..., d'une superficie totale de 1 519 m², est constitué, outre la parcelle cadastrée section B n° 1539 sur laquelle doit s'implanter une maison d'habitation, d'une partie de la parcelle n° 2031 dont M. A... est également propriétaire et dont il a obtenu en 2015 la division en vue de construire, par une décision de non-opposition à déclaration préalable. Il ressort des pièces du dossier que lors de l'acquisition par M. et Mme A... de la parcelle cadastrée section B n° 2031, une servitude de passage grevant les parcelles n° 2032 et 1707, devenue n° 2448, a été créée à leur profit pour leur permettre d'accéder au chemin communal. La mention " servitude de passage existante " portée sur le plan de masse ne revêt ainsi aucun caractère frauduleux. Les requérants font valoir sans l'établir que la présence d'une construction à usage de garage empiétant légèrement sur le chemin rural ne permettrait plus l'utilisation de cette servitude. En tout état de cause, le permis de construire étant accordé sous réserve des droits de tiers, ils ne sauraient reprocher au service instructeur de ne pas avoir vérifié si la servitude de passage permettait effectivement à la parcelle n° 2031 d'accéder à la voie publique et si elle autorisait ceux qui l'empruntent à accéder à la parcelle n° 1539. Dans ces conditions, et en dépit du litige pendant devant le juge judiciaire dans le cadre de la procédure visant au désenclavement de la parcelle n° 1539 et relatif à l'aggravation d'une autre servitude, conventionnelle, au profit de la parcelle n° 2031, le maire n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation.
6. Il ressort des pièces du dossier que le chemin existant desservant la parcelle n° 2031 permet la circulation des véhicules de lutte contre l'incendie et de ramassage des ordures ménagères. En se bornant à invoquer la pente de l'accès autorisé, que ne régissent pas les dispositions citées au point 3, les requérants ne démontrent pas la méconnaissance des dispositions de l'article UC 3 du règlement du POS.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par M. et Mme A..., que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune d'Abondance, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants le versement d'une somme de 1 500 euros à M. et Mme A..., d'une part, et à la commune d'Abondance, d'autre part.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les requérants verseront la somme de 1 500 euros à M. et Mme A..., d'une part, et à la commune d'Abondance, d'autre part, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F... B..., à la commune d'Abondance et à M. et Mme C... A....
Délibéré après l'audience du 8 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Thierry Besse, président ;
Mme K... I..., première conseillère ;
Mme J... H..., première conseillère
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
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N° 18LY04562
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