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25/08/2020 | FRANCE | N°19LY04036

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 25 août 2020, 19LY04036


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 16 mai 2019 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par ordonnance n° 1904308 lue le 30 septembre 2019, le président de la 9ème chambre du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 30 octobre 2019, M. B..., représent

par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 9ème chambre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 16 mai 2019 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par ordonnance n° 1904308 lue le 30 septembre 2019, le président de la 9ème chambre du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 30 octobre 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Lyon du 30 septembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté susvisé du 16 mai 2019 du préfet de la Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation après remise d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de quinze jours, à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du préfet de la Loire une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance est irrégulière en ce qu'elle n'est pas motivée et qu'elle a rejeté comme irrecevable sa demande qui n'était pas tardive, l'arrêté du 16 mai 2019 ne lui ayant été notifié que le 20 mai 2019 ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée de l'incompétence de son signataire, est insuffisamment motivée, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la fixation du pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par mémoire enregistré le 19 décembre 2019, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant albanais né en 1979, relève appel de l'ordonnance du 30 septembre 2019 par laquelle le président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté, comme irrecevable, sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 mai 2019 par lequel le préfet de l'Ain l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

2. Aux termes du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) et qui dispose du délai de départ volontaire (...) peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination (...) ". Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire (...) fait courir un délai de quinze jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi (...) notifiées simultanément. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 16 mai 2019 pris par le préfet de l'Ain à l'encontre de M. B... portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi, notifié par lettre recommandée avec accusé de réception, a été présenté à l'adresse mentionnée par M. B..., le 17 mai suivant, ainsi qu'il ressort de l'avis de réception produit devant le tribunal. Toutefois, cet avis de réception n'indique ni la date de distribution, ni la date de réexpédition. M. B... produit pour la première fois en appel le résultat d'une recherche auprès des services de La Poste sur l'avis de réception en cause attestant que le pli a été distribué le 20 mai 2019. Contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, c'est à cette date seulement qu'a commencé à courir le délai de quinze jours susvisé, lequel n'était pas expiré le 3 juin 2019 lorsque l'intéressé a introduit sa requête en annulation devant le tribunal administratif de Lyon. Par suite, l'ordonnance attaquée, qui a rejeté la requête de M. B... comme tardive, est irrégulière et doit être annulée.

4. Il y a lieu pour la cour de statuer sur la demande de première instance de M. B... par la voie de l'évocation.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté a été signé par M. Gérard Lacroix, secrétaire général de la préfecture de la Loire, qui a reçu délégation à cet effet par arrêté du préfet de la Loire du 14 février 2018, publié au recueil spécial des actes administratifs du même jour. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit donc être écarté.

6. En deuxième lieu, l'obligation de quitter le territoire français contestée rappelle les textes sur lesquels le préfet de la Loire s'est fondé pour prendre la décision en litige notamment le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est ainsi suffisamment motivée en droit quand bien elle ne vise pas l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Elle comporte les éléments de fait relatifs aux conditions d'entrée et de séjour de M. B... sur le territoire national et fait état de sa situation familiale. Elle est par suite suffisamment motivée.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré récemment sur le territoire français avec son épouse et leurs deux enfants mineurs. L'appelant ne justifie d'aucune attache privée ou familiale ni d'aucune intégration particulière en France. Son épouse fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. Il n'est en outre pas dépourvu d'attaches privées et familiales en Albanie, son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-huit ans. Rien ne fait donc obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Albanie, pays dont tous les membres de la famille ont la nationalité et où les enfants du couple pourront être scolarisés. Si M. B... se prévaut en appel d'un jugement en assistance éducative rendu le 4 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Saint-Etienne confiant ses deux enfants à la délégation à la vie sociale, cette circonstance est postérieure à la décision en litige. Dans ces conditions, la décision en litige n'a méconnu aucune des stipulations précitées ni n'est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé.

9. En quatrième lieu, en raison de l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la fixation du pays de destination est dépourvue de base légale doit être écarté.

10. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". M. B... n'établit pas la réalité des menaces actuelles et personnelles auxquelles il serait exposé en cas de retour en Albanie et se borne à alléguer des pressions et menaces exercées par sa belle-famille. Par suite, le moyen tiré de la violation, par la décision désignant ce pays comme pays de renvoi, des stipulations précitées doit être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 16 mai 2019 pris à son encontre par le préfet de la Loire portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi. Les conclusions de sa requête d'appel tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte qu'il présente ainsi que celles formulées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1904308 du président de la 9ème chambre du tribunal administratif de Lyon est annulée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon et devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Rémy-Néris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 août 2020.

2

N° 19LY04036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04036
Date de la décision : 25/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : LAWSON- BODY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-25;19ly04036 ?
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