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06/08/2020 | FRANCE | N°19LY03936

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 06 août 2020, 19LY03936


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 1er août 2019 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé son admission au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1905473 lu le 23 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête et un mémoire enregistrés les 23 octobre

2019 et 29 janvier 2020, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 1er août 2019 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé son admission au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1905473 lu le 23 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête et un mémoire enregistrés les 23 octobre 2019 et 29 janvier 2020, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 septembre 2019 ainsi que l'arrêté du 1er août 2019 pris par le préfet de la Haute-Savoie ;

2°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code précité dès lors qu'eu égard à son état de santé, le préfet devait saisir pour avis le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- la fixation du pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de la Haute-Savoie, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit d'observations.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 27 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante angolaise née en 1978, déclare être entrée irrégulièrement en France en mars 2018. Elle a formulé une demande d'asile, laquelle a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 26 juin 2019. Par arrêté du 1er août 2019, le préfet de la Haute-Savoie a refusé son admission au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de séjour :

2. Mme A... reprend en cause d'appel le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision portant refus de séjour du 1er août 2019, sans l'assortir d'élément de fait ou de droit nouveaux. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par le premier juge.

Sur la mesure d'éloignement et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés :

3. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 511-1 du même code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 5114 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté (...) au vu, d'une part, d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que dès lors qu'elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis laissant craindre qu'un étranger en situation irrégulière ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement en raison de son état sanitaire, l'autorité préfectorale doit préalablement et alors même que l'intéressé n'a pas sollicité le bénéfice d'une prise en charge médicale en France, recueillir préalablement l'avis du collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

5. Pour soutenir que son état de santé faisait obstacle à son éloignement et justifiait la saisine pour avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, préalablement à l'édiction de cette mesure, Mme A... produit deux certificats médicaux, postérieurs à la mesure d'éloignement, des 13 août 2019 et 13 septembre 2019, mentionnant qu'elle souffre d'une pathologie chronique invalidante nécessitant des soins lourds ainsi qu'un avis émis, le 25 septembre 2019, par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indiquant que son état nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir des conséquences exceptionnellement graves et qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme A... aurait été mise à même de communiquer au préfet, avant l'édiction de la mesure d'éloignement, des informations relatives à son état de santé et il n'est pas contesté que les pièces qu'elle produit révèlent la gravité de son état de santé à la date de la mesure d'éloignement en litige. Par suite, le préfet de la Haute-Savoie ne pouvait l'éloigner sans consulter préalablement le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. La mesure d'éloignement en litige doit, dans les circonstances particulières de l'espèce, être annulée ainsi que par voie de conséquence la décision du 1er août 2019 fixant le pays de renvoi.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 1er août 2019 portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi et à en obtenir l'annulation dans cette mesure.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement, mais seulement, que le préfet de la Haute-Savoie remette à Mme A... une autorisation provisoire de séjour et réexamine sa situation au regard des règles relatives au séjour, dans un délai de deux mois suivant la notification de cet arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer d'astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. Dans les circonstances de l'espèce, et en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement au conseil de Mme A... d'une somme de 800 euros, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1905473 du 23 septembre 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulé en tant qu'il rejette la demande d'annulation de l'obligation faite à Mme A... de quitter le territoire dans les trente jours et de la fixation du pays de renvoi contenues dans l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 1er août 2019.

Article 2 : L'obligation de quitter le territoire français dans les trente jours et la fixation du pays de renvoi contenues dans l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 1er août 2019 pris à l'encontre de Mme A... sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Savoie de réexaminer la situation de Mme A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, après remise d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'État versera à Me C... une somme de 800 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Rémy-Néris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 août 2020.

2

N° 19LY03936


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03936
Date de la décision : 06/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : DJINDEREDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-06;19ly03936 ?
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