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07/07/2020 | FRANCE | N°19LY03063

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 07 juillet 2020, 19LY03063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Le Flocon a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2015 par lequel le maire de la commune des Allues a délivré à la SARL Gambetta Distribution un permis de construire un chalet de huit logements, l'arrêté du 19 août 2015 par lequel il a transféré ce permis à la SCCV Mérifraisse, ainsi que les décisions implicites rejetant ses demandes datées du 24 octobre 2016 tendant au retrait de ces permis de construire.

Par un jugement n° 1701220 du 11 juin 20

19, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Le Flocon a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2015 par lequel le maire de la commune des Allues a délivré à la SARL Gambetta Distribution un permis de construire un chalet de huit logements, l'arrêté du 19 août 2015 par lequel il a transféré ce permis à la SCCV Mérifraisse, ainsi que les décisions implicites rejetant ses demandes datées du 24 octobre 2016 tendant au retrait de ces permis de construire.

Par un jugement n° 1701220 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 août 2019, la SCI Le Flocon, représentée par la SCP Bignon Lebray, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 juin 2019 ;

2°) d'annuler ces arrêtés des 22 janvier 2015 et 19 août 2015, ainsi que les décisions implicites rejetant ses demandes tendant au retrait de ces arrêtés ;

3°) de mettre à la charge de la commune des Allues la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le permis de construire ayant été obtenu par fraude, il pouvait être retiré à tout moment ; la demande était frauduleuse, le pétitionnaire ayant volontairement minoré le nombre d'arbres à replanter, afin de faire échec à l'application des stipulations de l'article 9 du cahier des charges du lotissement et aux dispositions de l'article U 13 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- le permis de construire a été délivré sans avis préalable du service départemental d'incendie et de secours ;

- les prescriptions techniques du permis sont insuffisamment motivées ;

- le permis de construire méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le projet étant exposé à un risque d'incendie, et l'accès projeté étant dangereux ;

- le permis méconnaît l'article U 13-2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- le permis méconnaît l'article 1er du cahier des charges du lotissement, qui limite à un par lot le nombre de logements.

Par un mémoire enregistré le 14 janvier 2020, la SARL Gambetta Distribution et la SCCV Mérifraisse, représentées par Me A..., concluent au rejet de la requête et à ce que la requérante leur verse une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les conclusions dirigées contre le permis de construire sont tardives et, par suite, irrecevables ;

- la SCI Le Flocon ne justifie pas d'un intérêt pour agir ;

- le dossier de demande, qui comporte de nombreuses photographies du terrain d'assiette du projet, ne comprend pas de mentions erronées, même si le nombre d'arbres n'a pas été dénombré, et n'a pu être de nature à induire en erreur l'administration sur la légalité du permis de construire ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire enregistré le 12 mars 2020, la commune des Allues, représentée par la SELARL Philippe Petit et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable, au regard des dispositions de l'article R. 600-1 du code de justice administrative ;

- la demande de première instance, en ce qu'elle était dirigée contre le permis de construire délivré le 22 janvier 2015, était tardive et, par suite, irrecevable ;

- le permis de construire n'a pas été obtenu par fraude, de sorte qu'il ne pouvait être retiré ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- et les observations de Me F... pour la SCI Le Flocon ainsi que celles de Me B... pour la commune des Allues ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 22 janvier 2015, le maire des Allues a délivré à la SARL Gambetta Distribution un permis de construire en vue de l'édification d'un chalet comprenant huit logements, au sein du lotissement des Frasses. Le 19 août 2015, il a transféré ce permis à la SCCV Mérifraisse. Par un recours gracieux en date du 24 octobre 2016, la SCI Le Flocon a demandé l'annulation de ces permis, ainsi que leur retrait. La SCI Le Flocon relève appel du jugement du 11 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés, ainsi que de la décision implicite refusant de les retirer.

Sur les conclusions dirigées contre les arrêtés du 22 janvier 2015 et du 19 août 2015 :

2. La SCI Le Flocon ne conteste pas l'irrecevabilité pour tardiveté qui a été opposée par les premiers juges à sa demande dirigée contre l'arrêté du 22 janvier 2015 délivrant un permis de construire à la SARL Gambetta Diffusion et contre celui du 19 août 2015 transférant ce permis à la SCCV Mérifrisse. Ces conclusions doivent par suite être rejetées.

Sur le refus de retirer les arrêtés du 22 janvier 2015 et 19 août 2015 :

3. Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire ".

4. Un tiers justifiant d'un intérêt à agir est recevable à demander, dans le délai du recours contentieux, l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude, quelle que soit la date à laquelle il l'a saisie d'une demande à cette fin. Dans un tel cas, il incombe au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, d'une part, de vérifier la réalité de la fraude alléguée et, d'autre part, de contrôler que l'appréciation de l'administration sur l'opportunité de procéder ou non à l'abrogation ou au retrait n'est pas entachée d'erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter soit du maintien de l'acte litigieux soit de son abrogation ou de son retrait.

5. La fraude suppose, pour être caractérisée, que le pétitionnaire ait procédé à des manoeuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet. La circonstance qu'un dossier de demande de permis comporterait des mentions erronées ne permet pas par elle-même de caractériser une fraude.

6. La SCI Flocon soutient que les pétitionnaires ont délibérément minoré le nombre d'arbres existants sur le terrain avant travaux, afin d'échapper aux règles relatives à la plantation des arbres en remplacement de ceux coupés fixées par l'article U 13-2 du règlement du plan local d'urbanisme, ainsi que celles fixées par le règlement du plan de lotissement. Elle se prévaut d'un constat d'huissier de juin 2016 qui mentionne la présence d'environ quatre-vingts arbres, alors que seuls vingt-six arbres sont figurés sur le plan de masse du dossier. Selon ce constat, dressé de l'extérieur de la propriété, la majorité des arbres sont situés vers les limites de terrain, notamment dans ou à proximité de la bande de terrain formant talus en bordure de route. Ainsi ce constat ne permet pas d'établir que le nombre d'arbres mentionné dans la demande de permis serait inexact. En tout état de cause, le dossier de demande de permis de construire fait état du caractère boisé de la parcelle et comporte plusieurs documents photographiques ayant permis au service instructeur de porter une appréciation sur les caractéristiques du terrain. Enfin, le pétitionnaire avait indiqué qu'il entendait remplacer les plantations existantes, " dans la mesure du possible ", ce que prévoient les dispositions de l'article U 13 du règlement du PLU, lesquelles n'imposent pas le remplacement de toutes les plantations existantes. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier, à supposer les mentions de la demande de permis de construire erronées, que le pétitionnaire aurait procédé à des manoeuvres de nature à induire en erreur l'administration. Par suite, le permis n'ayant pas été obtenu par fraude, le maire des Allues ne pouvait le retirer au-delà du délai fixé par les dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme.

7. Il résulte de ce qui précède que la SCI Le Flocon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la SCI Le Flocon, partie perdante, demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés soit mise à la charge des défendeurs. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Le Flocon la somme de 1 500 euros à verser à la SARL Gambetta Distribution et à la SCCV Mérifraisse, d'une part, à la commune des Allues, d'autre part.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Le Flocon est rejetée.

Article 2 : La SCI Le Flocon versera à la SARL Gambetta Distribution et à la SCCV Mérifraisse, d'une part, à la commune des Allues, d'autre part, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Le Flocon, à la commune des Allues, à la SARL Gambetta Distribution et à la SCCV Mérifraisse.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme E... G..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme D... C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2020.

2

N° 19LY03063

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03063
Date de la décision : 07/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : BIGNON LEBRAY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-07-07;19ly03063 ?
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