Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. H... et Mme G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 25 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Morillon a accordé un permis de construire à M. B..., ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux du 22 juin 2016.
Par un jugement n° 1605834 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 25 avril 2016 et la décision implicite.
Procédure devant la cour
Par une requête un mémoire complémentaire enregistrés le 21 août 2018 et le 18 octobre 2019, M. et Mme C..., représentés par la SCP Alain et Alex Bouvard, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 5 juillet 2018 et de rejeter la demande de M. H... et Mme G... ;
2°) de mettre à la charge de M. H... et Mme G... la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- M. H... et Mme G... n'ont pas intérêt pour agir ;
- c'est à tort que les premiers juges ont fait droit au moyen tiré de la violation de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ; le projet s'inscrit le long du chemin communal et s'insère dans un groupe d'une dizaine de chalets, dont certains récents, bâtis de part et d'autre de la voie communale, laquelle ne constitue pas une coupure de l'urbanisation ; le permis de construire a été obtenu dans le délai de validité de la déclaration préalable du 28 août 2015 autorisant l'allotissement du terrain en vue de la construction ; dès lors, le maire ne pouvait pas se fonder sur cette disposition pour refuser le permis de construire en litige ;
- le contenu du dossier de demande répond aux exigences des articles R. 431-7, R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme ;
- le projet ne méconnaît pas les articles UB3 et UB6, UB11 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune ni l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense enregistrés le 13 septembre et le 31 octobre 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. H... et Mme G..., représentés par Me E..., concluent au rejet de la requête, en toute hypothèse à l'annulation du permis délivré à M. B... et à ce qu'une somme d'un euro symbolique soit mise à la charge de la commune de Morillon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que :
- ils ont intérêt pour agir, le projet est à proximité immédiate de leur habitation et engendrera des nuisances de vue ; ils ont acquis leur terrain de M. et Mme C... avant que ces derniers n'obtiennent l'autorisation d'allotir quatre lots entourant leur chalet ;
- le projet n'est pas conforme aux articles R. 431-7, R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme ; toutes les côtes de même que les modalités de raccordement aux différents réseaux ne sont pas mentionnés dans le plan de masse ;
- le projet méconnaît l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ; la zone d'implantation du projet est très faiblement construite ; le versant aval de la voie communale est composé de vieilles fermes et de prés et est préservé de toute construction récente ; les constructions nouvelles s'implantent en amont de la route ; la commune de Morillon s'est opposée à l'allotissement de terrains voisins pour ce motif par arrêté du 12 décembre 2018 ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB3 est abandonné ;
- le projet méconnaît l'article UB6 ;
- le projet méconnaît l'article UB11 du règlement du POS et l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ; la construction projetée ne s'insère pas dans son environnement naturel et préservé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 14 novembre 2019 par une ordonnance du même jour en application des dispositions combinée des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme J... I..., première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour M. H... et Mme G... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a obtenu un permis de construire puis un permis de construire modificatif du maire de Morillon par arrêtés du 25 avril et 11 août 2016 pour la construction d'un chalet au lieudit Grangette. Ce permis de construire a été transféré à M. et Mme C... par arrêté du 26 juin 2017. Par jugement du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de M. H... et Mme G..., annulé ce permis et la décision implicite du maire de Morillon rejetant le recours gracieux de ces derniers. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement.
Sur l'intérêt pour agir de M. H... et Mme G... :
2. Il ressort des pièces du dossier que la construction de M. H... et Mme G... est contiguë au projet alors que les environs sont marqués par une urbanisation diffuse au sein d'une vaste zone naturelle et agricole. Les intimés font valoir un préjudice de jouissance lié à la perte de vues qu'engendrera le projet de leur chalet. La circonstance que les intimés ne résident que ponctuellement au sein de leur chalet et que la façade de celui-ci donnant sur le projet ne comporte qu'un nombre d'ouvertures restreintes ne suffisent pas pour écarter leur intérêt à contester le permis de construire en litige.
Sur le bien-fondé du moyen retenu par le jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées. ".
4. Au sens de ces dispositions, un groupe de constructions traditionnelles ou d'habitations doit s'entendre comme un groupe de plusieurs bâtiments qui, bien que ne constituant pas un hameau, se perçoivent, compte tenu de leur implantation les uns par rapport aux autres, notamment de la distance qui les sépare, de leurs caractéristiques et de la configuration particulière des lieux, comme appartenant à un même ensemble. Pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant.
5. Pour annuler la décision du maire de Morillon du 25 avril 2016, les premiers juges se sont fondés sur la circonstance que la seule maison à proximité du projet est la maison des intimés, que les autres constructions existantes du secteur sont situées de l'autre côté d'une voie qui constitue une rupture de l'urbanisation et que le maire avait fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme citées au point 3.
6. Il ressort des pièces du dossier que le projet s'implante au niveau d'un coude de la voie communale n° 6 qui finit en impasse 300 mètres plus à l'ouest dans une zone éloignée du centre bourg de Morillon. A l'est du projet et à proximité immédiate s'implante le chalet des intimés, lequel présente un caractère isolé au sein un vaste secteur naturel et agricole. Sur cette portion terminale de la voie communale n° 6 se diffuse une urbanisation très aérée et de type chalet ou ferme traditionnelle savoyards, ponctuée d'une construction récente, comptant en totalité une dizaine d'habitations lesquelles, par leurs caractéristiques et leur implantation sus rappelée, ne constituent pas un hameau ou un groupe d'habitation au sens des dispositions précitées. Il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé le permis de construire du 25 avril 2016 ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux des intimés.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demandent M. et Mme C... au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de M. H... et Mme G... qui ne sont pas parties perdantes en appel. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas a lieu d'appliquer ces mêmes dispositions à l'encontre de la commune de Morillon.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. H... et Mme G... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... H... et Mme F... G... épouse H... ainsi qu'à M. et Mme D... et Michelle C....
Délibéré après l'audience du 23 juin 2020 à laquelle siégeaient :
Mme K... M..., présidente ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme J... I..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 7 juillet 2020.
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N° 18LY03232
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