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07/07/2020 | FRANCE | N°18LY02943

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 07 juillet 2020, 18LY02943


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par une première demande, Mme K... C..., MM. J... et A... F..., ainsi que Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 28 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Veauchette a rejeté la demande de permis d'aménager déposée par la société Chazelle Construction pour la création d'un lotissement de dix-neuf lots.

Par une seconde demande, Mme K... C..., MM. J... et A... F..., ainsi que Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l

a commune de Veauchette à leur verser la somme de 525 615 euros en réparation de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par une première demande, Mme K... C..., MM. J... et A... F..., ainsi que Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 28 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Veauchette a rejeté la demande de permis d'aménager déposée par la société Chazelle Construction pour la création d'un lotissement de dix-neuf lots.

Par une seconde demande, Mme K... C..., MM. J... et A... F..., ainsi que Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la commune de Veauchette à leur verser la somme de 525 615 euros en réparation des préjudices imputables aux refus de permis d'aménager qui ont été successivement opposés, et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter du 11 février 2016 et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1604751-1606855 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Lyon a, après les avoir jointes, rejeté ces deux demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 27 juillet 2018 et le 11 août 2019, Mme K... C... et autres, représentés par la Selarl BLT Droit Public, demandent à la cour :

1°) d'annuler ou de réformer ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 mai 2018 ;

2°) d'annuler ce refus de permis d'aménager du 28 avril 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Veauchette, la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le refus de permis d'aménager est insuffisamment motivé ; le maire se contente de reprendre les termes de l'avis défavorable rendu par la cellule risque de la direction départementale des territoires (DDT) du 22 avril 2016 sans s'en approprier le contenu et ne mentionne que de manière succincte les considérations de fait qui en constituent le fondement ;

- le maire ne pouvait lui opposer un refus fondé sur l'existence d'un risque majeur en cas de crue de la Loire sans entacher sa décision d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation ; ce risque ne correspond pas à celui identifié par le plan de prévention des risques naturels et de prévention des inondations en vigueur (PPRNPI), a été écarté pour les mêmes terrains dans une décision du tribunal administratif devenu définitif et n'est aucunement étayé par la commune ; son projet prévoit des mesures conformes au risque identifié dans le PPRNPI et les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme permettent d'accorder un permis de construire assorti de prescriptions particulières.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 juillet 2019, la commune de Veauchette, représentée par la Selarl Philippe Petit et associés, conclut au rejet de la requête et de la demande de Mme C... et autres et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise solidairement à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions à fin d'indemnisation n'ont pas été reprises en appel et le jugement ne peut plus être contesté sur ce point ;

- le refus de permis en litige est suffisamment motivé ;

- le maire pouvait, sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme s'opposer à la réalisation du projet litigieux alors même que le PPRNPI en vigueur classe en zone " soumise à des aléas limités " les parcelles d'assiette du projet ; le refus litigieux se fonde sur les constats effectués par la DDT lors des crues de 2008 en ce qui concerne le niveau de submersion et les vitesse d'eau, dont il n'est pas démontré qu'ils soient erronés ;

- les requérants ne peuvent se prévaloir de l'autorité de la chose jugée tirée du jugement du 14 décembre 2014 dès lors que les conditions relatives à l'identité de cause et des parties ne sont pas remplies ; la commune fait état de circonstances de fait nouvelles relatives aux risques d'inondation ;

- les mesures envisagées par le projet sont fondées sur le PPRNPI en vigueur, dont il a été démontré qu'il ne prend pas suffisamment en compte les risques d'inondation actuels et ne suffisent pas à pallier ces risques.

La clôture de l'instruction a été fixée au 7 octobre 2019 par une ordonnance du même jour en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme H... G..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- et les observations de Me E... pour Mme C... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... et autres ont, par deux requêtes distinctes, demandé au tribunal administratif de Lyon d'une part, d'annuler l'arrêté du 28 avril 2016 par lequel le maire de la commune de Veauchette a rejeté la demande de permis d'aménager déposée par la société Chazelle Construction pour la création d'un lotissement de dix-neuf lots sur des parcelles leur appartenant en indivision et, d'autre part, de condamner la commune de Veauchette à leur verser la somme de 525 615 euros en réparation des préjudices imputables aux refus de permis d'aménager qui ont été successivement opposés à la société Chazelle Construction, et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter du 11 février 2016 et de leur capitalisation. Par un jugement du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Lyon a, après avoir les avoir jointes, rejeté ces demandes. Mme C... et autres relèvent appel de ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 avril 2016 portant refus de permis d'aménager à la société Chazelle Construction.

Sur la légalité de l'arrêté du 28 avril 2016 :

2. En premier lieu, l'arrêté en litige comporte les considérations de droit et de fait qui le fondent et est, par suite suffisamment motivé. La circonstance que le maire de Veauchette se soit approprié les constats matériels observés lors des crues de 2008 mentionnés dans l'avis de la direction des territoires (DDT) du 21 avril 2016 est sans incidence sur cette motivation.

3. En second lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

4. Il incombe à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si le projet est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, en application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme citées au point précédent. Si tel est le cas, elle peut refuser pour ce motif l'autorisation sollicitée, alors même que le terrain d'assiette du projet est classé en zone constructible et qu'aucun plan de prévention des risques naturels (PPRN) n'aurait classé ce terrain dans une zone à risques.

5. Pour refuser de délivrer le permis en litige, le maire de Veauchette a fait application des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en retenant que le projet était de nature à porter atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques. Il s'est pour cela fondé sur la circonstance que l'implantation de nouvelles constructions sur ce site aurait pour effet de modifier l'écoulement et les hauteurs des eaux et d'augmenter la vulnérabilité des biens et des personnes sur le site mais aussi à proximité en cas de crue de la Loire.

6. Pour contester cette appréciation, les requérants se prévalent de ce que la PPRN n'a pas fait l'objet d'une révision pour intégrer ce nouveau risque d'inondation, que les constats de la DDT sur les conséquences des crues trentennales en 2008 sur le terrain d'assiette ne sont étayées par aucune étude hydraulique, comme cela avait déjà été relevé par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 décembre 2014 devenu définitif et que les mesures du permis, fondées sur les études jointes à l'appui de la demande, permettaient de pallier ce risque.

7. Il ressort des pièces du dossier, notamment des constats effectués par les agents de la DDT lors des crues de novembre 2008, d'une étude réalisée en 2009 par le cabinet Hydratec ainsi que des nombreux arrêtés reconnaissant la commune en situation de catastrophe naturelle en 1997, 2003 et 2008, que les crues de Loire ont augmenté en intensité et en fréquence et que les crues trentennales sont comparables dans leurs effets à ceux retenus pour les crues centennales dans le PPRN en vigueur. Ces constats ne sont contredits ni par le jugement du tribunal administratif du 18 décembre 2014, lequel concernait une décision du préfet de la Loire relative à une déclaration de rejet des eaux pluviales, ni par les études produites par la société pétitionnaire à l'appui de sa demande de permis, lesquelles relèvent les niveaux des crues centennales par rapport à l'altitude du terrain naturel en divers points et font apparaître que, lors de ce type de crues, une large partie du terrain d'assiette du lotissement est mis sous l'eau à hauteur de cinquante centimètres et que les parties les plus hautes de ce terrain sont concernées par une bande d'inconstructibilité de quinze mètres. En outre, le terrain d'assiette du projet, par sa situation en contrebas d'une route et dans le prolongement de bassins de rétention d'eau, aggrave le risque d'inondation en cas de crue de la Loire pour la population existante ainsi que pour les futurs résidents. Dans ces conditions, eu égard à l'importance du projet lequel prévoit un lotissement de dix-neuf lots et compte tenu de ces éléments qui sont de nature à démontrer que le projet sera susceptible de comporter des risques graves en cas de crues trentennales et centennales, dont le niveau sera plus important que celui relevé dans le PPRN en vigueur, le maire a pu sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation refuser de délivrer le permis d'aménager en litige. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que des prescriptions pourraient réduire ou supprimer ce risque.

8. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande dirigée contre le refus de permis d'aménager du 28 avril 2016.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demandent les requérants au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune de Veauchette, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge des requérants le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Veauchette.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme K... C... et autres est rejetée.

Article 2 : Les requérants verseront à La commune de Veauchette la somme de 2 000 euros à au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme K... C..., MM. J... et A... F... et M... B... D... ainsi qu'à la commune de Veauchette.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme I... L..., présidente de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme H... G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2020.

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N° 18LY02943

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY02943
Date de la décision : 07/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles générales d'utilisation du sol. Règles générales de l'urbanisme. Modalités d`application des règles générales d`urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CABINET PHILIPPE PETIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-07-07;18ly02943 ?
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