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06/07/2020 | FRANCE | N°19LY03960

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 06 juillet 2020, 19LY03960


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 23 septembre 2019 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le préfet du Rhône l'a assigné à résidence dans le département du

Rhône.

Par jugement n° 1907413 lu le 3 octobre 2019, le magistrat désigné par le prési...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 23 septembre 2019 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel le préfet du Rhône l'a assigné à résidence dans le département du Rhône.

Par jugement n° 1907413 lu le 3 octobre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés du préfet du Rhône du 23 septembre 2019.

Procédure devant la cour

Par requête, enregistrée le 24 octobre 2019, le préfet du Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1907413 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 3 octobre 2019 ;

2°) de rejeter la demande de M. A... devant le tribunal.

Il soutient que c'est à tort que le premier juge a considéré que la décision d'obligation de quitter le territoire français méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que la décision ne porte pas atteinte à la vie privée et familiale de M. A... qui ne justifie pas d'une vie privée et familiale ancienne, intense et enracinée sur le sol français ni d'une intégration sociale en France.

Par mémoire enregistré le 12 décembre 2019, présenté pour M. A..., il conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'État le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que le moyen soulevé par le préfet n'est pas fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 décembre 2019, du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur,

- les observations de Me C..., pour M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 3 août 1977, de nationalité sénégalaise, qui déclare être entré sur le territoire français en 2000 et qui avait épousé, le 22 janvier 2005, une ressortissante française avant que cette union, dont sont issus deux enfants nés respectivement le 22 octobre 2006 et le 3 novembre 2009, ne prenne fin en 2013, a été titulaire d'une carte de séjour du 21 juillet 2006 au 29 décembre 2014, dont il n'a pas sollicité par la suite le renouvellement. Par un arrêté du 24 septembre 2019, le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel M. A... serait susceptible d'être renvoyé et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de six mois. Par un arrêté du même jour, la même autorité a décidé de l'assigner à résidence dans le département du Rhône pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet du Rhône relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ses arrêtés du 23 septembre 2019.

2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour (...) et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier et n'est au demeurant pas contesté qu'à la date de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français en litige, M. A... se maintenait sur le territoire français sans avoir demandé le renouvellement du dernier titre de séjour qui lui avait été délivré, à l'expiration de ce titre le 29 décembre 2014. Il entrait donc dans le champ d'application des dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il ressort toutefois également de ces pièces qu'ainsi que l'a relevé le premier juge, M. A... était présent, à la date des arrêtés en litige, depuis au moins quatorze années en France, où il avait été autorisé à séjourner, sous couvert de récépissés de demande de titre de séjour ou de titres de séjour, du 21 juillet 2006 au 29 décembre 2014, soit plus de huit ans, et où il s'est marié en 2005 avec une ressortissante française dont il a eu deux enfants de nationalité française nés en 2006 et 2009. Il ressort également d'une ordonnance de non-conciliation du tribunal de grande instance de Lyon rendue le 23 août 2013 que, s'il est séparé de son épouse depuis au moins 2013, M. A... dispose d'un droit de visite de ses enfants mineurs un samedi sur deux dont il n'est pas démontré qu'il ne l'assurerait pas effectivement, quand bien même l'ordonnance de non-conciliation avait prescrit un lieu de rencontre neutre, en l'absence de domicile de l'intéressé, alors, en outre, qu'il soutient que les membres de sa famille résident en France, et qu'il n'a plus de famille au Sénégal. Dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard notamment à l'ancienneté de la présence en France de M. A..., à la durée de son séjour régulier et à la présence de ses deux enfants mineurs de nationalité française en France, la décision contestée du préfet du Rhône a porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président a annulé ses décisions du 23 septembre 2019 faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination avec interdiction de retour sur le territoire français et l'a assigné à résidence. Sa requête doit, en conséquence, être rejetée.

6. M. A... étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, son avocat peut prétendre au bénéfice des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Dans les circonstances de l'espèce, l'État versera, en application de ces dispositions, la somme de 1 000 euros à Me C..., sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Rhône est rejetée.

Article 2 : En application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'État versera la somme de 1 000 euros à Me C..., sous réserve que celle-ci renonce à percevoir le bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 juillet 2020.

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N° 19LY03960


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03960
Date de la décision : 06/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : RICHON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-07-06;19ly03960 ?
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