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23/06/2020 | FRANCE | N°18LY01926

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 23 juin 2020, 18LY01926


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. G... D... et Mme H... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2015, par lequel le maire de Châteauneuf-sur-Isère a refusé de leur délivrer un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1601148 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et mis à la charge de la commune de Châteauneuf-sur-Isère une somme de 1 000 euros à verser à M. D... et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admi

nistratif.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 mai 2018, la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. G... D... et Mme H... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2015, par lequel le maire de Châteauneuf-sur-Isère a refusé de leur délivrer un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1601148 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et mis à la charge de la commune de Châteauneuf-sur-Isère une somme de 1 000 euros à verser à M. D... et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 mai 2018, la commune de Châteauneuf-sur-Isère, représentée par la SCP Deygas Perrachon et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 mars 2018 ;

2°) de rejeter la demande de M. D... et Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de M. D... et Mme B..., la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce que le tribunal a estimé, les modifications prévues par le permis de construire modificatif en litige ne sont pas limitées ; le changement de destination bien qu'autorisé par un permis de construire antérieur ne permettait pas au permis modificatif de s'affranchir de la condition relative à la préservation du caractère architectural et patrimonial du bâtiment, mentionnée à l'article N-2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- les modifications portant sur la corniche en béton, l'agrandissement des ouvertures, les encadrements et la toiture ne permettent pas au projet de s'insérer dans les lieux et paysages avoisinants en méconnaissance des articles N-11 et R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

- le refus de permis en litige a été signé par l'adjoint au maire, lequel disposait d'une délégation de signature régulière et exécutoire.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 octobre 2018, M. D... et Mme B..., représentés par la Selarl Fayol et Associés, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande de permis de construire modificatif ne porte pas sur un changement de destination, l'article N-2 ne leur est donc pas applicable ; le permis de construire modificatif n'a pas pour objet de modifier l'appareillage des pierres entourant les ouvertures, lequel a été autorisé par le permis de construire initial ;

- le projet ne porte pas sur une construction patrimoniale à protéger au sens du PLU ; le permis de construire modificatif n'entraîne que de faibles modifications par rapport au permis de construire initial et le projet ainsi modifié s'insère dans son environnement.

La clôture de l'instruction a été fixée au 26 avril 2019 par une ordonnance du 4 avril 2019 en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme I... F..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- et les observations de Me C... représentant la commune de Châteauneuf-sur-Isère ainsi que celles de Me kudeliko, substituant Me A..., représentant M. D... et Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 1er avril 2014, le maire de Châteauneuf-sur-Isère a délivré à M. D... et Mme B... un permis de construire pour démolir et réhabiliter des constructions regroupant des bâtiments d'exploitation agricole et son habitation accolée sur une parcelle cadastrée XD 85 située au lieudit les Oboussier-Ouest et classée en zone naturelle. Le 28 mai 2014, un arrêté interruptif de travaux a été pris par le maire de Châteauneuf-sur-Isère après qu'un agent assermenté ait constaté que les travaux réalisés n'étaient pas conformes au permis de construire délivré. Lesdits travaux comportaient la démolition totale de l'habitation existante alors que le projet ne prévoyait qu'un abaissement de la hauteur, la démolition d'une dépendance accolée à l'habitation existante alors que le projet ne comprenait que le réaménagement de ce bâtiment en logement et la construction d'un sous-sol alors que le projet ne faisait aucune mention de la création d'un sous-sol. M. D... et Mme B... ont déposé une nouvelle demande qui a donné lieu à un permis de construire du 26 août 2014. Ce nouveau permis entérinait la démolition partielle d'une grande partie des bâtiments anciens et l'abaissement de la hauteur des bâtiments subsistants, la création d'une extension, le comblement du sous-sol et la conservation des encadrements d'ouvertures et des chaînes d'angle en pierre de molasse. Après qu'un agent assermenté ait à nouveau constaté que les travaux qui se poursuivaient n'étaient pas conformes à ce permis de construire, le maire a le 24 février 2015 notifié aux pétitionnaires un courrier sur le fondement de l'article R. 462-9 du code de l'urbanisme les mettant en demeure de réaliser des travaux afin de rendre la construction conforme au permis délivré le 26 août 2014. M. D... et Mme B... ont alors déposé une demande de permis de construire modificatif que le maire de Châteauneuf-sur-Isère a refusé de délivrer par arrêté du 16 décembre 2015. La commune de Châteauneuf-sur-Isère relève appel du jugement du 29 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 16 décembre 2015 à la demande de M. D... et Mme B....

Sur le bien-fondé des moyens d'annulation retenus par les premiers juges :

2. Pour contester le jugement, la commune de Châteauneuf-sur-Isère soutient que les motifs opposés par le maire, tirés de la méconnaissance des articles N-2 et N-11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ainsi que de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme pouvaient légalement fonder le refus de permis modificatif en litige.

3. L'article N-2 du règlement prévoit qu'" à condition que le changement de destination ne compromette pas l'activité forestière, sont également autorisés dans le respect des conditions suivantes : (...) / Le changement de destination à des fins d'habitation d'une construction présentant des caractéristiques architecturales traditionnelles autre qu'une construction à ossature légère ou à caractère précaire, et existante à la date d'approbation de la révision du PLU, à condition de préserver le caractère architectural et patrimonial du bâtiment, et que la surface de plancher après travaux soit limitée à 250m². ".

4. Un permis de construire modificatif portant sur un accroissement des dimensions d'une construction ayant auparavant fait l'objet d'un permis de construire ne peut être légalement délivré que lorsque les transformations prévues, rapportées à l'importance globale du projet tel qu'il a été initialement autorisé, n'en altèrent pas la conception générale. Il appartient à cet effet à l'autorité compétente et au juge administratif d'apprécier notamment si ces transformations n'aggravent pas substantiellement l'impact visuel de la construction dans les espaces proches.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'implantation et les volumes du projet dont il est demandé la modification ont été fixées par le permis du 26 août 2014. Toutefois, les changements introduits par la demande de permis en litige, qui consistent à remplacer la passe de toiture par une corniche en béton moulé et accroître l'altitude à l'égout de toiture, à augmenter les ouvertures sur la façade Sud-Est et diminuer celles en façade Nord-Ouest et à transformer la structure de la toiture en la passant de deux à trois pans sur les façades orientées au Sud, modifient substantiellement l'aspect extérieur du bâtiment et ne permettent pas de conserver les caractéristiques architecturales et patrimoniales de l'ancien bâtiment agricole tel qu'autorisé par le permis de construire du 26 août 2014. Dans ces conditions, le motif de refus du maire de la commune, fondé sur la méconnaissance de l'article N-2 du règlement du PLU précité au point 3, n'est pas entaché d'erreur d'appréciation.

6. Il ressort des pièces du dossier que le maire de Châteauneuf-sur-Isère aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif évoqué aux points 3 à 5.

7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Châteauneuf-sur-Isère est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé le refus de délivrer le permis de construire modificatif du 16 décembre 2015. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner l'autre moyen soulevé par M. D... et Mme B....

8. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été signé par M. E..., adjoint à l'urbanisme, titulaire d'une délégation de fonctions à cette fin en vertu de l'arrêté du 10 avril 2014. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire du refus de permis manque en fait et doit être écarté.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Châteauneuf-sur-Isère est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté de son maire du 16 décembre 2015 et à demander l'annulation du jugement attaqué ainsi que le rejet de la demande M. D... et Mme B....

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. D... et Mme B... demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune de Châteauneuf-sur-Isère, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de M. D... et Mme B... le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Châteauneuf-sur-Isère.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 mars 2018 est annulé.

Article 2 : Les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D... et Mme B... dirigées contre le refus de permis de construire modificatif du 16 décembre 2015 sont rejetées.

Article 3 : M. D... et Mme B... verseront la somme de 2 000 euros à la commune de Châteauneuf-sur-Isère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Châteauneuf-sur-Isère ainsi qu'à M. G... D... et Mme H... B....

Délibéré après l'audience du 26 mai 2020 à laquelle siégeaient :

Mme J... K..., présidente de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme I... F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 23 juin 2020.

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N° 18LY01926

dm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01926
Date de la décision : 23/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : FAYOL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-23;18ly01926 ?
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