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18/06/2020 | FRANCE | N°19LY03911

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 18 juin 2020, 19LY03911


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 31 mars 2019, par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français durant dix-huit mois.

Par un jugement n° 1902991 du 8 juillet 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

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Par une requête enregistrée le 18 octobre 2019, M. D..., représenté par Me C..., demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 31 mars 2019, par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français durant dix-huit mois.

Par un jugement n° 1902991 du 8 juillet 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 octobre 2019, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 juillet 2019 ;

2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon ;

3°) à titre subsidiaire d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;

4°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut de réexaminer sa demande dans le même délai, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le premier juge omet de statuer sur les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 311-2 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a opéré d'office une substitution de motifs en écartant le moyen tiré de la méconnaissance du II de l'article L. 511-1 au motif d'une menace à l'ordre public alors que la décision refusant un délai de départ volontaire était motivée par un risque que l'intéressé se soustraie à son obligation de quitter le territoire français ;

- il a également procédé à une substitution de base légale sans en informer les parties ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il a commis une erreur de fait en affirmant qu'il n'était présent que depuis cinq mois à la date de l'arrêté ;

- il a méconnu son droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux et l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il a méconnu l'article R. 311-2 en prenant cette décision avant l'expiration d'un délai de deux mois suivant son dix-huitième anniversaire ;

- il ne se situait pas dans une des situations visées par le 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement duquel a été prise la décision ;

- l'arrêté méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision précédente ;

S'agissant de la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire :

- la décision est illégale en conséquence de l'illégalité des deux décisions précédentes ;

- cette décision méconnaît le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'est pas établi qu'il y ait un risque de soustraction à la mesure d'éloignement ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire :

- la décision est illégale en conséquence de l'illégalité des décisions précédentes ;

- la décision méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il a commis une erreur de fait lors de l'examen des circonstances humanitaires pouvant s'opposer à une telle décision ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

La requête a été notifiée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 septembre 2019 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant gabonais, né le 20 mars 2001, déclare être entré en France le 18 juillet 2014 accompagné de sa mère, alors qu'il était âgé de treize ans. Par arrêté du 31 mars 2019, soit onze jours après son dix-huitième anniversaire, le préfet du Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a désigné le pays de renvoi. M. D... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, le premier juge a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que M. D... étant majeur depuis moins de deux mois à la date de l'arrêté litigieux, le préfet ne pouvait prononcer à son encontre une mesure d'éloignement sans méconnaître l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'a pas davantage statué sur le moyen tiré de ce que le préfet du Rhône aurait commis une erreur de base légale en fondant cette décision sur le 1° du I de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

3. En second lieu, pour écarter le moyen tiré de ce que la décision privant M. D... d'un délai de départ volontaire méconnaîtrait le II de l'article L. 511-1 du même code, le premier juge motive son jugement par le fait que le comportement de l'intéressé serait constitutif d'une menace pour l'ordre public. Toutefois, la décision litigieuse était motivée par la circonstance qu'il existerait un risque qu'il se soustraie à son obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, le premier juge doit être regardé comme ayant, d'une part, procédé à une substitution de motif sans que cela soit demandé par le défendeur et, d'autre part, substitué à la base légale constituée par le 2° du II de l'article L. 511-1, celle du 1° du II du même article, sans en avoir informé les parties.

4. Il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier et qu'il doit, par conséquent être annulé. Comme le demande ce dernier à titre principal, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il soit de nouveau statué sur sa demande.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État la somme de 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 juillet 2019 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Lyon.

Article 3 : L'État versera à Me C... la somme de 800 euros, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet du Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lyon.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2020.

2

N° 19LY03911


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03911
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DACHARY

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-18;19ly03911 ?
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