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18/06/2020 | FRANCE | N°19LY03516

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 18 juin 2020, 19LY03516


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2018, par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office.

Par un jugement n° 1901553 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enr

egistrée le 6 septembre 2019, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2018, par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office.

Par un jugement n° 1901553 du 11 juin 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 septembre 2019, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 juin 2019 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour à défaut de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir à compter de l'arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour donnant droit de travailler, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de délivrance de titre de séjour :

- l'avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration a été pris en méconnaissance de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour son application ;

- le préfet a méconnu le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- l'arrêté méconnaît le 10° de l'article L. 511- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

La requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 juillet 2019 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publiquele rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante angolaise, née le 17 juillet 1988, déclare être entrée en France le 13 novembre 2013. Elle a présenté une demande d'asile rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 17 décembre 2015. Par arrêté du 11 décembre 2018, le préfet de l'Isère a refusé de faire droit à sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi. Mme C... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. / Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. /Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente ". Aux termes de l'article 6 du même l'arrêté du 27 décembre 2016, " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. /Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. " et aux termes de l'article 7, " Pour l'établissement de l'avis, le collège de médecins peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant rempli le certificat médical. Le demandeur en est informé. Le complément d'information peut être également demandé auprès du médecin de l'office ayant rédigé le rapport médical. Le demandeur en est informé. /Le collège peut convoquer le demandeur. (...). Le collège peut faire procéder à des examens complémentaires ".

3. Il résulte de ces dispositions que certaines formalités complémentaires, facultatives pour le médecin rapporteur comme pour le collège des médecins, doit être mentionnée dans l'avis médical, lorsque cette faculté est exercée. Dans ce cas, l'avis doit préciser l'objet de la ou des formalités concernées parmi celles figurant sur le formulaire, ainsi que leur réalisation éventuelle, en cochant les cases correspondantes.

4. Il ressort de l'avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration en date du 30 janvier 2018, lequel a été établi conformément au modèle prévu par l'annexe C de l'arrêté précité, qu'en ce qui concerne les éléments de procédure relatifs à l'établissement du rapport, le praticien chargé d'établir le rapport médical a coché les cases mentionnant que l'intéressée a été convoquée pour un examen médical et a été amenée à justifier de son identité. Le rapporteur n'a en revanche coché ni la case " examens complémentaires demandés ", ni les cases " oui / non " correspondantes. En ce qui concerne les éléments de procédure relatifs à l'élaboration de l'avis, aucune case n'a été cochée. Toutefois, ce faisant, le rapporteur puis le collège des médecins doivent seulement être regardés comme n'ayant pas estimé utile d'obtenir des compléments d'information en ce qui concerne les éléments correspondants aux cases non cochées. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'un vice de procédure doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

6. L'avis précité du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration en date du 30 janvier 2018 mentionne que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Si elle fait valoir qu'elle souffre de troubles psychiatriques, le certificat peu circonstancié de son médecin traitant ne suffit pas à remettre en cause l'appréciation portée dans cet avis. Par conséquent quand bien même elle ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade et en l'obligeant à quitter le territoire en dépit de son état de santé.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

8. Si la requérante fait valoir qu'elle a exercé des activités professionnelles, qu'elle vit depuis cinq ans en France et que sa soeur a obtenu la nationalité française et est militaire de carrière, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle est célibataire sans enfant et a vécu l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine, où elle n'établit pas être dépourvue d'attaches. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait, par suite, les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de l'Isère n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " Cet article 3 énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

10. Si Mme C... expose qu'elle craint d'être persécutée par les autorités angolaises en raison des opinions politiques qui pourraient lui être imputées du fait des activités de son père au sein du parti démocratique pour le progrès de l'alliance nationale de l'Angola, elle ne l'établit pas par son seul récit, alors d'ailleurs qu'elle n'apporte aucun élément nouveau après le rejet de sa demande par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides et la cour nationale du droit d'asile.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme B..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2020.

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N° 19LY03516


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03516
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-18;19ly03516 ?
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