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15/06/2020 | FRANCE | N°19LY03804

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 15 juin 2020, 19LY03804


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2019 par lequel le préfet de la Drôme lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1901075 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête et mémoire, enregistrés les 3 octobre et 26 novemb

re 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2019 par lequel le préfet de la Drôme lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1901075 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête et mémoire, enregistrés les 3 octobre et 26 novembre 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 juillet 2019 ainsi que l'arrêté du 23 janvier 2019 susvisé ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, après remise d'une autorisation provisoire de séjour sous deux jours et sous astreinte, de lui délivrer une carte de résident ou un titre de séjour, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en raison d'une insuffisance de motivation et d'une omission à statuer ;

- l'arrêté est entaché de l'incompétence de son signataire ;

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivée, méconnaît les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles du 8°) de l'article L. 314-11 du même code ;

- l'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre, est insuffisamment motivée, méconnaît le principe général du droit de l'Union européenne relatif au droit d'être entendu préalablement à l'édiction d'une décision défavorable ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet s'est cru en situation de compétence liée dès lors que sa demande d'asile avait été définitivement rejetée ;

- la fixation du pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire, est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation et a été prise en violation des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par mémoire, enregistré le 29 octobre 2019, le préfet de la Drôme conclut à l'irrecevabilité et au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable à défaut d'être signée par son auteur ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense ;

1. Mme B..., ressortissante ivoirienne née le 27 décembre 1970, déclare être entrée en France le 12 août 2017, accompagnée de sa fille alors mineure. Le 26 octobre 2017, elles ont sollicité leur admission au séjour au titre de l'asile. Par décisions du 16 février 2018, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté leur demande. Cependant, sur recours de Mme B... et sa fille, la Cour nationale du droit d'asile a, par décisions du 8 novembre 2018, admis la fille de Mme B... à l'asile mais confirmé la décision de l'OFPRA opposée à Mme B.... Le 15 novembre 2018, Mme B... a sollicité auprès des services de la préfecture de la Drôme la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'ascendant de réfugié sur le fondement des dispositions du d) du 8°) de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 23 janvier 2019, le préfet de la Drôme a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient Mme B..., les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen tiré de la méconnaissance par la décision du 23 janvier 2019 portant refus de séjour des dispositions du d) du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en indiquant que le refus de titre était motivé par la circonstance que sa fille, bénéficiaire de la qualité de réfugiée, était devenue majeure à la date d'édiction de la décision contestée.

3. En outre, les premiers juges, qui n'étaient pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments de Mme B..., ont considéré, contrairement à ce qu'elle soutenait, que l'arrêté du 23 janvier 2019 emportait bien refus de séjour et ont répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ce refus qu'elle a soulevé dans ses écritures. Ils n'ont pas davantage omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet dans l'édiction de cette décision alors que Mme B... n'avait pas soulevé dans ses écritures devant le tribunal un tel moyen contre le refus de titre qui lui était opposé. Le jugement attaqué, qui n'est donc entaché ni d'une insuffisance de motivation ni d'omissions à statuer, n'est dès lors pas entaché d'irrégularités.

Sur l'arrêté pris dans son ensemble :

4. Par adoption des motifs retenus par les premiers juges, il convient d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige.

Sur la décision portant refus de séjour :

5. L'appelante réitère en appel sans les assortir d'éléments nouveaux de fait ou de droit les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision en litige et de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour visée à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

6. Aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger reconnu réfugié en application du livre VII ainsi qu'à : (...) d) Ses ascendants directs au premier degré si l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié (...) ".

7. L'administration statue sur une demande en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision sauf dans les cas où une disposition législative ou réglementaire prévoit qu'un élément de cette situation est apprécié à une date déterminée. Si Mme B... a déposé une demande, au titre des dispositions précitées permettant de délivrer à l'ascendant direct au premier degré d'un mineur non marié ayant obtenu la qualité de réfugié un titre de séjour de plein droit, le 15 novembre 2018, soit quelques jours avant que sa fille ne devienne majeure, le préfet était tenu de prendre en considération, en l'absence de dispositions contraires, les éléments de fait et de droit de la situation de Mme B... à la date d'édiction de sa décision et non, comme elle le soutient, à la date de la demande présentée par l'intéressée ou encore de la date à laquelle sa fille a obtenu le statut de réfugié. Le préfet de la Drôme n'a donc pas méconnu les dispositions précitées en relevant que la fille de Mme B... était devenue majeure à la date de sa décision, ce qui faisait obstacle à ce qu'une carte de résident soit délivrée à Mme B... sur ce fondement.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Le refus de séjour n'étant pas illégal, l'annulation par voie de conséquence de la mesure d'éloignement doit être écartée.

9. Par adoption des motifs des premiers juges, qui sont suffisamment circonstanciés et qui ne sont pas critiqués en appel, il convient d'écarter les moyens tirés de l'insuffisance motivation de la décision en litige, de ce qu'elle aurait été édictée en méconnaissance du principe de respect des droits de la défense protégés par le droit de l'Union européenne et de ce que le préfet de la Drôme se serait cru en situation de compétence liée.

10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

11. Mme B... résidait en France depuis moins de dix-huit mois au jour de la décision en litige et elle a vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, jusqu'à l'âge de quarante-six ans. Si elle se prévaut de la qualité de réfugiée de sa fille, celle-ci est majeure. En outre, il n'est pas contesté que Mme B... conserve dans son pays d'origine un fils mineur et des attaches familiales. Elle ne justifie d'aucune intégration particulière dans la société française. Dans ces conditions, le préfet de la Drôme n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels l'obligation de quitter le territoire français a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination en conséquence de celles des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire.

13. Mme B... réitère en appel ses moyens tirés du défaut d'examen de sa situation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans apporter aucun élément nouveau de fait et de droit à l'appui de ceux-ci. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

14. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 13.

15. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 23 janvier 2019 prises à son encontre par le préfet de la Drôme. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2020, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Rémy-Néris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 juin 2020.

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N° 19LY03804

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03804
Date de la décision : 15/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : VIGNERON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-15;19ly03804 ?
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