Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... D..., M. K..., et le préfet de la Haute-Savoie ont demandé au tribunal administratif de Grenoble, par requêtes distinctes, d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 6 avril 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de La Clusaz a approuvé la révision de son plan d'occupation des sols en vue de sa transformation en plan local d'urbanisme (PLU).
Par un jugement du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Grenoble, après les avoir jointes sous les n° 1703231, 1705236 et 1705658 à dix autres demandes, a annulé la délibération du 6 avril 2017 en tant qu'elle autorise l'extension du golf des Confins sur 11,3 hectares et en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section A n° 4784 et 4815 et section B n° 4179 et 4736 en zone agricole, et la décision du 19 juillet 2017 rejetant le recours gracieux de M. I..., a mis à la charge de la commune de La Clusaz le versement à M. D... et à M. I... d'une somme de somme de 1 200 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des demandes de première instance.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 mai 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 28 janvier 2020, lequel n'a pas été communiqué, la commune de La Clusaz, représentée par la SELAS Adamas Affaires Publiques, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 mars 2019 en ce qu'il annule la délibération du 6 avril 2017 en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section A n° 4784 et 4815 et section B n° 4736, en zone agricole ;
2°) de rejeter les conclusions des demandes de M. C... D... et de M. K... ;
3°) de mettre à leur charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que M. I... avait intérêt à contester le zonage de la parcelle cadastrée section B n° 4736, dont il n'est pas propriétaire ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le classement en zone A des parcelles cadastrées section A n° 4784 et 4815, appartenant à M. D..., est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le classement en zone A d'une partie de la parcelle cadastrée section B n° 4736, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2019, M. K..., représenté par la SELARL CDMF Avocats affaires publiques, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de La Clusaz au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il justifie en sa qualité de propriétaire de la parcelle cadastrée section B n° 5051, issue de la division de la parcelle n° 4179, d'un intérêt lui donnant qualité pour contester le PLU dans son ensemble ;
- le classement en zone A des parcelles cadastrées section A n° 4784 et 4815 et section B n° 4179 et 4736 est incohérent avec le PADD ;
- le classement en zone A de ces parcelles procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2020, M. C... D..., représenté par la SCP Deygas Perrachon et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de La Clusaz au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le classement en zone A des parcelles cadastrées section A n° 4815 et 4784 procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- ce classement est incohérent avec le PADD ;
La clôture de l'instruction a été fixée au 31 janvier 2020, par une ordonnance du même jour.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F... E..., première conseillère ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;
- et les observations de Me H... pour la commune de La Clusaz, celles de Me B... pour M. D... ainsi que celles de Me A... pour M. I... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 6 avril 2017, le conseil municipal de la commune de La Clusaz a approuvé la révision de son plan d'occupation des sols en vue de sa transformation en plan local d'urbanisme (PLU). Par un jugement du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Grenoble, sur deux demandes de M. C... D..., et de M. K... et sur déféré du préfet de la Haute-Savoie, a annulé cette délibération en tant qu'elle autorise l'extension du golf des Confins sur 11,3 hectares et en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section A n° 4784 et 4815 et section B n° 4179 et 4736 en zone agricole. A l'exception de l'annulation du classement d'une partie de la parcelle cadastrée section B n° 4179, qu'elle ne conteste pas, la commune de La Clusaz relève appel de ce jugement, en ce qu'il porte sur ces classements.
Sur le bien-fondé des moyens retenus par les premiers juges :
2. Aux termes du 1er alinéa de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, applicable aux PLU dont l'élaboration a été engagée avant le 1er janvier 2016 : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ".
3. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce PLU, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
En ce qui concerne le classement en zone A des parcelles cadastrées section A n° 4815 et 4784 :
4. Les parcelles en litige, appartenant à M. D..., et situées dans le secteur " Sur La Frasse ", d'une superficie de 4 000 m² et pour leur majeure partie plantées d'arbres, se situent en dehors de l'enveloppe urbaine du secteur, classée en zone Uh2, dont elles sont séparées par le ruisseau des Frasses. Elles jouxtent des parcelles agricoles exploitées relevant d'un vaste secteur à caractère agricole et, si elles en sont séparées par un autre ruisseau, elles n'apparaissent pas dépourvues de potentiel agronomique, notamment comme prairies de pâturage. Leur classement en zone agricole répond ainsi à leurs caractéristiques propres ainsi qu'à l'objectif des auteurs du PLU que rappelle le PADD d'organiser prioritairement le développement de l'urbanisation à l'intérieur des limites des fronts bâtis afin de lutter contre l'étalement urbain en restituant aux zones agricoles près de 50 hectares par rapport au plan d'occupation des sols précédemment en vigueur, ainsi que le précise le rapport de présentation.
En ce qui concerne le classement en zone A d'une partie de la parcelle cadastrée section B n° 4736 :
5. La parcelle en litige se situe à proximité de la route départementale du col des Aravis dans le secteur des Verrières, dont le développement résidentiel doit être contenu au sein de l'enveloppe urbaine selon la représentation graphique du PADD. La parcelle cadastrée section B n° 4736, qui est dépourvue de construction, a été classée pour sa majeure partie en zone A, et pour ses extrémités les plus à l'ouest et à l'est, en zone Uh2, notamment pour tenir compte des observations de M. I... lors de l'enquête publique. Si cette parcelle est bordée à l'ouest, au sud et à l'est de parcelles bâties, elle s'ouvre au nord sur un ensemble de parcelles non bâties qui, comme la parcelle en litige, ont également été classées en zone agricole. La parcelle n° 4736 est enherbée et n'apparaît pas dépourvue de potentiel agronomique. Son classement répond ainsi à ses caractéristiques propres ainsi qu'à l'objectif des auteurs du PLU que rappelle le PADD de contenir le développement de l'urbanisation au sein de l'enveloppe urbaine et de protéger le paysage agro-pastoral, garant, selon le rapport de présentation, de l'équilibre environnemental paysager nécessaire à la qualité de vie et à l'attractivité de la station sur le long terme.
6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que la commune de La Clusaz est fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué, sans qu'il soit besoin d'en examiner la régularité, a annulé la délibération du 6 avril 2017 en ce qu'elle classe les parcelles concernées en zone A.
7. Il y a lieu dès lors, au titre de l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... et M. I....
Sur les autres moyens :
En ce qui concerne la compétence de la commune de La Clusaz pour approuver son PLU :
8. Aux termes de l'article II de l'article 136 de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové : " La communauté de communes ou la communauté d'agglomération existant à la date de publication de la présente loi, ou celle créée ou issue d'une fusion après la date de publication de cette même loi, et qui n'est pas compétente en matière de plan local d'urbanisme, de documents d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale le devient le lendemain de l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la publication de ladite loi. Si, dans les trois mois précédant le terme du délai de trois ans mentionné précédemment, au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s'y opposent, ce transfert de compétences n'a pas lieu. (...) ".
9. Il ressort du courrier d'information du préfet de la Haute-Savoie adressé à l'ensemble des communes membres de la communauté de communes des Vallées de Thônes que ces communes se sont opposées, dans les conditions prévues par l'article 136 cité au point précédent, au transfert de compétence en matière d'élaboration ou d'évolution des documents d'urbanisme. Le moyen selon lequel le conseil municipal de La Clusaz n'était pas compétent pour approuver le PLU doit ainsi être écarté.
En ce qui concerne la consultation de la région Auvergne-Rhône-Alpes :
10. Le moyen de M. D... selon lequel la région Auvergne Rhône-Alpes n'aurait pas été associée à l'élaboration du PLU doit être écarté par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.
En ce qui concerne la convocation et l'information des conseillers municipaux :
11. Aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ".
12. Il ressort des pièces du dossier de première instance n° 1703231 que les conseillers municipaux ont été régulièrement convoqués aux séances des 13 juin 2016 et 6 avril 2017 au cours desquelles le conseil municipal, informé de l'ordre du jour de ces séances, a respectivement arrêté le projet de PLU et approuvé ce PLU, après avoir pris connaissance des modifications à y apporter postérieurement à l'enquête publique. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les conseillers municipaux, informés par la convocation à la séance du 6 avril 2017 de la possibilité de consulter en mairie les documents du PLU, n'auraient pas pu en prendre connaissance et auraient été privés de la possibilité d'exercer utilement leur mandat. Par suite, le moyen de première instance de M. D..., tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 11 doit être écarté.
En ce qui concerne les modifications du PLU après enquête :
13. Les moyens selon lesquels les modifications apportées au projet de PLU après l'enquête publique remettent en cause l'économie générale du projet et que certaines d'entre elles ne résultent pas de l'enquête publique doivent être écartés par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.
En ce qui concerne l'incohérence du classement des parcelles en litige avec le PADD :
14. M. D... fait valoir en appel que les parcelles en litige cadastrées section A n° 4815 et 4784 classées en zone urbaine sous l'empire du plan d'occupation des sols se situent dans un des " hameaux principaux " dont le PADD prévoit l'urbanisation. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que lesdites parcelles se situent en dehors de l'enveloppe urbaine. Dans le cadre de l'analyse globale à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme à laquelle il doit être procédé et en considération des objectifs du PADD de mieux structurer le développement de l'urbanisation en organisant prioritairement le développement de l'urbanisation à l'intérieur des limites des fronts bâtis afin de ne pas porter atteinte au paysage agro-pastoral, qu'il convient de préserver dans toutes ses composantes, le classement en zone A de ces parcelles dont il n'apparait pas qu'il aurait pour objectif de compenser la consommation de terrains agricole du fait du projet communal d'extension du golf, ne peut être regardé comme présentant une incohérence au regard des objectifs du PADD.
15. Pour les mêmes motifs, alors qu'il n'est pas établi que le secteur " Le Clos " qui fait l'objet de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 3 présenterait des caractéristiques comparables, le classement en zone A d'une partie de la parcelle cadastrée section B n° 4736 appartenant à M. I... n'est pas davantage incohérent avec le PADD du PLU.
16. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées aux demandes de première instance, que la commune de La Clusaz est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération du 6 avril 2017 en tant qu'elle classe en zone A les parcelles cadastrées A n° 4784, 4815 et section B n° 4179 et 4736 et, d'autre part, que M. D... et M. I... ne sont pas fondés à demander respectivement l'annulation partielle ou totale de cette délibération ni celle de la décision du 19 juillet 2017 rejetant le recours gracieux de M. I....
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce que la somme que demandent M. D... et M. I... au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune de La Clusaz, qui n'est pas partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de La Clusaz au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 7 mars 2019 du tribunal administratif de Grenoble est annulé en tant qu'il a annulé la délibération du 6 avril 2017 approuvant le PLU de la commune de La Clusaz en ce qu'elle classe les parcelles cadastrées section A n° 4784, 4815 et section B n°4179 et 4736 en zone agricole.
Article 2 : Les demandes de M. D... et de M. I... devant le tribunal administratif de Grenoble et le surplus des conclusions des parties en appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Clusaz, à M. C... D... et à M. K....
Délibéré après l'audience du 12 mai 2020 à laquelle siégeaient :
Mme G... J..., présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme F... E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 9 juin 2020.
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N° 19LY01768
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