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09/04/2020 | FRANCE | N°19LY02295

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 09 avril 2020, 19LY02295


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 4 octobre 2018 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1807653 du 14 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 juin 2019, M. F..., représenté par M

e H... (D... BS2A Bescou et H...), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 4 octobre 2018 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1807653 du 14 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 juin 2019, M. F..., représenté par Me H... (D... BS2A Bescou et H...), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 mai 2019 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 4 octobre 2018 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- cette décision méconnaît l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 juillet 2019.

Par une ordonnance du 12 novembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- 1'accord-cadre franco-tunisien relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire et le protocole relatif à la gestion concertée des migrations du 28 avril 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme I..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Thierry, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant tunisien né le 9 avril 1979, déclare être entré en France, en dernier lieu, le 14 septembre 2015. Par arrêté du 4 octobre 2018, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays à destination duquel il pourra être éloigné. M. F... relève appel du jugement du 14 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

3. D'après ses déclarations, M. F... est entré sur le territoire français, en dernier lieu, au cours de l'année 2015. Il ressort des pièces du dossier qu'il a depuis entretenu une relation avec une ressortissante algérienne, Mme C..., résidant en France sous couvert d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans et avec laquelle il a eu un enfant, né le 30 juin 2017. Il établit par les pièces qu'il produit qu'à la date du refus de titre de séjour litigieux, ils entretenaient une communauté de vie et qu'il participait ainsi, par sa présence à ses côtés, à l'éducation et à l'entretien de leur enfant. Mme C... est par ailleurs mère de trois premiers enfants nés entre 2004 et 2014 d'une précédente union, qui ont tous trois toujours vécu sur le territoire français et dont l'une est de nationalité française. Dans ces circonstances, le requérant n'apparaît pas en mesure de reconstituer sa cellule familiale dans son pays d'origine, eu égard à la nationalité distincte de sa compagne et à la situation des enfants de celle-ci, quand bien même le père de ces derniers est décédé. Dès lors, la décision de refus de titre de séjour en litige a pour effet soit de priver l'enfant de M. F... de la présence de son père pour le cas où cet enfant resterait en France aux côtés de sa mère, soit de la présence de sa mère dans le cas inverse où il accompagnerait son père dans son pays d'origine, alors que sa mère, qui pourvoit également à son entretien et à son éducation, a vocation à demeurer en France. Dès lors, et malgré le caractère récent de la vie commune entretenu avec sa compagne, M. F... est fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. F... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il est, dès lors, fondé à demander l'annulation dudit jugement ainsi que celle de l'arrêté du 4 octobre 2018 du préfet du Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'une circonstance de droit ou de fait nouvelle y ferait désormais obstacle, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Rhône de délivrer à M. F... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me H..., avocat de M. F..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à celui-ci d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1807653 du tribunal administratif de Lyon du 14 mai 2019 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Rhône du 4 octobre 2018 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à M. F... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera à Me H..., avocat de M. F..., une somme de 1 200 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'État.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... F..., à Me H... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 février 2020, à laquelle siégeaient :

Mme G... A..., présidente de chambre,

Mme J..., présidente-assesseure,

Mme E... I..., première conseillère.

Lu en audience publique le 9 avril 2020.

2

N° 19LY02295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02295
Date de la décision : 09/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. THIERRY
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-09;19ly02295 ?
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