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02/04/2020 | FRANCE | N°19LY03019

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 02 avril 2020, 19LY03019


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision de la préfète de la Nièvre du 9 janvier 2019 qui a rejeté sa demande de regroupement familial déposée en août 2018 pour son épouse F....

Par un jugement n° 1900712 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2019, M. D..., représenté par la SCP Bon de Saulce Latour, avocats, demande à la cour :

1

°) d'annuler ce jugement n° 1900712 du tribunal administratif de Dijon du 27 juin 2019 ;

2°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision de la préfète de la Nièvre du 9 janvier 2019 qui a rejeté sa demande de regroupement familial déposée en août 2018 pour son épouse F....

Par un jugement n° 1900712 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2019, M. D..., représenté par la SCP Bon de Saulce Latour, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1900712 du tribunal administratif de Dijon du 27 juin 2019 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il travaille régulièrement en France, dispose de revenus suffisants et justifie d'un logement à Nevers qu'il occupe tous les week-ends et les vacances; il n'existe aucune fraude à la loi; il répond aux conditions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile et la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 10 septembre 2019, la préfète de la Nièvre conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le requérant ne justifie pas d'une occupation effective de son logement à Nevers ; en tout état de cause, son logement présente des dysfonctionnements ; les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

- il pourra déposer une nouvelle demande de regroupement familial, une fois les conditions remplies ; l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été méconnu.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 25 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

le rapport de Mme B..., présidente assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant bangladais né le 15 novembre 1995, relève appel du jugement du 27 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 janvier 2019 par laquelle la préfète de la Nièvre a rejeté sa demande de regroupement familial déposée en août 2018 pour son épouse F....

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique. (...) ". Aux termes de l'article R. 411-5 du même code : " Pour l'application du 2° de l'article L. 411-5, est considéré comme normal un logement qui : (...) 2° Satisfait aux conditions de salubrité et d'équipement fixées aux articles 2 et 3 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain. (...) ".

3. Aux termes de l'article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 : " Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires : / (...) / 3. Les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons, sont dans un état conforme à leur usage ; / (...) 5. Les réseaux et branchements d'électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d'eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d'usage et de fonctionnement ; (...) ".

4. M. D... a, le 10 mars 2017, signé un bail pour la location d'un appartement de 2 pièces d'une surface de 34,86 m² à Nevers, dont il n'est pas contesté qu'il a ensuite acquitté le loyer. Si la préfète fait valoir qu'il travaille à temps plein à Paris, qu'il dispose d'un logement dans la région parisienne, à Arnouville-lès-Gonesse et qu'il ne peut justifier d'une résidence habituelle et effective dans son appartement de Nevers, il ressort des pièces du dossier qu'il dispose d'attaches familiales dans cette ville où résident ses parents et ses frères et qu'il y retourne régulièrement lorsqu'il ne travaille pas à Paris. Dans ces conditions, c'est à tort que la préfète de la Nièvre a estimé que les conditions de logement de l'intéressé constituaient une fraude à la loi.

5. Toutefois, il ressort des termes de la décision en litige que la préfète s'est également fondée, pour rejeter la demande de M. D..., sur l'existence de dysfonctionnements à l'intérieur du logement, en ce qui concerne notamment les dispositifs de retenue et les équipements de chauffage. Les résultats de l'enquête diligentée le 15 novembre 2018 par le centre communal 'action sociale de Nevers, qui conclut à l'absence de conformité des conditions de logement, ont révélé que les appareils de chauffe ne fonctionnaient qu'après plusieurs manipulations, que le radiateur de la chambre était hors d'usage et que les gardes corps étaient légèrement descellés. Si le requérant produit un constat d'huissier indiquant que le chauffage de l'appartement fonctionne et que les gardes corps sont scellés, ce document établi le 25 avril 2019, postérieurement à la décision en litige, ne permet pas de contredire les constatations sur lesquelles la préfète s'est fondée. Ainsi, le logement occupé par M. D... ne vérifie pas les conditions de bon fonctionnement et de sécurité physique des locataires au regard des dispositions rappelées ci-dessus du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002. Il résulte de l'instruction, notamment des termes de la décision en litige et des écritures en défense de la préfète de la Nièvre qu'elle aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur les conditions relatives au logement.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

7. A la date de la décision litigieuse, M. D... n'était marié avec son épouse que depuis deux ans et demi et n'avait pas d'enfant. Par suite, la décision litigieuse n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. D... une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus opposé par la préfète de la Nièvre méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er: La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme B..., présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 2 avril 2020.

2

N°19LY03019


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03019
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP BON - DE SAULCE LATOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-02;19ly03019 ?
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