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02/04/2020 | FRANCE | N°19LY01797

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 02 avril 2020, 19LY01797


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Dijon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination outre interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans, d'autre part, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1900548 du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejet

é sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2019,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Dijon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination outre interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans, d'autre part, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1900548 du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2019, présentée pour Mme B..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1900548 du tribunal administratif de Dijon du 1er avril 2019 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois après remise d'une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur les moyens tirés, d'une part, de l'exception d'illégalité du refus de titre, soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et, d'autre part, de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français soulevé à l'encontre de l'interdiction de retour sur le territoire ;

- le refus de titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son droit à une vie privée et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ; elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son droit à une vie privée et familiale ;

- l'interdiction de retour sur le territoire méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire qui n'a pas produit d'observation.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2019, du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante arménienne née le 26 février 1977 à Gyumri (URSS), entrée en France avec son époux, également de nationalité arménienne, et leurs deux enfants mineurs, le 6 janvier 2015, selon ses déclarations, a sollicité le bénéfice de l'asile, qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatride (OFPRA) du 23 novembre 2015 puis par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 23 juin 2016, et a fait l'objet d'une mesure d'éloignement du 22 mars 2016 qui n'a pas été exécutée sans être contestée devant le juge administratif. Mme B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de Saône-et-Loire du 21 février 2019 lui ayant refusé un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire sans délai, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte de la lecture du jugement attaqué que les premiers juges, qui ont examiné en particulier la légalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, ont indiqué que tous les moyens invoqués, par voie d'action ou d'exception, devaient être écartés. Dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, les premiers juges n'ont pas omis d'examiner le moyen, soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ni le moyen, soulevé à l'encontre de l'interdiction de retour sur le territoire et tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité sur ces points.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger (...) qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

4. Mme B... fait état de sa résidence en France depuis quatre ans à la date de la décision en litige, de son intégration et de celle de sa famille qui y bénéficie de nombreux soutiens et de liens amicaux et de ce que le conjoint de leur fille majeure réside régulièrement sur le territoire français. Toutefois, eu égard aux conditions du séjour sur le territoire français de Mme B..., qui s'est soustraite à une précédente mesure d'éloignement, et au caractère récent, à la date de la décision en litige, de la présence de la famille de la requérante, alors que son époux a fait l'objet le même jour d'une décision d'éloignement, ladite décision n'a pas porté au droit au respect de la vie familiale et privée de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et elle n'a ainsi pas méconnu les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger (...) ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ".

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., de nationalité arménienne, s'est vu refuser le bénéfice de l'asile par une décision de l'OFPRA du 23 novembre 2015 puis par une décision de la CNDA du 23 juin 2016. Ainsi, à la date de la décision en litige, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français. En outre, par son arrêté du 21 février 2019, le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et il résulte de ce qui a été dit que Mme B... ne peut exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour.

7. En second lieu, Mme B... ne se prévaut pas de son état de santé. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de Saône-et-Loire a méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'obligeant à quitter le territoire doit être écarté. Doit être également écarté le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit que Mme B... ne peut exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre l'interdiction de retour, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

9. En second lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé (...) / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) La durée de l'interdiction de retour (...) [est décidée] par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

10. Il appartient au préfet, en vertu des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'assortir une obligation de quitter le territoire français sans délai d'une interdiction de retour sur le territoire français sauf dans l'hypothèse où des circonstances humanitaires justifieraient qu'il soit dérogé au principe. Mme B... s'est vu refuser tout délai de départ volontaire pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre. Les circonstances dont elle fait état ne peuvent être regardées comme des circonstances humanitaires, qui auraient pu justifier que l'autorité administrative ne prononçât pas d'interdiction de retour sur le territoire français. S'agissant de la durée de cette interdiction, la décision contenue dans l'arrêté en litige, qui ainsi est suffisamment motivée, fait référence à la durée de présence de Mme B... sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France, à la précédente mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet et, par la mention du risque qu'elle se soustraie à l'obligation de quitter le territoire prise par le même arrêté. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation ni méconnu les dispositions précitées en fixant à deux ans la durée de l'interdiction de retour en France faite à l'appelante.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2020 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 avril 2020.

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N° 19LY001797


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01797
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : DSC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-02;19ly01797 ?
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