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02/04/2020 | FRANCE | N°18LY01611

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 02 avril 2020, 18LY01611


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... A..., Mme F... A... et M. G... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 10 juin 2013, par lequel le maire de Davézieux a délivré à M. B... un permis de construire en vue de l'extension d'un abri sur un terrain d'assiette situé 228 rue Chantebise.

Par un jugement n° 1605227 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ce permis et mis à la charge de la commune la somme de 1200 euros à verser aux consorts A... en application de l'article L. 761-

1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... A..., Mme F... A... et M. G... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 10 juin 2013, par lequel le maire de Davézieux a délivré à M. B... un permis de construire en vue de l'extension d'un abri sur un terrain d'assiette situé 228 rue Chantebise.

Par un jugement n° 1605227 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ce permis et mis à la charge de la commune la somme de 1200 euros à verser aux consorts A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 2 mai 2018 et le 26 avril 2019, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 1er mars 2018 ;

2°) de mettre à la charge des consorts A..., la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la demande des consorts A... est irrecevable ; les consorts A... avaient connaissance de l'existence du permis litigieux dès le mois de décembre 2014 au moment où ils ont consulté en mairie le dossier de permis ; ils ont introduit leurs recours gracieux puis contentieux plus de deux années après la délivrance du permis et son affichage sur le terrain est intervenu à compter du 1er octobre 2014 ;

- le projet ne méconnaît pas l'article UB10 du règlement du PLU de la commune ; la hauteur maximale autorisée pour une annexe implantée en limite séparative se mesure non au faîtage mais au point le plus bas jusqu'à l'égout du toit, comme le prévoit le lexique du PLU, lequel confirme sur ce point l'interprétation à donner à cet article du règlement ;

- le projet ne méconnaît pas l'article UB11.2 ; le projet n'offre aucune complexité architecturale ou de volume et s'intègre à son environnement, lequel ne présente pas d'homogénéité s'agissant des toitures des constructions avoisinantes ;

- contrairement à ce que soutiennent les intimés, le permis litigieux porte sur une construction distincte de celle autorisée en 2007 et n'a pas pour objet de régulariser la construction autorisée en 2007, dont le permis n'était pas périmé, ni de la modifier.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés le 25 octobre 2018 et le 17 mai 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, les consorts A..., représentés par la Selarl Racine Avocat, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur demande est recevable ; la date d'affichage du permis de construire sur le terrain d'assiette n'est pas établie avant le 15 février 2016, ni son caractère continu ; l'affichage du permis n'est pas régulier faute de mentionner la hauteur de la construction projetée, la superficie du terrain et les voies et délais de recours ; une connaissance acquise du permis ne peut leur être opposée à compter de décembre 2014, du seul fait que M. A... se soit rendu en mairie pour assister à une réunion d'information, d'autant qu'à cette date, aucun des trois permis délivrés à M. B... n'étaient achevés ni même mis en oeuvre ; ils ont contesté le permis de construire en litige dans un délai raisonnable dès qu'ils en ont eu connaissance, soit à compter de l'affichage sur le terrain du 15 février 2016 ;

- les travaux autorisés par le permis du 10 juin 2013 ne sont pas divisibles des travaux autorisés par le permis du 18 mai 2001, modifié par celui du 19 septembre 2007 ; l'abri autorisé par ces travaux n'étant pas achevé au moment de la demande introduite par M. B... en 2013, les travaux devaient faire l'objet d'un permis modificatif et non d'un nouveau permis ; l'abri a été réalisé alors que les autorisations délivrées en 2001 et 2007 étaient périmées ; un permis régularisant l'ensemble des deux constructions annexes était nécessaire ;

- le projet méconnaît l'article UB10.1 et UB11.2 du règlement du PLU de Davézieux.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 17 mai 2019 par une ordonnance du 29 avril précédent, en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme I... H..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me D... pour M. C... B... ainsi que celles de Me K... pour les consorts A... ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour M. B..., enregistrée le 18 février 2020 ;

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 10 juin 2013, le maire de Davézieux a délivré à M. B... un permis de construire pour l'extension d'un abri implanté sur un terrain situé 228 rue Chantebise. Les consorts A... ont contesté ce permis par recours gracieux du 6 avril 2016, lequel a été rejeté par décision du 11 mai 2016. M. B... relève appel du jugement du 1er mars 2018, par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé ce permis à la demande des consorts A....

Sur la recevabilité de la demande des consorts A... :

2. Au soutien de sa fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande des consorts A..., M. B... fait valoir d'une part, qu'ils ont eu connaissance du permis litigieux au plus tard à compter du 2 décembre 2014, date à laquelle ils ont consulté le dossier de permis de construire en mairie et d'autre part, que leur recours contentieux, lequel est postérieur de près de trois années à l'affichage du permis en litige sur son terrain, a été formé au-delà d'un délai raisonnable.

3. En vertu de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, le délai de recours contre une décision administrative est de deux mois. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de cet article R. 424-15 : " Mention du permis (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier. (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". Aux termes de l'article A. 424-16 du code de l'urbanisme : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet : a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel ; (...) ".

4. En imposant que figurent sur le panneau d'affichage du permis de construire diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, les dispositions citées au point précédent ont pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d'apprécier l'importance et la consistance du projet. La hauteur du bâtiment est au nombre des mentions substantielles que doit comporter cet affichage. L'affichage ne peut, en principe, être regardé comme complet et régulier si cette mention fait défaut ou si elle est affectée d'une erreur substantielle, alors qu'aucune autre indication ne permet aux tiers d'estimer cette hauteur. Le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme ne commence à courir qu'à la date d'un affichage complet et régulier.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment des attestations produites par la commune, que M. B... a fait procéder à l'affichage du permis de construire en litige au mois de décembre 2014. Si ce permis a fait l'objet d'un affichage continu jusqu'au 8 mars 2016, il ressort toutefois des constatations de l'huissier du même jour que la hauteur de la construction projetée n'était pas mentionnée sur ce panneau, alors que cette information était nécessaire et substantielle en vertu des dispositions de l'article A. 424-16 citées au point 3.

6. Si M. B... soutient que M. E... A... a, au cours d'une réunion organisée le 2 décembre 2014 à la mairie de Davézieux sous l'égide du policier municipal de la commune, pris connaissance des caractéristiques du projet litigieux, toutefois, l'attestation du 16 avril 2018 peu circonstanciée, ne permet pas d'identifier précisément quel projet ni même quel permis de construire a été consulté à cette occasion alors que M. B... a déposé trois demandes de permis de construire successives entre 2001 et 2013 .

7. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les intimés avaient connaissance du permis de construire en litige, ni a fortiori des caractéristiques du projet litigieux, dès décembre 2014 qui aurait fait courir à leur encontre le délai de recours contentieux de deux mois prévu à l'article R. 600-2 précité et qui ferait obstacle à ce qu'ils puissent se prévaloir du caractère incomplet de l'affichage.

8. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire (...). Dans le cas où l'affichage du permis ou de la déclaration, par ailleurs conforme aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, n'a pas fait courir le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 600-2, faute de mentionner ce délai conformément à l'article A. 424-17, un recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter du premier jour de la période continue de deux mois d'affichage sur le terrain. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que l'affichage du permis de construire n'était pas conforme aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le recours contentieux formé par les consorts A... aurait dû, en vertu des principes énoncés au point précédent, être présenté dans un délai raisonnable.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'article UB10 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) :

10. Aux termes de l'article UB 10 du PLU relatif à la hauteur des constructions : " 10.1 - La hauteur maximale des constructions ne pourra excéder 9 mètres à l'égout de toiture ni comporter plus de trois niveaux (R+2). Pour les constructions à usage d'annexe implantées en limite séparative, la hauteur ne pourra dépasser 3,5 m ". Le lexique du PLU définit la hauteur des constructions par la mesure à partir du point le plus bas du terrain d'assiette avant terrassement mesuré au niveau de la construction le plus défavorable si le terrain est en déclivité, jusqu'à l'égout de toiture de cette construction en excluant les ouvrages techniques, cheminées et autres superstructures.

11. Il ressort des pièces du dossier que la construction projetée présente une hauteur à l'égout du toit de 3.5 mètres. Cette construction respecte les prescriptions de l'article UB 10 rappelées au point précédent, dès lors que la hauteur maximale d'une construction, même faute de toute précision en ce sens, se définit conformément au lexique du PLU, comme la différence entre le point le plus bas du terrain d'assiette avant terrassement et l'égout de toiture. Ainsi, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé le permis du 10 juin 2013 au motif qu'il méconnaissait les dispositions citées au point 10.

En ce qui concerne le respect de l'article UB11.2

12. Aux termes de l'article UB11.2 du règlement du PLU de Davézieux : " Les constructions ne doivent pas présenter de complexité de volume (décrochements multiples en plan, en toiture) sans rapport avec l'architecture locale. / Les annexes et les extensions devront être étudiées avec autant de soins que le bâtiment principal. Elles devront participer au volume général de l'ensemble du projet et non apparaître comme des constructions sans continuité architecturale, notamment lorsque ces dernières sont réalisées ultérieurement. ".

13. Il ressort des pièces du dossier que la construction projetée consiste en l'agrandissement d'un abri existant doté d'une toiture à une pente par l'accolement à la perpendiculaire d'une construction dotée d'un toit à deux pentes et d'une hauteur au faîtage plus élevée. Alors même que les photographies versées au dossier par le requérant ne font pas apparaître d'unité architecturale des toitures situées dans l'environnement immédiat, la construction projetée, qui créé un décroché de toiture important ainsi que des ressauts de couverture entre les deux bâtiments, ne s'inscrit pas dans la continuité architecturale du bâtiment annexe existant et méconnaît ainsi les dispositions citées au point 12. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu comme fondé le moyen selon lequel le permis en litige avait été délivré en violation des dispositions de l'article UB 11.2 précitées.

14. Eu égard à ce qui a été dit au point 13 du présent arrêt, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé le permis de construire que le maire de Davezieux lui a délivré le 10 juin 2013.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. B... demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge des consorts A..., qui ne sont pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 2 000 euros aux consorts A....

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera aux consort A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à M. E... A..., Mme F... A... et M. G... A... ainsi qu'à la commune de Davézieux.

Délibéré après l'audience du 18 février 2020 à laquelle siégeaient :

Mme J... L..., présidente de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme I... H..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 2 avril 2020.

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N° 18LY01611

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01611
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation locale.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance - Délais de recours.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : DUFFAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-02;18ly01611 ?
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