Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 24 mars 2017 par lequel le maire de la commune d'Abondance a accordé un permis d'aménager neuf lots à la société TIT.
Par un jugement n° 1703043 du 18 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 juin 2019, Mme B... A..., représentée par la Selarlu C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 avril 2019 ainsi que le permis d'aménager du 24 mars 2017 ;
2°) de mettre à la charge de la commune d'Abondance la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a intérêt à agir en tant que voisine immédiate du projet, qui va engendrer privation de vue, d'ensoleillement et d'intimité de son chalet ;
- le projet méconnaît les dispositions de l'article UB3 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune ; l'acte notarié du 10 août 2015 mentionné par le jugement attaqué vaut promesse de consentir une servitude sous diverses conditions suspensives et ne vaut pas servitude de passage ;
- le projet méconnaît l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme ; les parcelles d'assiette du projet constituent une pâture laitière indispensable à l'exploitation agricole voisine et sont identifiées comme telles dans le plan local d'urbanisme adopté postérieurement au permis en litige.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre et 18 novembre 2019, la commune d'Abondance, représentée par la SCP Pianta et associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A... le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le projet n'est pas enclavé ; une servitude de passage a été constituée au bénéfice des parcelles d'assiette du projet le 10 août 2015 puis réitérée par acte authentique du 24 juillet 2017 ;
- l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme n'a pas été méconnu ; les parcelles d'assiette du projet ont été classées en zone UB dans le PLU adopté le 3 août 2018 et ce classement n'a pas été contesté par la requérante ; ce PLU, postérieur au permis litigieux, ne lui est pas opposable ; les parcelles d'assiette du projet ne sont pas des pâtures laitières indispensables à la survie d'une exploitation agricole.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 18 novembre 2019, la société TIT, représentée par Me D..., conclut à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que la cour fasse application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 janvier 2020 par une ordonnance du 31 décembre 2019 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G... F..., première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- et les observations de Me C... pour Mme A..., ainsi que celles de Me E... pour la société TIT ;
Considérant ce qui suit ;
1. Mme A... relève appel du jugement du 18 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 mars 2017 par lequel le maire de la commune d'Abondance a accordé un permis d'aménager neuf lots à la société TIT sur les parcelles cadastrées section A 158 et 1998, au lieu-dit " Champs Pantins ", classées en zone NAb du plan d'occupation des sols.
Sur la légalité du permis d'aménager du 24 mars 2017 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article UB3 du règlement du POS de la commune d'Abondance applicable à la zone NAb : " Accès : Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise une servitude de passage suffisante instituée par acte authentique ou par voie judiciaire. ". Pour l'application de ces dispositions, un terrain doit être regardé comme enclavé et par suite inconstructible si, à la date à laquelle il est statué sur la demande de permis de construire, il n'a pas d'accès direct à la voie publique et que le propriétaire ne dispose pas d'une servitude de passage obtenue par voie judiciaire ou conventionnelle sur un fonds voisin et permettant cet accès.
3. Il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de masse joint à la demande du permis, que les parcelles d'assiette du projet cadastrées section A n° 158 et 1998 sont séparées de la route nationale n° 22 par la voie interne du lotissement " chez les Meuniers " réalisée par la société pétitionnaire, et par la parcelle cadastrée section A n° 161 appartenant à M. I... sur laquelle est identifiée une servitude de passage. Par acte notarié du 10 août 2015, le propriétaire de la parcelle cadastrée A n°161 s'est engagé à consentir, à première demande de la société TIT, une servitude de passage sur sa parcelle au profit des parcelles d'assiette du projet et a obtenu, en contrepartie, une servitude de passage au profit de sa parcelle cadastrée section A n° 161 sur les parcelles constituant la voie interne du lotissement " chez les Meuniers ". Il ressort des stipulations de l'acte notarié du 10 août 2015 que l'engagement de consentir une servitude au profit des parcelles d'assiette du projet ne pouvait être remis en cause par le propriétaire de la parcelle cadastrée section A n° 161, ni par ses ayants-droits mais seulement par la société pétitionnaire, dans l'hypothèse où elle ne pourrait bénéficier du permis d'aménager. Dans ces conditions, la société TIT devait être regardée comme disposant à la date de délivrance du permis d'aménager en litige et en application des dispositions de l'article 682 du code civil, d'une servitude de passage en vertu de l'acte notarié du 10 août 2015 alors même que cet engagement a été réitéré le 24 juillet 2017. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UB3 du règlement du POS doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 122-10 dans sa version applicable au litige, du code de l'urbanisme : " Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, en particulier les terres qui se situent dans les fonds de vallée, sont préservées. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition. ".
5. Pour contester la validité du permis en litige au regard des dispositions précitées au point 4, Mme A... fait valoir que le rapport de présentation du PLU d'Abondance adopté le 3 août 2018 identifie les parcelles d'assiette du projet comme pâtures indispensables. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les parcelles constituant l'assiette du projet sont situées dans une zone d'urbanisation diffuse mais néanmoins continue le long de la route départementale n° 22, laquelle constitue une coupure entre le projet et l'exploitation agricole proche. La circonstance que le rapport de présentation du PLU, postérieur à l'autorisation en litige, identifie les parcelles d'assiette du projet comme pâtures indispensables dans sa partie intitulée " bilan des activités agricoles " n'est corroborée ni par le classement de ces parcelles en zone Ub par ce PLU, ni par l'attestation de l'exploitant agricole jointe aux débats qui exclut une telle qualification pour ces parcelles. Par suite, le terrain n'étant pas nécessaire au maintien et au développement des activités agricoles, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme A... dirigées contre la commune, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 000 euros à verser à la commune d'Abondance d'une part et la même somme à verser à la société TIT d'autre part.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Mme A... versera la somme de 1 000 euros à la commune d'Abondance et la somme de 1 000 euros à la société TIT en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A..., la société TIT et à la commune d'Abondance.
Délibéré après l'audience du 4 février 2020 à laquelle siégeaient :
Mme H... J..., présidente de chambre ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme G... F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 10 mars 2020.
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N° 19LY02462
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