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25/02/2020 | FRANCE | N°19LY01386

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 25 février 2020, 19LY01386


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Les consorts B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 21 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Megève a approuvé le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1705441 du 14 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 11 avri

l 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 20 décembre 2019, qui n'a pas été communiqué...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Les consorts B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 21 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Megève a approuvé le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1705441 du 14 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 11 avril 2019, et un mémoire en réplique, enregistré le 20 décembre 2019, qui n'a pas été communiqué, les consorts B..., représentés par la SELARL CDMF-Avocats affaires publiques, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 février 2019 ;

2°) d'annuler la délibération du 21 mars 2017 approuvant le PLU de Megève et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ;

3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de la commune de Megève au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les modalités de la concertation n'ont pas été respectées en violation de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ;

- les modifications apportées après enquête publique par la délibération attaquée bouleversent l'économie générale du plan ;

- les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) sectorielles sont illégales ; elles ne comportent aucune prescription d'aménagement ; elles fixent de manière précise les caractéristiques des différents types de constructions envisagés ;

- le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) ne fixe pas d'objectif chiffré de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ;

- le classement en zone A de leurs parcelles ne répond pas à un motif de protection d'un potentiel de terre agricole ni à un intérêt faunistique et floristique propre à justifier leur intégration dans un secteur d'intérêt écologique ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2019, la commune de Megève, représentée par la SELARL Affaires Droit Public-Immobilier, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés sont infondés ;

- subsidiairement, la demande de première instance était tardive.

La clôture de l'instruction a été fixée au 23 décembre 2019 par une ordonnance du 6 décembre 2019 prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... E..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Jean Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me A... pour les consorts B... ainsi que celles de Me C... pour la commune de Megève ;

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts B... relèvent appel du jugement du 14 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande dirigée contre la délibération du conseil municipal de la commune de Megève du 21 mars 2017 approuvant le plan local d'urbanisme (PLU) de cette commune.

Sur la légalité de la délibération du 21 mars 2017 :

En ce qui concerne la concertation préalable :

2. Par une délibération du 1er septembre 2015, le conseil municipal de Megève a, en application de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, défini les modalités de la concertation prévue pour l'élaboration du PLU, en prévoyant notamment la " mise à disposition du public en mairie d'un dossier synthétique comprenant les pièces communicables mises à jour au fur et à mesure de l'avancement de la démarche et d'un registre destiné à recevoir les remarques et les propositions de de toutes les personnes intéressées. ". Si les requérants font valoir que cette modalité de la concertation n'a pas été respectée en l'absence de dossier synthétique comprenant les pièces du dossier de PLU, il ressort des énonciations de la délibération du 2 août 2016 tirant le bilan de la concertation et arrêtant le projet de PLU que, contrairement à ce qu'affirment les consorts B..., le registre mis à disposition du public a été complété par des documents d'information sur le projet de PLU, en particulier les lettres d'information, éléments de diagnostic, le projet de PADD et les comptes rendus de réunions. Ainsi, les modalités prévues par délibération du 1er septembre 2015 ont été mises en oeuvre, sans que les requérants ne puissent utilement se prévaloir de la circonstance qu'une seule remarque a été portée au registre de la concertation. Le moyen tiré de la méconnaissance des modalités de la concertation prévues par la délibération du 1er septembre 2015 doit ainsi être écarté.

En ce qui concerne les modifications du PLU après enquête :

3. Il est loisible à l'autorité compétente de modifier le projet de PLU après l'enquête publique, sous réserve, d'une part que ne soit pas remise en cause l'économie générale du plan et, d'autre part, que cette modification procède de l'enquête, ces deux conditions découlant de la finalité même de la procédure de mise à l'enquête publique.

4. Les requérants soutiennent que les modifications apportées au projet de PLU après enquête publique sont nombreuses, qu'elles prévoient d'importantes modifications du règlement, du tracé des zones humides, de secteurs d'intérêts écologiques, des modifications concernant les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) n° 1, 7 et 8 et la suppression de l'OAP n° 4. Les modifications de zonage et du document graphique critiquées par les requérants, dont il n'est pas contesté qu'elles procèdent de l'enquête, portent toutefois sur des secteurs limités de la commune. Tel est le cas de l'élargissement de la zone humide et du secteur d'intérêt écologique, affectant selon les requérants une quinzaine de parcelles, de l'extension des zones UH et UT, de la suppression de l'OAP n°4 en conséquence de la transformation de la zone 1 AUH en zone 2 AU, dont les requérants n'indiquent pas en quoi elles seraient, avec les modifications mineures du règlement et des OAP qu'ils énumèrent sans les analyser, par leurs effets propres ou combinés, de nature à remettre en cause l'économie générale du projet de PLU. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu'une nouvelle enquête publique était requise avant l'adoption du PLU ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) :

5. Aux termes de l'article L. 174-3 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une procédure de révision du plan d'occupation des sols a été engagée avant le 31 décembre 2015, cette procédure peut être menée à terme en application des articles L. 123-1 et suivants, dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, sous réserve d'être achevée au plus tard le 26 mars 2017 ". Aux termes de l'article L. 123-1-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Dans le respect des orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation comprennent des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports et les déplacements. ". L'article R. 123-3-1 dispose : " Les orientations d'aménagement et de programmation mentionnées au 1 de l'article L. 123-1-4 peuvent, le cas échéant par quartier ou par secteur, prévoir les actions et opérations d'aménagement prévues par ces dispositions. ".

6. En matière d'aménagement, une OAP implique un ensemble d'orientations définissant des actions ou opérations visant, dans un souci de cohérence à l'échelle du périmètre qu'elle couvre, à mettre en valeur des éléments de l'environnement naturel ou urbain, ou à réhabiliter, restructurer ou aménager un quartier ou un secteur. Elle ne peut se limiter à prévoir, sur l'essentiel de son périmètre, la conservation de l'état actuel de l'occupation du sol en se bornant à définir des préconisations pour une partie très résiduelle de ce périmètre et sans qu'apparaisse, par ailleurs, un lien avec une orientation générale d'aménagement définie à l'échelle du secteur couvert. D'autre part, si les OAP peuvent, en vertu de l'article L. 123-1-4 du code de l'urbanisme, prendre la forme de schémas d'aménagement, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre aux auteurs du PLU, qui peuvent y préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics, de fixer précisément, au sein de telles orientations, les caractéristiques des constructions susceptibles d'être réalisées.

7. Le PLU de Megève prévoit sept OAP sectorielles dont les requérants soutiennent de manière contradictoire, à la fois qu'elles ne comportent aucune prescription d'aménagement, et qu'elles fixent de manière précise les caractéristiques des différents types de constructions envisagés.

8. L'OAP n° 1 porte sur les abords du Palais des Sports, que la commune entend aménager en vue du développement d'une offre d'hébergement hôtelier au centre-ville, de la réalisation de commerces et de restaurants, et d'y faciliter le stationnement et la circulation. Elle comprend notamment des orientations relatives à l'aménagement général du secteur, la création de voies de desserte motorisées et réservées aux modes de déplacement doux et d'espaces de stationnement. Les prescriptions relatives à l'implantation prioritaire des constructions et l'épannelage de leur gabarit portent sur les caractéristiques générales des constructions susceptibles d'y être implantées, que les auteurs d'un PLU peuvent définir dans une OAP, alors même que des prescriptions dans le même sens figurent également au règlement écrit.

9. L'OAP n° 5 relative au secteur de La Mottaz comporte, outre le maintien d'espaces verts existants, des orientations relatives à l'aménagement du secteur, contrairement à ce que soutiennent les requérants.

10. L'OAP n° 2 relative au secteur des Retornes prévoit notamment l'aménagement d'une desserte automobile et de liaison de modes doux de déplacement. Les dispositions citées au point 5 ne font pas en elles-mêmes obstacle à ce qu'une OAP envisage la réalisation d'un équipement tel qu'une voie, situé en dehors de son périmètre. A la supposer établie, une telle circonstance qu'opposent les requérants est sans incidence sur sa légalité.

11. L'OAP n° 3 relative au secteur de La Contamine prévoit l'aménagement d'un espace collectif, dont la vocation à usage de stationnement des véhicules résulte du document écrit de cette OAP.

12. Les moyens critiquant la légalité des OAP n° 6 et 7 ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

En ce qui concerne le projet d'aménagement et de développement durables :

13. Le troisième alinéa de l'article L. 123-1-3 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, applicable en vertu de l'article L. 174-3 du code de l'urbanisme cité au point 5 impose que les objectifs de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain, que devait fixer le PADD en l'état antérieur de ces dispositions, soient des objectifs chiffrés.

14. Le PADD du PLU de Megève comporte un objectif I.4. intitulé " opter pour un développement moins consommateur d'espace afin de préserver la valeur "émotionnelle" des paysages de Megève, mais aussi les grands équilibres de son territoire ". Il prévoit de procéder en priorité au confortement de l'enveloppe urbaine du centre-ville, de n'envisager qu'une extension limitée des hameaux et groupements de constructions situés sur les coteaux, de n'autoriser les extensions significatives de l'urbanisation que pour des projets porteurs d'intérêt général, et de contenir " pour les besoins du projet de territoire, la consommation de l'espace au-delà de l'enveloppe urbaine à moins de 50% de celle de la décennie antérieure ". Le PADD satisfait ainsi à l'obligation de fixer un objectif chiffré de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain en prévoyant une réduction de moitié de la consommation d'espaces, pour l'essentiel agricoles, constatée durant les dix dernières années, que justifie de manière plus précise le rapport de présentation du PLU conformément aux dispositions de l'article L. 123-1-2.

En ce qui concerne le classement des parcelles des requérants et leur localisation dans un secteur d'intérêt écologique :

15. Aux termes du 1er alinéa R. 123-7 du code de l'urbanisme, applicable aux PLU dont l'élaboration a été engagée avant le 1er janvier 2016 : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ".

16. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce PLU, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

17. Pour contester le classement en zone agricole de leurs parcelles situées lieu-dit " Moulin neuf ", les requérants font valoir qu'elles sont dépourvues de potentiel agricole et se situent au sein d'un lotissement viabilisé. La circonstance tirée de leur desserte par les réseaux ne fait par elle-même obstacle au classement contesté. Les parcelles en litige relèvent d'un ensemble de parcelles non construites, classées A, et identifiées à l'exception de la parcelle n° 103 comme relevant d'un corridor écologique à préserver reliant les deux réservoirs de biodiversité que sont les monts Joly et Aravis ainsi que d'un secteur d'intérêt écologique. Si les consorts B... invoquent la présence de talus et d'un parapet en béton le long de la route départementale 1212, cette circonstance ne suffit pas à établir que le passage de la faune ne serait pas possible. Le classement en zone agricole des parcelles en litige, vierges de construction et dont les pièces du dossier révèlent qu'elles ne sont pas dépourvues de potentiel agronomique, ainsi que leur identification au sein d'un secteur d'intérêt écologique au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme concourt à la satisfaction des objectifs que se sont donnés les auteurs du PLU et que rappelle le PADD d'opter pour un développement moins consommateur d'espace et de maintenir les continuums écologiques nécessaires à la pérennité des espèces. Dans ces conditions, et sans que les requérants puissent utilement invoquer la circonstance que leurs parcelles se trouvent proche du terrain d'assiette d'une importante opération immobilière sur le territoire de la commune de Praz-sur-Arly, le moyen selon lequel le classement en litige méconnaît les dispositions précitées de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme ou procède d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, que les consorts B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune de Megève, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Megève.

DECIDE :

Article 1er : La requête des consorts B... est rejetée.

Article 2 : Les requérants verseront la somme de 1 500 euros à la commune de Megève au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à la commune de Megève.

Délibéré après l'audience du 4 février 2020 à laquelle siégeaient :

Mme G... H..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme F... E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 25 février 2020.

2

N° 19LY01386

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01386
Date de la décision : 25/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CDMF-AVOCATS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-02-25;19ly01386 ?
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