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15/01/2020 | FRANCE | N°18LY01190

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 15 janvier 2020, 18LY01190


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Courant SAS a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er septembre 2007 au 31 décembre 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1507651 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 mars 2018, la société Courant SAS, représent

e par la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Akthis, demande à la cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Courant SAS a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er septembre 2007 au 31 décembre 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1507651 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 mars 2018, la société Courant SAS, représentée par la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Akthis, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 janvier 2018 ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas visé l'ensemble des moyens soulevés, de sorte que le jugement est irrégulier ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas pris de décision de gestion mais a commis de simples erreurs comptables en débitant le compte courant d'associé au lieu d'un compte " factures à établir ", de sorte qu'il n'y a pas eu de paiement par compensation à la clôture de l'exercice le 31 décembre 2008 ;

- l'administration a méconnu sa propre doctrine ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas justifiée ;

- cette pénalité n'est pas motivée ;

- cette pénalité est disproportionnée au regard des exigences de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la société Courant SAS n'est fondé.

Les parties ont été informées que la cour était susceptible de relever d'office un non-lieu à statuer en ce qui concerne les droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la requérante au titre de la période du 1er janvier 2007 au 30 juin 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un mémoire enregistré le 3 décembre 2019, la société Courant SAS prend acte du non-lieu à statuer résultant du dégrèvement intervenu devant le tribunal administratif, abandonne le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des impositions litigieuses et ne maintient que ses conclusions présentées au titre de la majoration pour manquement délibéré et au titre des frais de procès.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la société Courant ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Courant SAS, qui exerce une activité de holding, est la société mère de la SAS Courant et de la SAS Corelco. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008. A l'issue de ce contrôle, l'administration a procédé, suivant la procédure contradictoire, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, assortis de l'intérêt de retard et de la pénalité pour manquement délibéré. La société Courant SAS interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de décharge de ces impositions. Dans le dernier état de ses écritures, la société Courant SAS ne conteste plus que les majorations pour manquement délibéré qui lui ont été appliquées.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, contrairement à ce qu'affirme la société Courant SAS, le tribunal n'a pas omis de viser tout ou partie des moyens soulevés devant lui.

3. En second lieu, par une décision du 9 février 2017, postérieure à l'introduction de la demande devant le tribunal et antérieure au jugement attaqué, l'administration a prononcé un dégrèvement des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la requérante au titre de la période du 1er janvier 2007 au 30 juin 2008 et des pénalités correspondantes. Bien que cette décision n'ait été produite pour la première fois que devant la cour, il n'en demeure pas moins que les conclusions de la demande de la société Courant SAS relatives à cette période sont devenues sans objet dès l'instance devant le tribunal administratif. Par suite, le jugement attaqué, qui n'a pas prononcé de non-lieu à statuer consécutivement à ce dégrèvement doit, dans cette mesure, être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer les conclusions de la demande ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer. Il y a lieu d'examiner, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, le surplus des conclusions de la société Courant SAS dans les limites précisées au point 1.

Sur la majoration pour manquement délibéré :

5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. "

7. L'administration a mentionné dans la proposition de rectification les motifs de droit et de fait qui l'ont conduit à regarder la société requérante comme ayant commis un manquement délibéré. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette pénalité doit donc être écarté.

8. En deuxième lieu, au cours de la période du 1er juillet 2008 au 31 décembre 2008 restant en litige, la société Courant SAS a accompli, au profit de ses deux filiales, la SAS Courant et la SAS Corelco, des prestations de service de management et a perçu des loyers en provenance de ces dernières. Ces prestations ont été payées par compensation sur les comptes courants détenus par les deux filiales dans les comptes de leur société mère. L'administration a estimé que la taxe afférant aux prestations de loyers et de management inscrites sur les comptes courants le 31 décembre 2008, d'une part, à la SAS Corelco pour un montant de 366 339,58 euros et, d'autre part, à la SAS Corelco pour un montant de 1 059 469,42 euros était exigible à cette date. L'administration a taxé ces prestations à concurrence de la différence entre ces montants et le chiffre d'affaires déclaré au titre de la période d'août 2008 à décembre 2008, qui s'élevait à 76 810 euros, duquel elle a retranché la somme de 10 331 euros correspondant à d'autres prestations. L'administration a ainsi procédé à un rappel de 233 661 euros au titre de cette période et l'a assorti de la majoration pour manquement délibéré.

9. L'administration fait valoir que la société requérante ne pouvait ignorer les règles d'exigibilité de la taxe, lesquelles sont d'ailleurs correctement appliquées dans le reste du groupe et que la facturation aux filiales et la déclaration de la taxe correspondante ne sont intervenues qu'en mai 2009, postérieurement à l'engagement de la vérification de comptabilité. Dans ces conditions, l'administration établit l'intention d'éluder l'impôt caractérisant un manquement délibéré.

10. Enfin, les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts, qui proportionnent les pénalités aux agissements du contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de celui-ci, ne méconnaissent pas les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même qu'elles ne confèrent pas au juge un pouvoir de modulation du taux des pénalités qu'elles instituent.

11. Il résulte de ce qui précède que, sous réserve des dégrèvements mentionnés plus haut, la société Courant SAS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon n°1507651 du 23 janvier 2018 est annulé en tant qu'il n'a pas constaté un non-lieu à statuer en ce qui concerne les pénalités mis à la charge de la société Courant SAS au titre de la période du 1er janvier 2007 au 30 juin 2008.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les impositions mentionnées à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Courant SAS et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 janvier 2020.

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N° 18LY01190

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01190
Date de la décision : 15/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-01-04-03 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations. Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : AKTHIS SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-15;18ly01190 ?
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