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09/01/2020 | FRANCE | N°18LY00465

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 09 janvier 2020, 18LY00465


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

* d'annuler la décision du 9 avril 2015 par laquelle le maire de Saint-Martin-d'Hères a rejeté sa demande de versement de la nouvelle bonification indiciaire à titre rétroactif pour la période du 1er août 2011 au 4 octobre 2013 ;

* d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2014 du maire de Saint-Martin-d'Hères en tant qu'il limite la rétroactivité de l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à la période postérieure au

4 octobre 2013 ;

* de condamner la commune de Saint-Martin-d'Hères à lui verser la nouvel...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

* d'annuler la décision du 9 avril 2015 par laquelle le maire de Saint-Martin-d'Hères a rejeté sa demande de versement de la nouvelle bonification indiciaire à titre rétroactif pour la période du 1er août 2011 au 4 octobre 2013 ;

* d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2014 du maire de Saint-Martin-d'Hères en tant qu'il limite la rétroactivité de l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à la période postérieure au 4 octobre 2013 ;

* de condamner la commune de Saint-Martin-d'Hères à lui verser la nouvelle bonification indiciaire pour un montant de 1 204 euros correspondant à la période du 1er août 2011 au 4 octobre 2013, outre les intérêts au taux légal et la capitalisation de ceux-ci ;

* d'enjoindre au maire de Saint-Martin-d'Hères de régulariser ses droits à la retraite au regard des sommes dues pour cette période.

Par un jugement n° 1502840 du 30 novembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme A....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 février 2018, un mémoire, enregistré le 5 décembre 2018, et un mémoire non communiqué enregistré le 14 mai 2019, Mme A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 novembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 9 avril 2015 par laquelle le maire de Saint-Martin-d'Hères a rejeté ses demandes de versement de la nouvelle bonification indiciaire " accueil " pour la période du 1er août 2011 au 3 octobre 2013 ;

3°) de condamner la commune de Saint-Martin-d'Hères à lui verser le montant de cette nouvelle bonification indiciaire correspondant à cette période (soit 1 204 euros) augmenté des intérêts au taux légal et capitalisation de ces intérêts ;

4°) d'enjoindre à la commune de Saint-Martin-d'Hères de régulariser ses droits à la retraite ;

5°) de condamner la commune de Saint-Martin-d'Hères au paiement des dépens ;

6°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Martin-d'Hères la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

* elle était affectée à des missions d'accueil sur un temps d'ouverture au public supérieur à 50 % ;

* les missions relevant de l'accueil du public ont toujours été exercées à titre principal ;

* les autres missions ont toujours été exercées à titre accessoire ;

* en lui accordant l'octroi de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) à compter du 4 octobre 2013, la commune de Saint-Martin-d'Hères a nécessairement reconnu qu'elle consacrait plus de la moitié de son temps à des fonctions d'accueil depuis sa prise de poste en 2011 ;

* la décision est entachée d'une dénaturation des faits ;

* la commune doit être condamnée à lui verser une somme de 1 204 euros et elle doit procéder à une régularisation de ses droits à retraite.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 18 octobre 2018 et le 11 avril 2019, la commune de Saint-Martin-d'Hères représentée par la SCP F... et Jorquera et Associés conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros.

Elle soutient que :

* la requête est irrecevable faute d'être accompagnée du courrier de notification du jugement attaqué ;

* les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mai 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

* la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

* la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

* la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales ;

* le décret n° 2006-779 du 3 juillet 2006 portant attribution de la nouvelle bonification indiciaire à certains personnels de la fonction publique territoriale ;

* le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Thierry, premier conseiller,

* les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

* et les observations de Me C..., représentant Mme A..., et celles de Me F... représentant la commune de Saint-Martin-d'Hères ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., adjoint administratif, est affectée depuis sa titularisation, le 1er août 2011, au sein de la direction de l'éducation-enfance-jeunesse à la commune de Saint-Martin-d'Hères comme agent de gestion administrative. Après plusieurs demandes infructueuses d'obtenir le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire réservée aux agents exerçant des missions d'accueil à titre principal, elle a, à nouveau, formé cette demande par courrier recommandé du 4 octobre 2013. Par un arrêté du 19 décembre 2014, le maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères a décidé de lui accorder le bénéfice de cette nouvelle bonification indiciaire de 10 points à compter du 4 octobre 2013. La demande présentée par Mme A... le 5 janvier 2015 tendant à ce que le bénéfice de cette bonification prenne effet à compter de sa titularisation a été rejetée par un courrier du maire du 9 avril 2015. Mme A... relève appel du jugement du 30 novembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 9 avril 2015 et de condamnation de la commune à lui verser le montant correspondant au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire pour la période du 1er août 2011 au 4 octobre 2013.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 susvisée : " I. La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret. II. - Elle est prise en compte pour le calcul de la pension de retraite dans les conditions fixées ci-après, et elle est soumise à une cotisation pour la vieillesse. " ; L'article 1er du décret du 3 juillet 2006 susvisé dispose qu'une : " nouvelle bonification indiciaire, prise en compte pour le calcul de la retraite, est versée mensuellement aux fonctionnaires territoriaux exerçant une des fonctions figurant en annexe au présent décret ". En vertu du paragraphe n° 33 de l'annexe de ce décret, une nouvelle bonification indiciaire de 10 points est accordée pour les agents qui exercent à titre principal des fonctions d'accueil, dans les communes de plus de 5 000 habitants. Ces dispositions doivent être interprétées comme réservant le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire aux agents dont l'emploi implique qu'ils consacrent plus de la moitié de leur temps de travail total à des fonctions d'accueil du public. Pour l'application de cette règle, il convient de prendre en compte les heures d'ouverture au public du service, si l'agent y est affecté dans des fonctions d'accueil du public, ainsi que, le cas échéant, le temps passé par l'agent au contact du public en dehors de ces périodes, notamment à l'occasion de rendez-vous avec les administrés.

3. Mme A... produit sa fiche de poste, dont la commune ne soutient pas qu'elle est devenue obsolète avant le 4 octobre 2013. Ses fonctions sont ainsi définies : missions d'accueil des familles, aux inscriptions, (constitutions de dossiers et inscriptions) et encaissements ; participation aux relations avec les accueils de quartier pour le suivi des dossiers ; mise en place de la logistique pour les repas, transport et pointage CAF ; organisation administrative des séjours vacances et bilan des séjours vacances ; participation à l'élaboration du guide vacances été ; participation à la préparation des marchés publics ; établissement des factures, certificats de présence devis et autres documents ; gestion et suivi des aides financières destinées aux familles ; élaboration du planning des classes de découvertes ; participation à l'activité générale du service (suivi de dossier, secrétariat, suivi des prêts de locaux). Mme A... qui travaillait pendant la période litigieuse cinq jours par semaine, sauf le mercredi après-midi, était susceptible, en raison des horaires d'ouverture du service au public, d'accueillir du public trois matinées et quatre après-midis par semaine et expose que cet accueil occupait l'essentiel de son temps.

4. Elle indique ainsi qu'elle procédait à l'accueil des familles pour des explications, des inscriptions, des encaissements, l'établissement de factures ou d'autres documents pour l'accueil de loisirs des enfants, les séjours vacances ou séjours de classes découvertes, que les familles réglaient le plus souvent hebdomadairement et en espèces. Elle expose sans être contredite que ces diverses tâches, ainsi que l'établissement des divers documents, se faisaient au moment de la réception des familles. A l'appui de ces affirmations Mme A... produit pour la première fois en appel une attestation précise et circonstanciée de sa cheffe de service pendant la période en litige selon laquelle elle " consacrait largement plus de la moitié de son temps de travail à des missions d'accueil du public et ses fonctions n'ont pas évolué depuis le jour de sa prise de poste en août 2011 jusqu'à la réorganisation en mars 2015 ". Selon ce document Mme A... pouvait recevoir quotidiennement, physiquement et téléphoniquement, entre une douzaine de personnes durant les journées les moins chargées et jusqu'à plusieurs dizaines de personnes par jour, durant les périodes de haute activité et " l'établissement d'un dossier pouvait prendre vingt minutes voire plus longtemps en cas de fratrie ou de familles en difficulté (établissement de devis, échelonnement de paiement...) ". Enfin, " le bureau d'accueil étant placé à l'entrée du bâtiment des services éducatifs, Mme A... était amenée à renseigner le public qui venait pour le service petite enfance ou restauration scolaire. ".

5. Si la commune de Saint-Martin-d'Hères fait valoir que les inscriptions pour le centre de loisirs du Murier se faisaient principalement dans les maisons de quartier, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause les indications contenues dans cette attestation, la commune ne précisant pas le nombre de personnes accueillies dans ses maisons de quartier, ni les conditions de leur ouverture au public.

6. Par ailleurs Mme A... indique que ses missions qui étaient sans lien avec l'accueil du public et qu'elle accomplissait en dehors de sa présence, telles que mise en place de la logistique pour les repas, sa participation ponctuelle et limitée à l'élaboration du guide de vacances d'été, comme à la préparation des marchés publics ainsi que les paramétrages des séjours n'occupaient qu'une partie résiduelle de son temps de travail. La commune de Saint-Martin-d'Hères ne produit pas d'éléments de nature à contredire cette affirmation.

7. Dans ces circonstances, dès lors qu'il n'est pas contesté que les fonctions de Mme A... n'ont pas changé depuis sa titularisation jusqu'au 4 octobre 2013, elle est fondée à soutenir que la décision du maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères, refusant de lui accorder la nouvelle bonification indiciaire depuis sa titularisation, méconnaît les dispositions citées au point 2 du présent arrêt. Il s'ensuit que le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 novembre 2017 rejetant sa demande d'annulation de cette décision du 9 avril 2016 doit être annulé.

Sur les conclusions à fin de condamnation :

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à demander, outre l'annulation de la décision litigieuse, la condamnation de la commune de Saint-Martin-d'Hères à lui verser le montant de la somme équivalent à 10 points de nouvelle bonification indiciaire pendant la période du 1er août 2011 au 3 octobre 2013, dans la limite des 1 204 euros qu'elle demande.

9. Mme A... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité en capital prévue au point précédent à compter du 5 janvier 2015, date de remise de la demande d'indemnisation préalable au maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères. Ces intérêts porteront capitalisation à compter du 5 janvier 2016 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes des intérêts.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. En application des dispositions précitées de l'article 27 de la loi du 18 juillet 1991, la nouvelle bonification indiciaire étant prise en compte pour le calcul de la pension de retraite, Mme A... est fondée à demander, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative à ce qu'il soit enjoint au maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères de régulariser ses droits à la retraite en prenant en compte la nouvelle bonification indiciaire à laquelle elle a droit au titre de la période du 1er août 2011 au 3 octobre 2013. Il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire de prescrire au maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères cette mesure dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions relatives aux frais d'instance :

11. En l'absence de dépens dans la présente instance, les conclusions de Mme A... tendant à la condamnation de la commune de Saint-Martin-d'Hères au paiement de ceux-ci doivent être rejetées.

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de la commune de Saint-Martin-d'Hères une somme de 1 500 euros qu'elle paiera à Mme A..., au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a exposés.

13. Ces mêmes dispositions, faisant obstacle à ce que soit mis à charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de la commune de Saint-Martin-d'Hères en ce sens doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1502840 du tribunal administratif de Grenoble du 30 novembre 2017 et la décision du 9 avril 2015 du maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères sont annulés.

Article 2 : La commune de Saint-Martin-d'Hères est condamnée à verser à Mme A... le montant de la somme équivalent à 10 points de nouvelle bonification indiciaire pour la période du 1er août 2011 au 3 octobre 2013, dans la limite de 1 204 euros.

Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Saint-Martin-d'Hères de procéder à la régularisation des droits à la retraite de Mme A..., compte tenu du montant prévu à l'article 2 du présent arrêt, dans le délai de deux mois à compter de sa notification.

Article 4 : La somme prévue à l'article 2 portera intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2015. Ces intérêts porteront capitalisation à compter du 5 janvier 2016 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : La commune de Saint-Martin-d'Hères versera une somme de 1 500 euros à Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 : Les conclusions de la commune de Saint-Martin-d'Hères relatives aux frais non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et à la commune de Saint-Martin-d'Hères.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme E... B..., présidente de chambre,

Mme G..., présidente-assesseure,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2020.

No 18LY004652


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY00465
Date de la décision : 09/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP FESSLER et JORQUERA ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-09;18ly00465 ?
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