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19/12/2019 | FRANCE | N°19LY00228

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 19 décembre 2019, 19LY00228


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme H... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire sous trente jours et a désigné la Côte-d'Ivoire comme pays de renvoi.

Par jugement n° 1802160 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, Mme A..., représentée par

Me E... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme H... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire sous trente jours et a désigné la Côte-d'Ivoire comme pays de renvoi.

Par jugement n° 1802160 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, Mme A..., représentée par Me E... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler la décision du préfet de l'Yonne du 26 juillet 2018 lui ayant refusé un titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français dans les trente jours vers la Côte-d'Ivoire ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ".

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'était pas compétent pour statuer sur le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité de son fils par M. F... et remettre en cause sa filiation ;

- les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 avril 2019, le préfet de l'Yonne, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête de Mme A... en soutenant que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller,

- les observations de Me B..., substituant Me C... pour le préfet de l'Yonne ;

Considérant que :

1. Mme A..., ressortissante ivoirienne née le 15 août 1984, entrée irrégulièrement sur le territoire français le 6 août 2014, relève appel du jugement du 17 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de l'Yonne du 26 juillet 2018 refusant de renouveler son titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger (...) qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ".

3. Si un acte de droit privé opposable aux tiers est, en principe, opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé. Ce principe peut conduire l'administration, qui doit exercer ses compétences sans pouvoir renvoyer une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, à ne pas tenir compte, dans l'exercice de ces compétences, d'actes de droit privé opposables aux tiers. Tel est le cas pour la mise en oeuvre des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'ont pas entendu écarter l'application des principes ci-dessus rappelés. Par conséquent, si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il dispose d'éléments précis et concordants de nature à établir, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou après l'attribution de ce titre, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français ou de procéder, le cas échéant, à son retrait.

4. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de renouveler le titre de séjour de Mme A... en qualité de mère d'un enfant français, le préfet de l'Yonne s'est fondé sur les circonstances relatives à l'absence de participation financière à l'entretien de l'enfant de la requérante né de sa relation avec M. D... G... F..., ressortissant français, de l'absence de vie commune lors de la naissance de leur enfant alors que M. F... est marié depuis 2005 et a deux enfants de cette union, qu'il a procédé à la reconnaissance de cet enfant concomitamment à l'acquisition de la nationalité française et qu'enfin, M. F... n'exerce pas même partiellement, l'autorité parentale sur l'enfant. Toutefois, ces seules circonstances, contestées par la requérante quant à la participation du père de son enfant à son entretien et son éducation, ne permettent pas à elles seules, de démontrer le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité en cause et de considérer qu'elle n'aurait été souscrite que dans le but de faciliter l'obtention d'un titre de séjour à la requérante.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Yonne ne pouvait refuser, pour ce motif, de délivrer à Mme A... un titre de séjour sans méconnaître les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En conséquence, le refus de titre de séjour en litige et, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et la décision fixant le pays de renvoi dont ce refus est assorti, sont entachés d'illégalité et doivent être annulés.

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande et à demander l'annulation de ce jugement ainsi que de l'arrêté du 26 juillet 2018.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

8. Eu égard au motif qui fonde l'annulation des décisions en litige et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans la situation de droit ou de fait de la requérante y fasse obstacle, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de l'Yonne délivre à Mme A... la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " prévue au 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En conséquence, il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens et de lui impartir un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

DÉCIDE :

Article1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 17 décembre 2018 et l'arrêté du 26 juillet 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de renouveler le titre de séjour de Mme A..., l'a obligée à quitter le territoire sous trente jours et a désigné la Côte-d'Ivoire comme pays de renvoi sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Yonne de délivrer à Mme A... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne et au procureur près du tribunal de grande instance d'Auxerre.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2019.

N° 19LY00228 2

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00228
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : JEARALLY

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-19;19ly00228 ?
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