La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2019 | FRANCE | N°18LY03350

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 17 décembre 2019, 18LY03350


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la réduction, à hauteur des sommes de 13 201 euros, 18 838 euros et 17 357 euros, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti respectivement au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1602088 du 26 juin 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 31 août 2018, M. E..., représ

enté par Me I... et Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la réduction, à hauteur des sommes de 13 201 euros, 18 838 euros et 17 357 euros, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti respectivement au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1602088 du 26 juin 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 31 août 2018, M. E..., représenté par Me I... et Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 26 juin 2018 ;

2°) de prononcer la décharge partielle, à hauteur des sommes de 13 201 euros, 18 838 euros et 17 357 euros, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti respectivement au titre des années 2012, 2013 et 2014 ;

3°) d'ordonner le remboursement des impositions déjà payées, majorées des intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. E... soutient que :

- le revenu fiscal de référence, sur lequel est assise la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, ne pouvait inclure ses bénéfices industriels et commerciaux de source allemande, dès lors que ces revenus, qui sont uniquement imposables en Allemagne, sont exonérés d'impôt sur le revenu en France et uniquement pris en compte pour le calcul du taux effectif pour l'application de la convention fiscale signée entre la France et la République fédérale d'Allemagne le 21 juillet 1959 ;

- il peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction fiscale publiée au Bulletin officiel des finances publiques du 27 novembre 2012 sous la référence BOI-IR-CHR, paragraphes 270 et 280, selon laquelle les revenus de source étrangère perçus par un résident français sont exonérés de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ;

- il peut également se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la position prise par l'administration sur sa situation dès lors que l'administration a prononcé le dégrèvement de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il avait été assujetti au titre de l'année 2011.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention conclue le 21 juillet 1959 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle le président de la cour a désigné Mme F... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteure publique en application des articles R. 222-24, 2nd alinéa et R. 222-32 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... C..., présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme H... F..., rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., qui dispose en France de son foyer permanent d'habitation, a perçu, au titre des années 2012, 2013 et 2014, des revenus en sa qualité d'associé de la société allemande A. E... GmbH et Co KG, qu'il a déclarés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et à raison desquels il a été assujetti à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre des années 2012, 2013 et 2014. M. E... a présenté une réclamation tendant à la réduction de ces impositions, au motif, d'une part, que ses revenus de source allemande ne pouvaient être intégrés dans le revenu fiscal de référence sur lequel est assise la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, et, d'autre part, que la doctrine administrative exonère ces revenus de la contribution. Il relève appel du jugement du 26 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. L'article 223 sexies du code général des impôts institue " à la charge des contribuables passibles de l'impôt sur le revenu une contribution sur le revenu fiscal de référence du foyer fiscal, tel que défini au 1° du IV de l'article 1417 ", calculée par application de taux fixés par cet article aux fractions du revenu fiscal de référence supérieures à certains seuils définis en fonction de la composition du foyer fiscal. Aux termes du IV de l'article 1417 du même code, le montant du revenu fiscal de référence du foyer fiscal " s'entend du montant net (...) des revenus et plus-values retenus pour l'établissement de l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente. Ce montant est majoré : (...) c) du montant des revenus (...) exonérés par application d'une convention internationale relative aux doubles impositions (...) ".

3. Aux termes du paragraphe 3 de l'article 4 de la convention signée entre la France et l'Allemagne le 21 juillet 1959, telle qu'elle a été modifiée par les avenants du 9 juin 1969, du 28 septembre 1989 et du 20 décembre 2001 : " Les participations d'un associé aux bénéfices d'une entreprise constituée sous forme de société de droit civil, de société en nom collectif ou de société en commandite simple ainsi que les participations aux bénéfices d'une " société de fait ", d'une " association en participation " ou d'une " société civile " de droit français ne sont imposables que dans l'Etat où l'entreprise en question a un établissement stable, mais en proportion seulement des droits de cet associé dans les bénéfices dudit établissement ". Aux termes du paragraphe 6 de l'article 9 de cette convention : " Le terme " dividendes " employé dans le présent article désigne les revenus provenant d'actions, actions ou droits de jouissance, parts de mine, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires à l'exception des créances ". Aux termes du paragraphe 7 de ce même article : " Dans la mesure où les dispositions des articles 4 et 6 confèrent à la France le droit d'imposer les bénéfices des sociétés mentionnées au paragraphe (3) de l'article 4, les revenus provenant de ces bénéfices, qui sont regardés comme des dividendes au sens de la législation française, sont imposables selon les dispositions du paragraphe (2) du présent article. ". Aux termes de l'article 18 de la même convention : " Les revenus non mentionnés aux articles précédents ne sont imposables que dans l'Etat contractant dont le bénéficiaire de ces revenus est résident ". Enfin, aux termes de l'article 20 de la même convention : " En ce qui concerne les résidents de France, la double imposition est évitée de la façon suivante : a) Les bénéfices et autres revenus positifs qui proviennent de la République fédérale et qui y sont imposables conformément aux dispositions de la présente Convention sont également imposables en France lorsqu'ils reviennent à un résident de France. L'impôt allemand n'est pas déductible pour le calcul du revenu imposable en France. Mais le bénéficiaire a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français dans la base duquel ces revenus sont compris. Ce crédit d'impôt est égal à :(...) (cc) Pour tous les autres revenus, au montant de l'impôt français correspondant à ces revenus. Cette disposition est notamment applicable aux revenus visés aux articles 3, 4, paragraphes (1) et (3), 6, paragraphe (1), 12, paragraphe (1), 13, paragraphes (1) et (2), et 14. "

4. Il résulte de ces stipulations que les revenus versés à M. E..., résident fiscal français, par la société A. E... GmbH et Co KG, société en commandite de droit allemand, en sa qualité d'associé de cette société, qui sont imposables en Allemagne en vertu du paragraphe 3 de l'article 4 de la convention fiscale franco-allemande, sont également pris en compte pour le calcul de l'impôt dû en France en application du a) de l'article 20 de la convention. Dans ces conditions, ces revenus, s'ils ne peuvent être regardés comme étant exonérés par application d'une convention internationale relative aux doubles impositions, font néanmoins partie du montant net des revenus et plus-values retenus pour l'établissement de l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente pour l'application du IV de l'article 1417 du code général des impôts. Par suite, c'est par une exacte application de la loi fiscale que l'administration les a inclus dans le revenu fiscal de référence pris en compte pour le calcul de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle M. E... a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales. ". La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A s'applique également, aux termes du 1° de l'article L. 80 B du même livre, lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal.

6. D'une part, M. E... ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 280 de l'instruction fiscale publiée au Bulletin officiel des finances publiques du 27 novembre 2012 sous la référence BOI-IR-CHR, qui précise que " les revenus exonérés d'impôt sur le revenu en France en application des conventions fiscales internationales, y compris ceux pris en compte pour le calcul du taux effectif en matière d'impôt sur le revenu, sont exonérés de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ", dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 4, ses revenus de source allemande ne sont pas exonérés d'impôt sur le revenu en France.

7. D'autre part, si M. E... fait valoir que l'administration a accordé le dégrèvement partiel de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2011, il ne produit pas cette décision. Dans ces conditions, il ne peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, d'une prise de position formelle de l'administration sur l'application de l'article 223 sexies pour contester la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à laquelle il a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.

8. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à la restitution des impositions, au versement d'intérêts moratoires et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme C..., présidente-assesseure,

Mme B..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2019.

2

N° 18LY03350

ld


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03350
Date de la décision : 17/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme TERRADE
Avocat(s) : LEXAN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-17;18ly03350 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award