La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/12/2019 | FRANCE | N°19LY01251

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 05 décembre 2019, 19LY01251


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions de la préfète de l'Allier du 30 mai 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office.

Par un jugement n° 1801606 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requ

ête, enregistrée le 3 avril 2019, Mme B..., représentée par Me Gauché, avocat, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions de la préfète de l'Allier du 30 mai 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office.

Par un jugement n° 1801606 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 avril 2019, Mme B..., représentée par Me Gauché, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 décembre 2018 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir ; à titre subsidiaire, d'enjoindre à la préfète de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de deux jours suivant la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

- elle est entachée d'un vice de procédure, l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ayant été rendu en méconnaissance des dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet s'est senti lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- elle est entachée d'une erreur de fait dans l'application des dispositions combinées des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de traitement effectivement disponible au Kosovo ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du même code ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et sera annulée en conséquence de l'annulation de cette dernière ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et sera annulée en conséquence de l'annulation de cette dernière.

Par un mémoire, enregistré le 7 octobre 2019, la préfète de l'Allier conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante du Kosovo née le 9 juin 1996, est arrivée en France le 24 septembre 2012, à l'âge de seize ans, selon ses déclarations, avec ses parents. Elle a présenté une demande d'asile, qui a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 21 octobre 2014. Le 24 septembre 2015, elle s'est vu délivrer, en même temps que ses parents, une carte temporaire de séjour au titre de sa vie privée et familiale, eu égard en particulier à l'état de santé de son père. Par un arrêté du 30 mai 2018, la préfète de l'Allier lui a refusé le renouvellement de ce titre de séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi. Mme B... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis rendu le 19 avril 2018 par le collège de médecins de l'OFII, concernant l'état de santé du père de la requérante, a été signé par les trois praticiens qui le composent. Cette circonstance établit qu'il a été émis à l'issue d'une délibération collégiale. Par suite, Mme B... ne peut soutenir que la décision contestée est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, alors, en outre, que cet avis du collège de médecins de l'OFII n'a pas été émis dans le cadre de la procédure ayant conduit à l'édiction de la décision qui la concerne.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des éléments versés au dossier que la préfète se serait crue liée par cet avis ni que sa décision de refus ait été prise sans avoir été précédée d'un examen particulier de la demande. Par suite, la préfète n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence.

4. En troisième lieu, la requérante soutient que la préfète de l'Allier, qui a refusé de renouveler le titre de séjour accordé initialement le 24 septembre 2015 en sa qualité d'accompagnante de son père malade, a commis une erreur de fait en suivant l'avis du collège de médecins de l'OFII, selon lequel si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Kosovo. Toutefois, elle se borne à verser au dossier des éléments généraux issus d'une publication de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés sur le traitement des troubles psychiques dans ce pays, ainsi qu'un bilan psychiatrique datant de 2013 dressé en vue d'un placement de son père sous tutelle, selon lequel il souffrait d'un " état de stress post-traumatique à forme anxio-dépressive " associant " passivité, dépendance à autrui et surtout un refus actif de prendre position sur quoi que ce soit ", pathologie " conduisant à un handicap social sévère ", susceptible d'une évolution favorable, mais impossible à pronostiquer. Ces éléments ne sont pas de nature à contredire l'avis médical émis le 19 avril 2018 par le collège de médecins de l'OFII. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît les dispositions combinées des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée (...) à l'étranger (...) dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".

6. Mme B... fait valoir qu'elle séjourne depuis septembre 2012 en France, pays dont elle parle la langue, où elle s'est mariée le 25 janvier 2019 avec un compatriote en situation régulière et où se trouve l'essentiel de ses attaches familiales, et que l'état de santé de son père nécessite une prise en charge qui n'est pas envisageable au Kosovo. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ses parents font l'objet de mesures d'éloignement, dont la légalité a été contestée en vain devant la cour, et que son père est en mesure de se faire soigner au Kosovo. Son mariage, célébré huit mois après la décision contestée, alors au demeurant que les futurs époux ne pouvaient ignorer que Mme B... ne disposait d'aucun droit au séjour en France, est sans incidence sur la légalité de cette décision qui doit être appréciée à la date de son édiction, la requérante ne justifiant nullement de l'ancienneté et de la stabilité de leur relation à la date de ce refus. Ainsi, la situation de Mme B... ne saurait être regardée comme relevant de considérations humanitaires exceptionnelles ou de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 précité. Par la production d'un diplôme de brevet d'études professionnelles " Métiers de la relation aux clients et aux usagers -qualification langue espagnole " et de bulletins de salaire attestant qu'elle a occupé différents emplois, généralement de courte durée et à temps très partiel, dans la restauration rapide et le nettoyage, entre novembre 2015 à juillet 2016, puis de février 2017 à mai 2018, l'intéressée ne justifie pas de motifs exceptionnels d'admission au séjour. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour, la préfète de l'Allier aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Il résulte de ce qui a été dit que Mme B... ne peut exciper, au soutien des conclusions de sa requête dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

Sur la décision de la décision désignant le pays de destination :

8. Il résulte de ce qui a été dit que Mme B... ne peut exciper, au soutien des conclusions de sa requête dirigées contre la décision désignant le pays de destination, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à la mise à la charge de l'État des frais exposés à l'occasion de l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Rémy-Néris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.

Le rapporteur,

Ph. SeilletLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

S. Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

1

2

N° 19LY01251


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01251
Date de la décision : 05/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : AD'VOCARE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-05;19ly01251 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award