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05/12/2019 | FRANCE | N°19LY00972

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 05 décembre 2019, 19LY00972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 2 octobre 2018 par lesquelles le préfet de la Nièvre a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802750 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 mars 2019, Mme A..., représentée p

ar la SCP Bon de Saulce Latour, avocats , demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 2 octobre 2018 par lesquelles le préfet de la Nièvre a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802750 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 mars 2019, Mme A..., représentée par la SCP Bon de Saulce Latour, avocats , demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 31 janvier 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 2 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Nièvre de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les articles L. 313-11 7° et 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle se fonde sur une base légale inexistante ; elle a été prise sans que l'autorisation provisoire de séjour ne lui ait été retirée et avant son expiration ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2019, le préfet de la Nièvre conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme A... a été rejetée par une décision du 17 avril 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme E..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... A... épouse B..., née le 21 juin 1959, de nationalité malienne, est entrée en France le 8 septembre 2012 sous couvert d'un visa touristique. Elle a obtenu le 7 août 2014 un titre de séjour en qualité " d'étranger malade ". Par décisions du 2 octobre 2018 le préfet de la Nièvre a refusé de renouveler ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement en date du 31 janvier 2019, par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ".

3. Par avis du 27 décembre 2018, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, a estimé que l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, vers lequel elle peut voyager sans risque, elle peut effectivement y bénéficier d'un traitement approprié.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été opérée le 28 juin 2012 d'un cancer du sein qui nécessiterait que soit pratiquée une chirurgie reconstructive. Elle a subi de la radiothérapie au mois d'octobre 2012, puis a été mise sous hormonothérapie. Elle était, à la date de la décision litigieuse, toujours sous hormonothérapie. Elle bénéficie régulièrement d'examens afin de surveiller une éventuelle rechute de son cancer. Elle souffre d'un lymphoedème du membre supérieur droit, ce qui est une complication courante de la chirurgie qu'elle a subie, qui nécessite un drainage lymphatique tous les ans. En janvier 2017, des lésions de l'endomètre ont été diagnostiquées. S'agissant des lésions de l'endomètre, si le compte-rendu établi par le frère médecin de Mme A... indique que ces lésions pourraient être le point de départ d'un autre cancer gynécologique, un certificat du 15 février 2017 indique, sur ces mêmes lésions, une " absence de structure suspecte de malignité ". Mme A... qui ne nécessitait plus, à la date du refus de renouvellement de titre de séjour, ni de chimiothérapie ni de radiothérapie, ne peut utilement se prévaloir, pour contester le refus de renouvellement de titre de séjour, des défaillances des hôpitaux maliens dans ces domaines. Il ne ressort pas des pièces médicales qu'elle verse au débat qu'elle ne pourrait effectivement faire l'objet d'un suivi médical approprié au Mali ainsi que d'un traitement hormonal, alors même qu'ils ne seraient pas équivalents à ceux dont elle a bénéficié en France. Mme A... souffre également d'un diabète de type 2, ayant conduit à deux opérations de la cataracte en 2018, ainsi que d'une hypercholestérolémie familiale traitée par deux médicaments. S'agissant de ces deux pathologies, Mme A... ne soutient pas qu'elle ne pourrait bénéficier des soins appropriés au Mali. Le préfet de la Nièvre a d'ailleurs produit des documents attestant de la prise en charge de ces pathologies au Mali. Par suite, en rejetant la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par Mme A..., le préfet de la Nièvre n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En second lieu, en vertu du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit, sous réserve de la menace à l'ordre public : " A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., née en 1959, dont le conjoint et les quatre enfants majeurs résident au Mali, est arrivée en France en septembre 2012 avec un visa " tourisme " et a obtenu un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Elle a vécu la majeure partie de sa vie au Mali, où elle s'est rendue à plusieurs reprises depuis 2012 et où elle pourra recevoir les soins que son état de santé nécessite. Seul un de ses frères, médecin, de nationalité française, réside en France. Par suite, les moyens tirés de ce que le refus de titre de séjour litigieux porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaitrait, par suite, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, doit être écarté le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.

8. En deuxième lieu, le récépissé de demande de carte de séjour délivré à Mme A... dans le cadre de l'examen de sa demande de renouvellement de titre, qui était valable jusqu'au 17 octobre 2018, doit être regardé comme ayant été implicitement mais nécessairement abrogé par le refus de séjour qui lui a été opposé le 2 octobre 2018. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français a été prise sans que l'autorisation provisoire de séjour ne lui ait été retirée et avant son expiration.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, la décision obligeant Mme A... à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

10. En dernier lieu, Mme A... reprend en appel le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français se fonderait sur une base légale inexistante, moyen auquel le tribunal a exactement et suffisamment répondu. Il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter ce moyen.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme C..., présidente assesseure,

Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.

La rapporteure,

A. E... Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

C. Langlet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 19LY00972

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00972
Date de la décision : 05/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP BON - DE SAULCE LATOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-05;19ly00972 ?
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