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05/11/2019 | FRANCE | N°18LY04440

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 05 novembre 2019, 18LY04440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. N... C... et autres ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2016 par lequel le maire de la commune d'Arâches-La-Frasse a accordé un permis de construire à la SAS Terresens, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1701930 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 décemb

re 2018 et 13 août 2019, M. C... et autres, représentés par la SELARL CDMF-Avocats Affaires Pub...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. N... C... et autres ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2016 par lequel le maire de la commune d'Arâches-La-Frasse a accordé un permis de construire à la SAS Terresens, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1701930 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 décembre 2018 et 13 août 2019, M. C... et autres, représentés par la SELARL CDMF-Avocats Affaires Publiques, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 4 octobre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté de permis de construire du 3 octobre 2016 ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la commune d'Arâches-La-Frasse et de la SAS Terresens une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- Mme E... I..., dont le troisième prénom est Clothilde, était bien partie en première instance ;

- la requête n'est pas tardive ;

- les justificatifs de la notification de la requête conformément à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ont été produits ;

- ils justifient d'un intérêt pour agir eu égard à leur situation de voisins immédiats du projet de construction qui affectera les conditions de jouissance et d'utilisation des biens dont ils sont propriétaires ;

- alors que le projet porte sur un établissement recevant du public (ERP), le dossier ne comportait pas les éléments concernant la possibilité de vérifier la conformité du projet avec les règles en matière d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite et en matière de sécurité ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté leur moyen tiré de l'absence d'autorisation du conseil municipal pour réaliser des travaux sur la parcelle communale, selon l'argumentation développée en première instance;

- le dossier de demande n'a pas permis au service instructeur de déterminer les besoins en stationnement pour le bâtiment à destination de service public ou d'intérêt collectif ;

- les accès et la voirie du projet méconnaissent les exigences de l'article UA 3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article UA 7 du règlement du PLU, dès lors que la distance minimum de 4 mètres par rapport à la limite séparative avec la parcelle n° 1729 qu'impose cet article n'est pas respectée ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article UA 11 du règlement du PLU, compte tenu de l'atteinte à l'intérêt des lieux que porte le projet qui, en outre, méconnaît les prescriptions de ce même article relatives aux caractéristiques des toitures ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article UA 12 du règlement du PLU ; les neuf places affectées à l'office du tourisme ne peuvent relever de la copropriété et certaines places de stationnement en enfilade ne sont pas accessibles, alors que le projet prévoit exactement le nombre de places de stationnement exigé.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 juillet 2019 et 2 septembre 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune d'Arâches-La-Frasse, représentée par la SELARL Conseil Affaires Publiques Me D... F..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'appel est irrecevable en tant qu'il émane de Mme E... I..., qui n'était pas partie en première instance ;

- la requête est irrecevable pour tardiveté compte tenu de la notification électronique du jugement via l'application télérecours dès le 8 octobre 2018, à tout le moins, par courrier recommandé à M. G... C..., premier désigné de la requête de première instance ;

- il n'est pas justifié du respect des formalités de notification de la requête d'appel conformément à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les requérants n'ont pas intérêt pour agir à l'encontre du permis de construire en litige ;

- le moyen tiré de l'absence d'autorisation du conseil municipal, qui se borne à renvoyer aux écritures de première instance, est irrecevable ;

- la parcelle n° 1729 est une emprise publique à laquelle ont seule vocation à s'appliquer les dispositions de l'article UA 6 du règlement du PLU ; en tout état de cause, la limite séparative avec la parcelle n° 1729 est une limite latérale par rapport au chemin rural ;

- les autres moyens soulevés sont infondés.

Par un courrier du 17 septembre 2019, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de retenir le moyen tiré de la violation de l'article UA 7 du règlement du plan local d'urbanisme et de faire application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire, enregistré le 18 septembre 2019, la société Terresens, représentée par la SELARL LEGA-CITE, conclut au rejet de la requête, subsidiairement, à ce que la cour fasse application des dispositions de l'article L. 600-5-1, et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle s'en rapporte aux développements de la commune s'agissant de l'intérêt à agir des requérants ;

- les moyens soulevés sont infondés.

En réponse au courrier du 17 septembre 2019, M. C... et autres ont produit un mémoire, enregistré le 23 septembre 2019, qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme K... J..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Jean Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me H... représentant M. C... et autres, celles de Me B... représentant la commune d'Arâches-La-Frasse ainsi que celles de Me A... représentant la société Terresens.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 3 octobre 2016, le maire de la commune d'Arâches-La-Frasse a accordé un permis de construire à la SAS Terresens pour la construction d'un ensemble composé d'une arcade commerciale/tertiaire comprenant au rez-de-chaussée un office de tourisme au profit de la commune, de 22 logements et de stationnements couverts et aériens. M. C... et autres relèvent appel du jugement du 4 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande dirigée contre cet arrêté, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Sur la légalité du permis de construire du 3 octobre 2016 :

En ce qui concerne la fraude et l'exception d'illégalité de la délibération du 15 décembre 2015 :

2. Les requérants reprennent en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, leurs moyens de première instance selon lesquels le permis de construire a été délivré en méconnaissance des articles R. 423-1, R. 431-5 du code de l'urbanisme et L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme :

3. Les requérants reprennent également en appel, sans le développer, leur moyen tiré des insuffisances dans la composition du dossier de demande de permis de construire au titre des établissements recevant du public. Il y a également lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.

En ce qui concerne la méconnaissance du règlement du PLU :

S'agissant de l'article UA 3 :

4. D'une part, aux termes du paragraphe 3.1 de l'article UA 3 du règlement du PLU, relatif aux accès : " Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise un droit de passage suffisant, institué par acte authentique ou par voie judiciaire, en application de l'article 682 du Code Civil. / Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur celle de ces voies qui présenterait une gêne ou un risque pour la circulation peut être interdit. / Toute opération doit prendre le minimum d'accès sur les voies publiques. Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. Le raccordement d'un accès privé à une voie publique présentera une surface dégagée sur une longueur d'au moins 5 m à partir de la chaussée de la voie publique existante ou à projeter ; la pente de cette partie de l'accès ne sera pas supérieure à 3% ".

5. Le projet comporte un accès à la voie publique, situé au Sud-Ouest, commun au bâtiment et aux aires de stationnement couverts et aériens, et débouchant sur la route départementale, dite route de Flaine. Les deux accès prévus à l'Est du projet, l'un pour les piétons, l'autre pour les véhicules à moteur, aboutissent sur un chemin rural. Dès lors les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet multiplie les accès sur les voies publiques au sens des dispositions citées au point précédent. Il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que la vitesse sur la route départementale est limitée à 50 km/heure et qu'il ménage une bonne visibilité aux automobilistes, que cet accès ne permettrait pas une desserte sécurisée du projet. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la pente de la plateforme d'attente se raccordant à la voie publique excèderait 3 %.

6. D'autre part, aux termes du paragraphe 3.2 de cet article : " Voiries : / Toute autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol peut être subordonnée à la réalisation d'aménagements spécifiques qui rendent satisfaisantes les conditions de sécurité du raccordement de l'opération à la voie publique; en tout état de cause : / - la largeur de plate forme des voies privées nouvelles ne pourra être inférieure à 5 m, sauf empêchement technique et 12% de pente maximum. / (...) Les voies privées nouvelles devront de préférence être raccordées aux deux extrémités aux voies publiques ou privées existantes ou à créer. (...) / Les voies privées nouvelles en impasse devront être aménagées dans leur partie terminale afin de permettre aux véhicules privés et à ceux des services publics (lutte contre l'incendie, enlèvement des ordures ménagères, déneigement, stockage de la neige etc.) de faire demi-tour (...) ". Les voies auxquelles ces dispositions s'appliquent sont les voies d'accès au terrain d'assiette des constructions et non les voies internes à ce terrain. Les requérants ne peuvent ainsi utilement faire valoir que la voirie interne ne répond pas aux exigences de l'article 3.2., en ce qu'elle n'est pas raccordée aux deux extrémités aux voies publiques ou privées existantes ou à créer, ne comporte pas d'aire de retournement en partie terminale et serait trop pentue.

S'agissant de l'article UA 7 :

7. Aux termes de l'article UA 6 du règlement du PLU, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques et emprises publiques : " 6-0 -Généralités / Les voies entrant dans le champ d'application du présent article sont les voies publiques, les chemins ruraux, les voies privées ouvertes à la circulation publique (...) ". Aux termes de l'article UA 7 de ce règlement relatif à l'implantation des constructions par rapport aux propriétés voisines : " (...) / 7-1 - Implantation / Les constructions principales doivent respecter un recul minimum de 4 m par rapport aux limites des propriétés voisines ; toutefois, sur une profondeur maximale de 25 m à partir des voies et emprises publiques, les bâtiments peuvent être implantés jusqu'en limites séparatrices latérales (...) ". L'article 7 du règlement du PLU régit l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives du terrain d'assiette, c'est-à-dire celles qui ne sont pas bordées par des voies ou emprises publiques au sens de l'article 6 de ce règlement.

8. Ainsi que le soutiennent les requérants en appel, le projet de construction est implanté à moins de 4 mètres de la parcelle n° 1729 supportant l'église. La limite entre cette parcelle et le terrain d'assiette du projet qui à cet endroit n'est pas bordée par une emprise publique contrairement à ce que fait valoir principalement la commune, constitue une limite séparative à laquelle ont seule vocation à s'appliquer les dispositions de l'article UA 7 citées au point précédent. Toutefois, elle constitue une limite séparatrice latérale par rapport au chemin rural situé à l'est, qui constitue une voie publique au sens des articles UA 6 et UA 7 précités. Dès lors que le bâtiment projeté est implanté sur une profondeur inférieure à 25 mètres à compter de ce chemin, la commune est fondée à invoquer le bénéfice de l'exception prévue par l'article UA 7 et permettant sur cette profondeur une implantation des bâtiments jusqu'en limite séparatrice latérale. Le moyen tiré de la méconnaissance de la règle de prospect prescrite par l'article UA 7 du règlement du PLU doit, par suite, être écarté.

S'agissant de l'article UA 11 :

9. Aux termes de l'article UA 11 du règlement du PLU, régissant l'aspect extérieur des constructions : " Le projet peut être refusé ou assorti de prescriptions dès lors qu'il est de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, à la conservation des perspectives monumentales, ainsi qu'à l'identité architecturale de la station de FLAINE. "

10. D'une part, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que, par le traitement des ouvertures en façade, son gabarit ou sa hauteur, le projet ne s'insérerait pas convenablement dans son environnement, composé de bâtiments en R+ 2 à R+ 4 et de style et de matériaux comparables. La circonstance relevée par les requérants que le projet génère depuis la place de l'Ambiance une perte de visibilité de l'église, laquelle ne bénéficie d'aucune protection particulière, n'est pas de nature à elle seule à établir qu'il porte atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants.

11. D'autre part, le moyen présenté en appel selon lequel le bâtiment à destination de parking sous-terrain, qui est végétalisé, méconnaîtrait les prescriptions de ce même article relatives aux caractéristiques des toitures, manque en fait.

S'agissant de l'article UA 12 :

12. Aux termes des dispositions générales de cet article : " Les aires de stationnement propres aux ensembles immobiliers resteront parties communes. ".

13. La circonstance invoquée en premier lieu par les requérants que les neuf places de stationnement affectées à l'office du tourisme ne peuvent relever de la copropriété ne suffit pas à établir la méconnaissance de ces dispositions, qui visent à assurer une jouissance collective des places de stationnement et ne sauraient avoir pour objet de réglementer le régime de la propriété de ces emplacements.

14. En second lieu les requérants reprennent en appel la critique de la configuration en enfilade de certaines places de stationnement. Cette seconde branche du moyen doit être écartée par adoption des motifs retenus à bons droit par les premiers juges.

15. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune d'Arâches-La-Frasse, que M. C... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge des intimées, qui ne sont pas parties perdantes. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de M. C... et autres le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune d'Arâches-La-Frasse, d'une part, et à la SAS Terresens, d'autre part.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... et autres est rejetée.

Article 2 : M. C... et autres verseront solidairement la somme de 1 500 euros à la commune d'Arâches-La-Frasse, d'une part, et à la SAS Terresens, d'autre part, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C..., à la commune d'Arâches-La-Frasse et à la société Terresens.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme L... M..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme K... J..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2019.

2

N° 18LY04440

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04440
Date de la décision : 05/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CDMF-AVOCATS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-11-05;18ly04440 ?
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