Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 2 mars 2015 par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne lui a infligé un blâme avec inscription au dossier.
Par un jugement n° 1501260 du 15 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 février 2017 et des mémoires enregistrés le 7 juillet 2017, présentés pour M. D..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1501260 du 15 décembre 2016 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;
3°) de mettre à la charge de la chambre de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a écarté comme irrecevable le moyen, touchant à la légalité externe de la décision en litige, tiré de l'absence de communication intégrale et complète de son dossier individuel, dès lors que ce n'est qu'à la réception du mémoire en défense qu'il a découvert l'existence de témoignages ne figurant pas dans ce dossier ;
- la procédure est irrégulière en l'absence de communication intégrale et complète de son dossier individuel qui ne comportait pas les attestations sur lesquelles reposait la procédure disciplinaire ; ces attestations doivent être écartées des débats et sont dépourvues de force probante dès lors qu'elles ont été établies par des agents de la chambre ;
- les griefs invoqués pour le sanctionner sont non établis ou injustifiés ;
- le blâme s'inscrit dans un contexte de harcèlement moral à son encontre et d'entrave à l'exercice de ses mandats de délégué syndical et de représentant du personnel.
Un mémoire, présenté pour M. D..., enregistré le 24 mai 2018, n'a pas été communiqué.
Par des mémoires enregistrés les 14 juin et 17 octobre 2017, présentés pour la chambre de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne, elle conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Par ordonnance du 30 mai 2018 la clôture de l'instruction a été fixée au 2 juillet 2018.
Par une ordonnance n° 17LY00683 du 4 décembre 2018, le président assesseur de la 5ème chambre de la cour a, en application du 3° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. D....
Par un arrêt n° 19LY00350 du 6 mai 2019, la cour a admis le recours en rectification d'erreur matérielle présenté par la chambre des métiers et de l'artisanat interdépartementale de Bourgogne, déclaré nulle et non avenue l'ordonnance du président assesseur de la 5ème chambre de la cour n° 17LY00683 du 4 décembre 2018 et rouvert l'instance.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
- le statut du personnel administratif des chambres de métiers ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Seillet, président assesseur,
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public,
- les observations de Me Delsaud, avocat de M. D..., et de Me Lucien-Baugas, avocat de la chambre des métiers et de l'artisanat interdépartementale de Bourgogne ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., recruté initialement comme moniteur de gestion par la chambre de métiers et de l'artisanat de Saône-et-Loire, en 1992, puis promu par la suite sur un poste de cadre de chargé de développement économique, d'abord au sein de cette même chambre puis, après sa création, en 2011, par l'effet d'un décret du 6 septembre 2010, de la chambre régionale de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne, devenue la chambre des métiers et de l'artisanat interdépartementale de Bourgogne, interjette appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 mars 2015 par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne lui a infligé un blâme.
Sur la légalité externe de la décision en litige :
2. Après l'expiration du délai de recours contre un acte administratif, sont irrecevables, sauf s'ils sont d'ordre public, les moyens soulevés par le demandeur qui relèvent d'une cause juridique différente de celle à laquelle se rattachent les moyens invoqués dans sa demande avant l'expiration de ce délai. Ce délai de recours commence, en principe, à courir à compter de la publication ou de la notification complète et régulière de l'acte attaqué. Toutefois, à défaut, il court, au plus tard, à compter, pour ce qui concerne un demandeur donné, de l'introduction de son recours contentieux contre cet acte.
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. D... a soulevé le moyen de légalité externe tiré du caractère incomplet du dossier individuel qu'il avait consulté, à défaut de contenir des témoignages utilisés par le président de la chambre régionale de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne pour motiver la décision en litige, dans un mémoire enregistré le 2 octobre 2015 au greffe du tribunal administratif de Dijon, soit plus de deux mois après l'introduction de son recours, le 30 avril 2015, alors qu'il n'avait jusque là soulevé aucun moyen se rattachant à la même cause juridique, ce qu'au demeurant il ne conteste pas. Un tel moyen, qui n'est pas d'ordre public, était, dès lors, irrecevable, en dépit de la circonstance que M. D... n'aurait constaté la présence des témoignages en cause qu'à l'occasion de la production par la chambre régionale d'un mémoire en défense. Par suite, M. D... n'est pas recevable à reprendre ce moyen en cause d'appel.
Sur la légalité interne de la décision en litige :
4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
5. Les règles générales de la procédure contentieuse interdisent au juge de se fonder sur des pièces qui n'auraient pas été soumises au débat contradictoire. Par suite, le juge administratif ne peut fonder sa décision sur le contenu de documents qui n'auraient pas été communiqués à l'autre partie, et doit être écartée des débats une pièce produite par l'une des parties qui n'aurait pu être communiquée à l'autre partie. Toutefois, en l'espèce, la seule circonstance, à la supposer établie, que les témoignages pris en compte par le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne pour infliger un blâme à M. D..., qui ont été communiqués à ce dernier par le premier juge dans le cadre du débat contradictoire, n'auraient pas figuré parmi les pièces de son dossier individuel lors de sa consultation, n'est pas de nature à justifier que ces pièces soient écartées des débats. De même la seule circonstance que ces témoignages émanent d'agents de la chambre régionale n'est pas de nature à leur ôter tout caractère probant.
6. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 10 décembre 1952 : " La situation du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers de France est déterminée par un statut établi par des commissions paritaires nommées, pour chacune de ces institutions, par le ministre de tutelle ".
7. Aux termes de l'article 61 du statut du personnel administratif des chambres de métiers : " Toute faute commise par un agent dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. / Les sanctions disciplinaires sont : / sanctions du premier degré : / - l'avertissement ; / - le blâme avec inscription au dossier. / Le blâme est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucune autre sanction n'est intervenue pendant cette période. "
8. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la lecture de la décision du 2 mars 2015 en litige, que la sanction disciplinaire du blâme a été infligée à M. D... au motif d'un comportement agressif récurrent de cet agent, en raison d'une agression verbale d'une collègue, Mme E..., le 18 novembre 2014, d'une altercation avec M. A..., responsable d'unité administrative de Saône-et-Loire, le 31 octobre 2014, de ses réactions violentes constatées par Mme B..., sa responsable hiérarchique directe, et de la façon ironique de répondre aux courriers du président de la chambre.
9. D'une part, il ressort des témoignages et des pièces produites par la chambre régionale, à l'exception de l'attestation de Mme B... qui ne fait référence à aucun fait précis et daté, que le comportement inadéquat de M. D... avec ses collègues et sa hiérarchie est établi, et notamment les agressions verbales et les menaces envers ses collègues et sa hiérarchie, et qu'un tel comportement fautif était de nature à justifier une sanction. D'autre part, et alors notamment qu'un tel comportement avait déjà conduit, en 2010, la chambre des métiers et de l'artisanat de la région Bourgogne à accepter une demande de mutation d'un agent dans un autre département que celui ou exerce l'intéressé, la sanction du blâme infligée par la décision en litige n'est pas disproportionnée.
10. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que la sanction infligée à M. D... l'a été en raison de son comportement envers ses collègues et sa hiérarchie, dont la réalité a été établie par les pièces produites. Si M. D... soutient que la sanction en litige s'inscrit dans un contexte de harcèlement moral et de discrimination syndicale il ne justifie pas, toutefois, que ladite sanction caractériserait un comportement de harcèlement moral.
11. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de la décision en litige. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que soit mise à la charge de la chambre des métiers et de l'artisanat interdépartementale de Bourgogne une somme au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. D... la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la chambre des métiers.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : M. D... versera la somme de 1 000 euros à la chambre des métiers et de l'artisanat interdépartementale de Bourgogne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et à la chambre des métiers et de l'artisanat interdépartementale de Bourgogne.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Burnichon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 octobre 2019.
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N° 17LY00683