La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/10/2019 | FRANCE | N°19LY00968

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 15 octobre 2019, 19LY00968


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux requêtes distinctes, M. E... B... et Mme C... D... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 15 novembre 2018 par lesquels le préfet de la Haute-Savoie a procédé au retrait des titres de séjour qui leur avaient été délivrés, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1807987-1808029 du 11 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rej

eté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 mars...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux requêtes distinctes, M. E... B... et Mme C... D... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 15 novembre 2018 par lesquels le préfet de la Haute-Savoie a procédé au retrait des titres de séjour qui leur avaient été délivrés, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1807987-1808029 du 11 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 mars 2019, M. et Mme B..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 février 2019, en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des décisions les obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions du 15 novembre 2018 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de leur délivrer un titre de séjour et, dans l'attente, un récépissé de demande de titre de séjour, ou de procéder au réexamen de leur situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision obligeant Mme B... à quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions les obligeant à quitter le territoire français méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de la Haute-Savoie qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Par décision du 10 avril 2019, le président du bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. et Mme B....

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Besse, président-assesseur ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B..., ressortissants du Kosovo, sont entrés en France en juillet 2015, accompagnés de leurs trois enfants mineurs. Après le rejet de leurs demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile, le préfet de la Haute-Savoie, par deux arrêtés du 4 août 2017, a refusé leur admission au séjour au titre de l'asile et les a obligés à quitter le territoire français. En exécution de jugements des 23 et 27 novembre 2017 annulant ces arrêtés, le préfet de la Haute-Savoie leur a délivré des titres de séjour mention " vie privée et familiale " valables jusqu'au 19 janvier 2019. Suite à l'annulation de ces jugements, par deux arrêts de la Cour de céans en date du 20 septembre 2018, le préfet de la Haute-Savoie, après avoir procédé au retrait des titres délivrés, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination, par deux arrêtés du 15 novembre 2018. Par un jugement du 11 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de M. et Mme B... tendant à l'annulation de ces arrêtés. Les intéressés relèvent appel de ce jugement, en tant qu'il a rejeté les conclusions de leurs demandes dirigées contre les décisions les obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... souffre de la maladie de Behçet, maladie auto-immune se traduisant notamment par de graves affectations ophtalmologiques. Par avis rendu le 27 décembre 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut devrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'il n'existe pas de traitement approprié au Kosovo. Toutefois, le préfet de la Haute-Savoie a produit une fiche MedCOI datant de janvier 2018, établissant la disponibilité au Kosovo de la colchicine, principe actif du traitement médicamenteux que requiert l'état de santé de Mme B.... Si l'intéressée produit des certificats médicaux établis par un médecin ophtalmologiste du Kosovo précisant que son état de santé ne peut y être soigné, ces documents, rédigés en des termes généraux, ne permettent pas de tenir pour établie l'absence de traitement approprié au Kosovo, ni l'impossibilité pour Mme B... de bénéficier effectivement de ce traitement. Par suite, la décision l'obligeant à quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions citées au point précédent de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. M. et Mme B... font valoir la scolarisation en France de leurs enfants et leur bonne intégration. Toutefois il ressort des pièces du dossier qu'ils ont toujours vécu au Kosovo, où la cellule familiale peut se reconstituer, jusqu'à leur entrée récente en France, à l'âge respectivement de 33 et 32 ans. Par suite, et alors qu'il n'est pas établi ainsi qu'il a été dit précédemment que Mme B... ne pourrait bénéficier de soins dans ce pays, les décisions les obligeant à quitter le territoire français n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent jugement, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction ne peuvent par conséquent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, la somme réclamée sur leur fondement par M. et Mme B....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à Mme C... D... épouse B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme H... I..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme G... F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2019.

2

N° 19LY00968

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00968
Date de la décision : 15/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-15;19ly00968 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award